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Le monde en 2013 - croissance

Les émergents rattrapés par la crise financière

La réduction des achats de la Fed change la donne ; les pays les plus dépendants des financements extérieurs ont été particulièrement affectés et demeurent exposés.

Un possible ralentissement des injections de liquidités par la Banque centrale américaine a déclenché un mouvement massif de retrait de capitaux ainsi qu’une remontée du dollar et des taux obligataires, déstabilisant certains des principaux marchés émergents. Samsul Said/Reuters

Les pays émergents ont été rattrapés en 2013 par la crise financière, qui les avait largement épargnés, mettant à mal l’idée de leur découplage vis-à-vis des économies développées et soulignant les défis de leur transition vers des modèles de croissance moins dépendants des exportations.

L’évocation le 22 mai par le président de la Réserve fédérale (Fed) Ben Bernanke d’un possible ralentissement des injections de liquidités par la Banque centrale américaine a déclenché un mouvement massif de retrait de capitaux ainsi qu’une remontée du dollar et des taux obligataires, déstabilisant certains des principaux marchés émergents.

Entre le début de l’année et la mi-décembre, la performance exprimée en euros des marchés actions émergents est ainsi ressortie à -7,7 %, le recul atteignant 10,4 % pour l’Inde et plus de 30 % pour le Brésil, selon des données compilées par Edmond de Rothschild Asset Management. La dette émergente n’a pas été épargnée avec une performance en monnaie locale de -6,6 %.

Des évolutions qui contrastent avec les progressions à deux chiffres des indices boursiers des pays développés.

Au plus fort de la correction, fin août, les roupies indienne et indonésienne accusaient respectivement une chute de plus de 25 % et de plus de 20 % contre le dollar par rapport à leurs niveaux du début de l’année. Si la roupie indienne s’est stabilisée depuis, la dépréciation de la devise indonésienne s’est accentuée avec une chute supplémentaire de plus de 4 %.

 

Signe avant-coureur
Avec la mise en œuvre de la réduction des achats d’actifs de la Fed qui débutera en janvier et se poursuivra tout au long de l’année 2014, les devises et les actifs financiers des pays émergents risquent de continuer à souffrir.

Les pays les plus dépendants des financements extérieurs comme l’Indonésie, l’Inde, la Turquie, l’Afrique du Sud et le Brésil ont été particulièrement affectés et demeurent exposés.

Sur les quelque 360 milliards de dollars de flux cumulés qui s’étaient investis depuis 2009 dans les actifs financiers des pays émergents, seulement 20 % ont été cédés en 2013, rappellent d’ailleurs les analystes de la Société générale.

Les liquidités déversées en abondance par les pays développés après la faillite de Lehman Brothers pour contrer leur crise de surendettement avaient naturellement atterri dans les économies émergentes.

Elles offraient des rendements élevés correspondant à leurs solides perspectives de croissance et présentaient aussi l’avantage de disposer, pour la plupart d’entre elles, de finances publiques saines.

De 2008 à 2013, les pays émergents ont expliqué 88 % de la croissance mondiale, autant dire l’essentiel, selon les économistes de BNP Paribas. Leur dette publique reste inférieure à 40 % du produit intérieur brut (PIB), tous pays confondus, quand elle dépasse 100 % du PIB pour les pays développés, selon les calculs de Capital Economics.

Cet afflux de liquidités a fait fortement chuter les taux dans ces pays qui sont passés entre 2008 et 2013 de 13,7 % à 9,4 % au Brésil, de 13 % à 8,8 % en Inde, et de 20 % à 7,2 % en Turquie, contribuant à soutenir la croissance et à entretenir l’écart avec les économies développées.

Mais il a aussi nourri une progression excessive du crédit, la hausse de l’inflation et un creusement des déficits des balances courantes d’autant plus marqué que les exportations vers les économies développées atones marquaient le pas.

Dans certains pays, la progression du crédit a été plus rapide que celle du PIB nominal, le ratio crédit/PIB passant au-dessus de 3 %, signe avant-coureur d’une crise financière pour le Fonds monétaire international (FMI), notamment au Brésil, en Turquie et en Indonésie.

 

Calendrier électoral chargé
Au-delà des ajustements de court terme, le schéma d’une croissance basée sur une main-d’œuvre bon marché et une forte demande à l’exportation émanant des pays développés qui était celui des émergents a été malmené poussant certains d’entre eux, Chine en tête, à opter pour une croissance plus autocentrée mais moins rapide.

Ce changement de cap de la Chine, premier importateur mondial de matières premières, a accentué les difficultés des pays principalement exportateurs de produits de base, notamment en Amérique latine.

La décision de la Fed de temporiser dans la réduction de ses achats d’actifs a certes donné un peu de temps aux économies émergentes pour introduire les réformes structurelles nécessaires à cette transition et à l’amélioration de leur compétitivité gage de la réduction de leurs déficits courants.

Mais ces réformes, impopulaires, ne peuvent pas être mises en œuvre du jour au lendemain, surtout en période d’élections, comme c’est le cas dans la plupart des pays vulnérables.

Leur calendrier électoral est en effet chargé en 2014 avec de grands rendez-vous nationaux prévus en avril en Afrique du Sud et en Indonésie, au plus tard en mai en Inde, en Turquie en juin, en Indonésie à la mi-juillet et au Brésil en octobre.

La perspective d’une accélération de la reprise aux États-Unis et l’engagement de Pékin à ne pas laisser la croissance chinoise tomber en dessous d’un rythme de 7 % l’an devraient toutefois faire office d’amortisseurs cette année après une année 2013 en berne.

Les pays émergents ont été rattrapés en 2013 par la crise financière, qui les avait largement épargnés, mettant à mal l’idée de leur découplage vis-à-vis des économies développées et soulignant les défis de leur transition vers des modèles de croissance moins dépendants des exportations.
L’évocation le 22 mai par le président de la Réserve fédérale (Fed) Ben Bernanke...

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