Rechercher
Rechercher

Liban - TSL

Farrell : L’affaire Merhi est venue combler une lacune dans l’enquête Hariri

Farrell : " Le véritable travail du tribunal ce n'est pas l'enquête mais le procès à proprement parler" . Photo d'archives. Toussaint Kluiters/AFP/POOL

C'est une opportunité rare que l'ordre des avocats a offerte hier aux chercheurs et juristes s'intéressant à la justice internationale, venus malheureusement en nombre limité.
Pour ceux qui n'ont pas pris la peine de montrer un semblant de curiosité et d'intérêt pour un sujet qui concerne pourtant le Liban de manière viscérale, notamment les avocats et les magistrats, voici en bref ce qu'ils ont raté : une apparition publique rarissime du procureur du Tribunal spécial pour le Liban, Norman Farrell, et un échange percutant entre ce dernier et la partie adversaire dans le procès de l'affaire Rafic Hariri, représentée par le chef du bureau de la défense, François Roux.


Même si les deux hommes ont convenu de certains principes généraux en matière de procédure juridique internationale – sujet de prédilection de cette conférence – leurs divergences, par ailleurs plus que légitimes, sur des points relatifs au procès ne pouvaient échapper à personne.
MM. Roux et Farrell s'en sont donnés à cœur joie en se lançant des piques judicieuses, enrobées d'un langage juridique élégant, bien maîtrisé, notamment sur la question des fuites provenant du TSL et la jonction de l'affaire Merhi, dont les preuves apportées « sont venues colmater les brèches de l'enquête », atteste M. Farrell.


Organisé par l'ordre des avocats de Beyrouth, à l'initiative du juge Ralph Riachi, vice-président du TSL, le face-à-face entre François Roux et Norman Farrell devait se placer cette fois-ci sous le thème des « Procédures pénales internationales » avec pour cas d'école le TSL qui s'est largement inspiré du droit libanais, comme l'ont rappelé à plusieurs reprises les intervenants.


À tour de rôle, les deux hommes ont passé en revue les points de force et les faiblesses respectives des procédures du common law (système anglo-saxon ) et du droit romano-germanique ( droit civil) et les nuances au sein de chacun de ces systèmes selon leur application dans les différents pays.
Des interventions respectives faites avec une honnêteté intellectuelle qui laissait à peine transparaître les préférences du chef du bureau de défense pour le système civil et celles du procureur pour le système anglo-saxon.


Norman Farrell explicitera ainsi le rôle prépondérant du procureur au sein du TSL, qui diverge de celui du procureur libanais. Ce dernier, dit-il, « commence l'enquête et la renvoie devant le magistrat d'instruction ».
Dans le système adopté par le TSL, « ce n'est pas tout à fait le cas puisque c'est le procureur qui initie l'enquête préliminaire ».
« L'ensemble du dossier reste confiné dans mon bureau et non aux mains d'un juge d'instruction », avec tout ce que cela implique en termes de « collecte de preuves, d'objectifs visés et de critères légaux », assure M. Farrell, qui exprime à ce propos sa préférence pour un rôle plus intégral du procureur pour ce qui est de l'analyse des preuves.
« Mon obligation est de prendre en considération toutes les preuves, celles qui sont bonnes et celles qui sont déficientes, les preuves à charge et à décharge », dit-il, prenant soin de souligner que cet avis n'est pas nécessairement partagé par l'ensemble de ses confrères.
« Un bon procureur ne saurait confondre sa tâche avec celle d'un juge d'instruction. Vous ne pouvez bien maîtriser votre dossier qu'à moins de bien connaître le dossier opposé », assure-t-il.


Évoquant la question de la relation qu'il entretient avec les autorités libanaises, M. Farrell a précisé que toute requête formulée par son bureau est exécutée « en vertu du droit libanais et avec l'aide des autorités du pays ». « Cela montre que nous respectons le droit libanais », fait-il remarquer.

Revenant sur la question du mélange des différentes procédures adoptées par le TSL, le procureur reconnaît qu'« il n'est pas nécessairement le meilleur, mais celui qui est gravé dans notre statut », l'idée étant de « faire évoluer le droit sur la base de ce que l'on connaît ».


François Roux poursuit à son tour sur la même lancée, soulignant la nécessité de « prendre le meilleur dans chacun des systèmes juridiques dans le monde ». C'est ainsi qu'il évoquera les « grandeurs et les faiblesses » du système romano-germanique, le système anglo-saxon « ayant également ses limites ».
« Votre tribunal nous y aide. Nous essayons de construire un droit qui prend le meilleur dans les deux systèmes », ajoute-t-il, vantant au passage la possibilité qu'ont les avocats de la défense au sein du TSL « de faire leur propre enquête ».
M. Roux insiste par ailleurs sur l'importance du système du contre-interrogatoire, pierre angulaire du système appliqué au sein du TSL.
« Les juges sont seulement des arbitres. Ils vont laisser les parties se débattre avec l'idée que la vérité va jaillir du contradictoire », note le chef du bureau de la défense.
« Votre tribunal fait faire des progrès importants à la procédure. » « Nous construisons ensemble le droit international », dit-il, dans son style personnalisé, visant à interpeller les auditeurs libanais dans la salle. Et de lancer un appel au ton désespéré aux avocats libanais, les invitant à s'inscrire sur la liste des conseils et experts sollicités par son bureau.


L'échange indirect qui suivra entre les deux intervenants lors de la séance des questions-réponses sera autrement révélateur du bras de fer que mènent l'accusation et la défense, toujours dans une parfaite retenue.
Interrogé par une chercheuse, Lynn Maalouf, sur les motifs derrière le choix stratégique du procureur de la jonction du dossier Merhi à celui des quatre autres accusés dans l'affaire de l'assassinat de Rafic Hariri, sachant que le cas de Merhi ne semble pas apporter plus d'éclairage sur la question du mobile du crime, le procureur répond « qu'il ne s'agit en aucun cas d'un choix stratégique mais d'une décision guidée par le poids des preuves ».
M. Farrell précise à ce propos que les preuves apportées dans l'affaire Merhi « sont venues colmater une brèche dans l'enquête ». Il s'agit, précise-t-il, de l'interaction qui existe entre le groupe de téléphones verts et celui des téléphones violets, un élément qui manquait au dossier des premiers accusés et que les preuves recueillies auprès du cinquième ont fini par apporter.


Tout en reconnaissant qu'effectivement l'affaire Merhi mérite qu'on s'y attarde, M. Roux a saisi l'occasion pour plaider, une fois de plus, en faveur d'un laps de temps additionnel et suffisant pour la défense « pour se préparer ».


À la question d'un avocat présent qui lui demandait pourquoi le rapport annuel publié fait allusion à trois cas de fuites uniquement sachant qu'il y en a eu d'autres, le procureur rétorque par une autre question : » Je suis tout simplement curieux de savoir pourquoi vous m'adressez la question à moi ? À ma connaissance, ce n'est pas du bureau du procureur que proviennent les fuites. » Ce à quoi M. Roux se dépêche de répliquer : « Il est clair que le bureau du procureur n'a pas saisi le bureau de la défense pour soupçon. »
Tout avait été dit, ou presque.

 

Lire aussi
Rapport annuel du TSL : enquête pour outrage au tribunal et poursuite de l'investigation dans les affaires Haoui, Hamadé et Murr

TSL : les avocats de Merhi tentent de prolonger autant que possible les délais

C'est une opportunité rare que l'ordre des avocats a offerte hier aux chercheurs et juristes s'intéressant à la justice internationale, venus malheureusement en nombre limité.Pour ceux qui n'ont pas pris la peine de montrer un semblant de curiosité et d'intérêt pour un sujet qui concerne pourtant le Liban de manière viscérale, notamment les avocats et les magistrats, voici en bref ce...

commentaires (5)

Tout ce petit monde s'amuse comme des fous dans ce machin ou plus on est de fous plus on s'amuse ...lol.....

FRIK-A-FRAK

11 h 35, le 12 mars 2014

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Tout ce petit monde s'amuse comme des fous dans ce machin ou plus on est de fous plus on s'amuse ...lol.....

    FRIK-A-FRAK

    11 h 35, le 12 mars 2014

  • Ce tribunal va enfin donner le signal de leur fin, à ces assassins !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 22, le 12 mars 2014

  • BAVARDAGE À PASSER LE TEMPS.

    Gebran Eid

    10 h 50, le 12 mars 2014

  • Bravo ! En avant le Tribunal Spécial.... !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    08 h 58, le 12 mars 2014

  • COMBIEN DE MILLIARDS DE DOLLARS POUR QUE LE TRAIN ARRIVE À LA DERNIÈRE STATION, SI IL Y ARRIVERAIT, ET SI IL LA TROUVERAIT ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 04, le 12 mars 2014

Retour en haut