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Liban - Misère

Le drame des réfugiés syriens de la Békaa sous la lorgnette de l’ONU

Une délégation des Nations unies a effectué une tournée en week-end dans la Békaa pour mesurer les besoins des réfugiés syriens et des communautés qui les accueillent.

Hanane montre fièrement son dessin multicolore, une maison gigantesque et un petit arbre. Il faut un peu de temps pour savoir que Hanane, six ans, est une fille. Elle porte un chapeau en laine, a les cheveux très courts et répond par monosyllabes ou en hochant la tête aux questions qu'on lui pose.
Hanane fait partie des 425 petits réfugiés syriens, âgés entre 4 et 14 ans, qui fréquentent une école construite à l'intérieur d'un campement d'environ un millier de déplacés, à Fayda, une localité limitrophe de Zahlé. Cette école et ce camp champignon faisaient partie d'une tournée effectuée par les représentants d'agences onusiennes au Liban, le week-end dernier, dans la Békaa. Le but est de lever des fonds aux déplacés syriens et aux communautés hôtes. L'école que l'Unicef a financée dans le camp a été aussi mise en place, il y a un an, grâce à la coopération avec l'ONG Beyond.


Faisaient notamment partie de la tournée, le nouveau représentant permanent du PNUD et le coordinateur spécial de l'ONU pour les affaires humanitaires au Liban, Ross Mountain, la représentante de l'Unicef Annamaria Laurini, la représentante adjointe de l'UNHCR, Lynne Miller, ainsi que Imadeldin Saleh, délégué du PAM.
Prenant la parole, M. Mountain a mis l'accent sur l'aide que « les Nations unies comptent accorder aux communautés hôtes », louant « la générosité avec laquelle les Libanais ont accueilli les réfugiés syriens et cela malgré leur propre situation précaire ». Depuis plus de deux ans, des réfugiés syriens, originaires de diverses régions, arrivent à Fayda, une petite localité à côté de Zahlé, qui compte aujourd'hui sept campements champignons, situés côte à côte.
Ils ont été pris en charge par les organismes onusiens et les ONG locales. Aujourd'hui, ils reçoivent, entre autres, des coupons leur permettant d'acheter des produits alimentaires et du mazout pour le chauffage. Les tentes ont été équipées de poêles pour que les déplacés puissent supporter le froid de la Békaa. Certaines disposent d'antennes de télévision et sont branchées à un générateur de la localité.


Fekrié vit avec toute sa famille sous une grande tente. « Il y a mon mari et moi, mes enfants et mes petits-enfants. Nous sommes en tout vingt personnes. Je suis originaire d'un village à côté d'Alep. J'avais des brebis et je labourais la terre. Au Liban, nous avons faim », dit-elle, montrant la misérable tente qu'elle habite. Fekrié, comme la plupart des déplacés qui vivent dans ce camp, pense qu'il faudra attendre encore des années pour rentrer en Syrie. « Je veux rentrer au plus tôt, reconstruire ma maison et dormir chez moi », dit-elle.

 

(Repère : Plus de 890 000 réfugiés syriens enregistrés au Liban)

 

Travailler sur le long terme
Tous les jours des cours sont dispensés aux petits déplacés. Ils apprennent l'arabe, l'anglais et les maths. « Ce sont des cours qui permettront aux élèves d'intégrer les écoles voisines. Nous choisissons l'anglais ou le français comme langue étrangère dépendamment des écoles libanaises qui se trouvent à proximité et donc de la deuxième langue qu'elles adoptent », explique Typhaine Gendron, de l'Unicef. « Nous travaillons sur le long terme. Nous enseignons le curriculum libanais et les élèves sont divisés en deux groupes, ils viennent les avant et les après-midi », ajoute-t-elle. Des cours de dessin et d'activités d'éveil sont également prévus les samedis. Mme Laurini souligne, de son côté, que l'Unicef a créé quarante écoles du genre. L'institution qu'elle représente pourvoit également certains campements en eau. « Toutes les institutions onusiennes coopèrent sur le terrain afin d'améliorer les conditions de vie dans les camps », dit-elle. Un dispensaire a été mis en place à côté des salles de classe. Il dessert tout le camp.


Joe Aouad, directeur de Beyond, affirme que « les enseignants sont des Libanais et des réfugiés syriens qui vivent dans le campement et qui exerçaient le métier en Syrie ou disposent de diplômes universitaires. C'est une manière de leur permettre de gagner leur vie ». Beyond planche également sur la protection des mineurs et des femmes en sensibilisant et en aidant les déplacés dans ce cadre. L'ONG travaille sur plusieurs projets relatifs aux réfugiés syriens en coopération avec les Nations unies.


Melhem Harmouch est médecin. Il est chargé du dispensaire. « Les déplacés consultent surtout pour des maux d'estomac, notamment des diarrhées et des maladies de peau, comme la gale », dit-il, notant que « les médicaments sont disponibles ». Il évoque également les traumatismes des enfants qui viennent de Syrie. « Beaucoup ne parlent pas au début. Ils arrivent à peine à articuler. Et puis, ils s'ouvrent et se confient, évoquent leurs peurs, se sentent plus ou moins en sécurité », ajoute-t-il.

 

(Repère : Ninette Kelley : L'aide humanitaire aux réfugiés syriens est estimée en 2014 à 1,8 milliard USD)


Safaa et Chayma suivent ensemble les cours de l'école de l'Unicef. Safaa se présente avec un grand sourire et indique, en anglais, qu'elle a « onze ans ». « À l'école, ils nous enseignent l'anglais. Ça me fait plaisir. Je n'ai jamais appris une langue étrangère en Syrie », explique-t-elle. Chayma a 9 ans et demi, elle est coiffée d'un diadème en carton et papier crépon, sur lequel elle a écrit en arabe « ambassadrice ». « Quand je grandirai, je deviendrai ambassadrice et je parlerai au monde entier de la Syrie », indique-t-elle, résolue. Safaa et Chayma qui vivent toutes les deux dans le campement de Fayda se sont rencontrées à l'école. Elles passent leurs après-midi ensemble, notamment en nettoyant la tente ou en transportant de l'eau.


Awd est diplômé en marketing, il est le père de Chayma et il enseigne actuellement à l'école du camp. « Nous sommes originaires de Bab Amr, nous sommes arrivés il y a deux ans au Liban. Grâce à mon travail à l'école, j'arrive à joindre les deux bouts. Vous ne savez pas à quel point c'est difficile pour quelqu'un qui n'a jamais travaillé de ses mains de se voir obliger de labourer la terre pour encaisser 6 000 livres par jour... Maintenant ça va mieux. Chayma était la première de sa classe en Syrie. Je l'ai envoyée dans une école libanaise privée l'année dernière, puis ils ont voulu encaisser une scolarité. Heureusement que l'école du camp a ouvert ses portes », raconte-t-il. Tous les matins à son réveil, Awd imagine qu'il est chez lui à Bab Amr, même s'il sait que sa maison a été détruite et même s'il a froid sous sa tente de réfugié. « Je me vois au balcon en train de regarder les voitures qui passent et de prendre mon café, et je suis content. C'est ce que je faisais tous les matins avant de me rendre au bureau. C'était avant la guerre. »
Aujourd'hui Awd attend le retour, mais dans son for intérieur il sait qu'il ne reverra pas la Syrie de sitôt.

 

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Hanane montre fièrement son dessin multicolore, une maison gigantesque et un petit arbre. Il faut un peu de temps pour savoir que Hanane, six ans, est une fille. Elle porte un chapeau en laine, a les cheveux très courts et répond par monosyllabes ou en hochant la tête aux questions qu'on lui pose.Hanane fait partie des 425 petits réfugiés syriens, âgés entre 4 et 14 ans, qui fréquentent...
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