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Diaspora - Visite

Cleveland, un mini-Liban au cœur de l’Amérique profonde

C'est ce qu'on appelle l'Amérique profonde. Bien qu'étant à une heure de vol de New York, Cleveland a toutes les caractéristiques des villes américaines de province, où les activités se concentrent dans trois rues, le fameux « Downtown » qui s'est mis aux couleurs libanaises pour accueillir le ministre des Affaires étrangères dans une visite rarissime dans ce coin de l'Ohio aux États-Unis.

Le siège de la Nola à Cleveland à l’heure libanaise pour la visite de Gebran Bassil.

L'importante communauté libanaise à Cleveland (près de 26000 habitants) était dans tous ses états. Aucun ministre libanais n'était déjà venu dans cette ville. Mais Gebran Bassil a décidé de l'inclure dans son séjour américain, dans une volonté de resserrer les rangs des émigrés libanais et surtout de les pousser à s'enregistrer, eux et leurs enfants, auprès du consulat libanais, pour que le lien entre le pays d'origine et celui de l'émigration ne soit pas rompu.


La Nola (North Ohio Lebanese Association) s'était entièrement mobilisée pour organiser la visite du ministre et son séjour de 24 heures dans la ville. Des cartons avaient été imprimés dans ce but et plusieurs rencontres planifiées, la première au siège de l'association, avec un déjeuner tardif composé de plats libanais dans la plus pure tradition des villages de la montagne, un dîner de gala et une messe suivie d'un débat à l'église Saint-Maron de la ville.


C'est qu'il fallait rattraper en quelques heures tout le temps perdu et permettre aux Libanais de Cleveland, et de l'Ohio en général, de se replonger dans la vie libanaise. Pourtant, en dépit du réseau routier impeccable et de la verdure qui entoure la ville, on se serait cru au Liban, au sein de cette communauté qui, en dépit de son éloignement géographique, vit pratiquement encore à l'heure libanaise. Ici, les programmes des chaînes de télévision libanaises sont suivis avec une attention touchante et les clivages traditionnels qui font partie de notre paysage local sont également reproduits dans ce coin où rien, ni dans le climat ni dans le paysage, n'est censé pourtant rappeler le Liban. Ce qui donne beaucoup de boulot au consul général basé à Detroit, Bilal Kabalan, qui est continuellement par monts et par vaux pour suivre les besoins des Libanais et tenter de répondre à leur attente. D'ailleurs, il affirme avoir inventé le « consulat mobile » tant il se déplace dans la région. Le jeune et dynamique consul ajoute avec humour: «Lorsqu'il y a un problème, on fait appel à moi, mais lorsque tout va bien, on m'oublie. »

 

(Lire aussi : Aux États-Unis, l'employé fédéral de l'année est une Américano-Libanaise)


Pourtant, de l'avis des Américano-Libanais des États-Unis, la communauté de l'Ohio est l'une des plus attachées au Liban, dans toute sa diversité. La plupart des Libanais venus dans ce coin l'ont choisi au départ pour son centre hospitalier, l'un des plus performants des États-Unis. Une fois leurs études ou leurs spécialisations achevées, ils se sont installés sur place en trouvant du travail dans les multiples branches médicales. Il faut d'ailleurs noter que les Libanais de Cleveland appartiennent généralement à la classe moyenne plutôt aisée. Mais le plus curieux dans cette communauté, assez fermée, c'est que la plupart de ses membres se marient entre eux ou, lorsque ce n'est pas possible, ils rentrent pour un court séjour au Liban afin d'y trouver une épouse et la ramener au cœur de l'Ohio. C'est presque un must, et les mères libanaises sont assez strictes sur ce point, souhaitant avoir une belle-fille libanaise. C'est pourquoi, en voyant les familles se presser dans la cour de l'église le dimanche matin, on a l'impression de vivre une scène dominicale banale dans une bourgade libanaise de la montagne...

Les gens d'ailleurs se connaissent tous, et même si certains ne se parlent pas en raison de divergences politiques libanaises, ils suivent avec attention les différents bulletins d'information du pays. Si Untel a donc des problèmes avec sa femme, toute la communauté le sait, et si une autre a des problèmes de santé, tout le monde le sait aussi. Plus récemment, il y a eu un nouveau flot d'émigrés chiites venus du Liban, qui concentrent leurs activités dans les affaires. Une bonne partie d'entre eux tiennent cependant à resserrer les liens avec leurs semblables chrétiens. Haïtham Bazzi est l'une des figures de cette nouvelle communauté libanaise dans l'Ohio. La communauté fonctionne donc comme un mini-Liban, avec ses contradictions, ses affinités et ses coutumes. Pour rien au monde, les Américains d'origine libanaise à Cleveland ne rateraient donc la messe du dimanche à l'église Saint-Maron ou à la Saint Elias Church. La première a été construite en 1914 et la seconde en 1905. Depuis les années 70, celle-ci accueille d'ailleurs chaque année le Middle Eastern
Festival.


La Nola est sans doute la plus ancienne des associations libanaises à Cleveland et la plus active. Fondée par Pierre Bejjani, elle est aujourd'hui dirigée par Richard Ghanim Jr. Mais la visite du ministre Bassil a été par exemple organisée par Pierre Chelala qui a formé un comité pour l'aider dans cette mission. La Nola organise de nombreuses activités comme le « Lebanese Cultural Garden » qui a eu lieu en septembre. Mais elle a aussi un quotidien, Profile News (dont Pierre Chelala est le rédacteur en chef), qui tient la communauté informée de l'actualité chez elle et au Liban. Il existe aussi un autre organe de presse pour les Libanais, as-Sahafa, (dirigé par Fatina Salaheddine). Il existe également une autre association The Aïtaneet Brotherhood Association, qui a été fondée en 1927 par Jamil (James) Kaïm, originaire de Aïtanit dans la Békaa-Ouest. Cette association, qui a aidé beaucoup de Libanais et de Syriens venus pendant et après la Seconde Guerre mondiale, compte aujourd'hui près de 700 membres.


Tout ce monde s'est rassemblé autour de Gebran Bassil pour lui demander des nouvelles du Liban, à l'ombre de toutes les menaces qui pèsent actuellement sur l'ensemble de la région. Tout en se voulant rassurant, le ministre a insisté sur le fait que le Liban a besoin de ses émigrés. « Ne l'abandonnez pas, a-t-il dit. Venez le voir comme on rend visite à un ami cher ou à un membre de la famille. Je sais déjà qu'il vit en vous, mais aidez-le à continuer à vivre sous la protection de ses cèdres. »

 

Retrouvez ici l'actualité de la diaspora libanaise

L'importante communauté libanaise à Cleveland (près de 26000 habitants) était dans tous ses états. Aucun ministre libanais n'était déjà venu dans cette ville. Mais Gebran Bassil a décidé de l'inclure dans son séjour américain, dans une volonté de resserrer les rangs des émigrés libanais et surtout de les pousser à s'enregistrer, eux et leurs enfants, auprès du consulat libanais,...