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Campus

Diplômés en journalisme et... chômeurs

Chaque année, des centaines d'étudiants obtiennent leurs diplômes en journalisme des universités libanaises. Trouvent-ils tous un emploi ? De nouveaux journalistes se sont ouverts à Campus et ont raconté les difficultés qu'ils rencontrent pour entamer leur parcours professionnel.

Myriam Salameh, diplômée en information et communication de l’USJ.

« Il nous est très difficile de trouver du travail », confie Nour Geagea qui vient de compléter un master 1 en journalisme. Et d'expliquer : « Le taux de diplômés en journalisme est en constante augmentation. Nombreux sont ceux qui chôment. Pour obtenir un travail, un obstacle inévitable se dresse devant nous : le besoin d'avoir un piston. »
Myriam Salameh, licenciée en information et communication, confirme les propos de Nour. Elle confie : « Être recruté est difficile, surtout si on ne connaît pas quelqu'un – un politicien, un homme d'affaires, un journaliste connu – qui pourrait pistonner notre demande. » Après une longue recherche d'emploi, Myriam est finalement embauchée par le quotidien al-Joumhouria. Aujourd'hui, elle est responsable de la page culturelle.
Ce n'est pas le cas de nombreux diplômés, obligés de se tourner vers d'autres métiers pour gagner leur vie. Andréa Abou Antoun, licenciée en journalisme, travaille comme superviseur dans un centre d'appels téléphoniques. Diana el-Hachem, après avoir obtenu une licence en journalisme, travaille dans le domaine du télémarketing qu'elle dit « aimer ».

 

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Une compétition féroce
M. Ghassan Hajjar, directeur de la rédaction au quotidien an-Nahar, reconnaît que le nombre annuel des diplômés en journalisme est élevé. Mais il estime que « le Liban ne forme pas des journalistes uniquement pour la presse locale, mais aussi pour la presse arabe. » À son avis, il y a assez d'offres d'emplois pour tous les diplômés. « Ces derniers mois, an-Nahar – à lui seul – a recruté 20 journalistes Web et 10 autres pour an-Nahar TV. La compétition existe. C'est le meilleur postulant qui sera embauché », affirme-t-il.
M. Charles Jabbour, directeur de la rédaction au quotidien al-Joumhouriya, ne partage pas cet optimisme. Il trouve que « la demande sur le marché de travail est limitée. La plupart des médias se contentent de leur équipe parce que l'objectif est désormais de survivre et non pas de se développer ». Il souligne que les bons éléments sauront se faire remarquer, mais admet qu'en général, « les salaires des journalistes ne sont pas élevés ». Une réalité que la plupart des diplômés interviewés dénoncent. « Avant d'obtenir mon master en journalisme, je travaillais dans un restaurant. Mon revenu atteignait les 1 200$. Je vais bientôt travailler pour le site d'al-Jadeed Sport pour une somme inférieure (environ 750$). Mais je ne regrette pas d'avoir suivi ma passion », confie Éliane Dagher.
M. Hajjar rappelle que la moyenne des salaires au Liban est basse. « Cette situation est donc commune à tous les métiers. Ce ne sont pas uniquement les journalistes qui sont parfois obligés d'exercer d'autres travaux en parallèle. »

 

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Un bagage insuffisant ?
Estelle Sahyoun évoque une autre difficulté : l'adaptation au milieu du travail. Cette licenciée en journalisme de l'UL l'explique par le fait qu' « à la fac, on n'a pas effectué assez de travaux pratiques ». Josephine Haddad, correspondante pour la chaîne de radio Saout el-Mada, se plaint elle aussi du nombre insuffisant de cours pratiques à l'université. « Il y a aussi un manque d'équipements à la fac qui se répercute négativement sur notre formation », ajoute-t-elle. Mêmes échos du côté de Myriam, qui déclare : « Au travail, on découvre de nombreuses notions qu'on n'a pas apprises à la fac mais, avec le temps, on gagne en pratique surtout en demandant des conseils aux collègues. » Et d'ajouter : « Lors de mes études à l'USJ, je n'ai pas eu l'opportunité de m'exercer sur le terrain en couvrant des événements pour la presse écrite. »
Carole Karam, responsable des stages à la radio La Voix du Liban (Achrafieh), confirme les dires des étudiantes. « Les nouveaux diplômés, provenant de différentes universités, qui postulent chez nous, ne sont pas assez formés pour travailler dans une radio. Ils sont bourrés de théories et souffrent d'un manque de pratique. »
« La faculté forme des techniciens, admet le Dr Gladys Saadé, directrice de la faculté d'information 2 de l'UL. Mais ces derniers doivent associer leurs pratiques à des fondements théoriques, d'où la nécessité de la théorie. » Et de préciser que « le cursus universitaire, en dernière année de licence, comprend un stage obligatoire qui prépare les étudiants au marché du travail. Ces étudiants sont également appelés dès la première année à postuler pour des stages dans les différents médias afin de gagner en pratique ». Quant aux plaintes concernant le manque d'équipements à la faculté, la directrice clarifie : « Le problème essentiel qui nous empêche d'installer des studios est le manque d'espace. Aujourd'hui, trouver un nouvel immeuble qui répond à ce besoin est devenu une priorité. » Un pas qui, selon le Dr Saadé, aidera l'université à mieux performer.

 

 (Lire aussi: Les start-up, principal moteur de la création d'emplois)

 

Un déficit culturel ou un manque de motivation ?
Ghassan Hajjar rejette le prétexte du manque de formation pratique brandi par les étudiants pour expliquer les problèmes qu'ils rencontrent une fois embauchés. « Pour devenir journaliste, l'étudiant est censé fournir un effort personnel et ne pas se contenter de ce qu'il apprend en classe. Il doit suivre l'actualité, lire les journaux, rechercher des références, enrichir sa culture générale et renforcer sa langue à travers ses lectures. Le futur journaliste est appelé aussi à développer ses compétences, à s'exercer et à effectuer des stages pour gagner en pratique. De cette manière, il sera prêt au travail. »
Mêmes échos chez M. Charles Jabbour. « Bien que les bons éléments existent, aujourd'hui le niveau des diplômés régresse suite à l'absence de culture politique et de lecture », affirme-t-il. Et de se demander : « Est-il permis qu'un licencié en journalisme ne lise pas les journaux et ne regarde pas le journal télévisé du soir ? » Directeur responsable au quotidien as-Safir, Ghasseb Mokhtar conclut : « Autrefois, les journalistes fournissaient un effort personnel, physique et mental, pour accéder à l'information et accomplir avec passion leur job. Aujourd'hui, bien que l'accès à l'actualité soit devenu plus facile grâce à la technologie, les nouveaux diplômés sont moins patients, moins motivés et moins passionnés pour le travail. »

 

 

 

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