Rechercher
Rechercher

Liban

« Mais la guerre, ça fait des morts ! »

Thibaud de Barbeyrac : « À tout aseptiser, on tue la capacité d’indignation des gens. »

Si au Liban, il n'existe pas de code d'éthique clair ou de loi concernant la diffusion des images violentes sur les télévisions, on serait tenté de croire que la situation serait très différente en France. Mais Thibaud de Barbeyrac, chef du service Société-Culture-Sport au sein de la rédaction du journal télévisé de France 2, confie à L'Orient-Le Jour que « personne ne nous dit quoi faire ». « Il existe un Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), explique-t-il, mais c'est une sorte de police qui nous avertit quand on va très loin. Cela nous est déjà arrivé à France 2 lors de la couverture de la guerre en Irak. Nous avions montré des morts de manière assez visible et avions reçu une sorte de carton jaune. Mais ce n'est pas une règle imposée, et nous décidons au sein de l'équipe de France 2 quelles images nous allons diffuser, et c'est une étude au cas par cas. » « L'existence du CSA est bénéfique, car nous sentons qu'il y a une certaine autorité qui nous observe, et nous voulons tous une bonne relation avec ce CSA. Nous nous sentons donc obligés de nous poser les bonnes questions, de débattre et de décider quelles images doivent passer à la télé. C'est un débat au quotidien, que l'on a eu depuis toujours, en tout cas dans nos écoles de journalisme, et ce genre de débat est essentiel », ajoute M. de Barbeyrac.
Pour le journaliste français, il revient aux journalistes seuls de décider des images qu'ils voudraient diffuser. « Personnellement, je pense qu'il faut montrer des morts sans pourtant aller à l'extrême. Car la guerre fait des morts. C'est la force de l'image, la réalité. À tout aseptiser, on tue la capacité d'indignation des gens. Si l'on ne montre pas le sang, l'on pourrait faire croire que la guerre est propre, alors qu'elle ne l'est pas. » Et de poursuivre : « Le 11 septembre 2001, aux États-Unis, nous n'avons pas vu un seul mort. Mais j'ai eu la chance de voir un documentaire réalisé par les frères Naudet, et dans lequel on entend les bruits des personnes qui se trouvaient dans le World Trade Center et on les entend heurter les vitres et mourir sur-le-champ. De ce jour-là, c'est ce bruit que je me rappelle. Treize ans après, c'est ce bruit qui m'indigne encore. Si je m'étais contenté des images aseptisées, je n'en serais pas tellement indigné aujourd'hui. Et c'est dans cette même logique que je dis : heureusement que nous avons des images des camps de concentration dans l'Allemagne nazie. Et en ce qui concerne le direct, on ne peut pas reprocher à un caméraman d'avoir filmé certaines images. Un cameraman et un reporter doivent tout filmer. En différé, on sélectionne les images, et si en direct on sent qu'il peut y avoir un risque de dérapage, on assume le choix de ne pas faire de transmission en direct. »
Dans les locaux du journal télévisé de France 2, c'est donc le débat qui prévaut. « Nous discutons de tout, dit Thibaut de Barbeyrac. Nous avons longtemps discuté de l'affaire François Hollande-Julie Gayet avant d'en parler. Nous avions initialement prévu de ne pas diffuser l'info dans le journal, mais quand un communiqué de l'Élysée a été publié, nous nous sommes vu contraints d'en parler. Les affaires d'ordre privé sont sensibles. Pour cela, nous tentons toujours de ne jamais balancer d'infos sans nous assurer des sources, et d'éviter la course effrénée à l'info. »

Si au Liban, il n'existe pas de code d'éthique clair ou de loi concernant la diffusion des images violentes sur les télévisions, on serait tenté de croire que la situation serait très différente en France. Mais Thibaud de Barbeyrac, chef du service Société-Culture-Sport au sein de la rédaction du journal télévisé de France 2, confie à L'Orient-Le Jour que « personne ne nous dit...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut