L'armée syrienne a pris jeudi un avantage décisif en s'emparant d'un secteur clé dans la région stratégique de Qalamoun.
Après avoir pris le 19 novembre Qara, les forces du régime se sont emparées de la localité de Deir Attiya où vit une importante communauté chrétienne. "Notre armée héroïque a pris le contrôle de Deir Attiya, dans la province de Damas, après avoir écrasé les dernières poches terroristes", a rapporté la télévision d'Etat.
L'armée "a réussi à nettoyer la ville des terroristes et à tuer un grand nombre d'entre eux après quatre jours de combats", a confirmé à l'AFP un haut responsable de la sécurité à Damas.
La région montagneuse de Qalamoun située dans la province de Damas, voisine de celle de Homs plus au nord, est formée de plusieurs villages et localités. L'armée cherche à prendre Qalamoun pour assurer une continuité territoriale sous son contrôle entre les provinces de Damas et Homs.
Proche de la frontière libanaise, Qalamoun, où se trouvent des dépôts d'armes, constitue la base-arrière des insurgés pour encercler la capitale Damas et commander l'accès à l'autoroute Damas-Homs.
Selon le haut responsable de la sécurité, l'autoroute Homs-Damas n'a pas été encore rouverte en raison de la présence de tireurs embusqués. "Ce sera chose faite dans quelques jours".
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a indiqué que l'armée avait pris la quasi-totalité de la ville en chassant les jihadistes de l'Etat islamique d'Irak et du Levant (EIIL) et d'autres rebelles qui s'y trouvaient.
Selon une source de sécurité, l'armée est en outre entrée à Nabak, une autre localité de Qalamoun située à 70 km au nord de Damas. "Si cette ville est prise, il ne restera plus que Yabroud et quelques villages pour verrouiller complètement la frontière avec le Liban et empêcher toute fuite ou entrée de rebelles vers ce pays".
Étouffer les rebelles
Par cette stratégie, l'armée vise à étouffer complètement les rebelles présents autour de Damas, notamment dans la région arboricole de la Ghouta orientale, en les privant d'armes et de munitions venant de la Jordanie ou du Liban.
"La prochaine étape sera la reprise du sud (du pays). Le nord est l'est c'est pour plus tard", a affirmé la même source. Les régions septentrionale et orientale sont aux mains de la rébellion ou de combattants kurdes.
Ces derniers jours, les rebelles ont tenté en vain de briser le verrou autour de Damas et des affrontements avaient lieu dans le secteur de Marj al-Sultan (est) après une offensive rebelle, selon l'OSDH qui fait état de la participation du Hezbollah à ces combats.
Combattants du Hezbollah tués
D'ailleurs, un combattant du Hezbollah et neveu du ministre libanais de l'Agriculture Hussein Hajj Hassan a été tué mercredi à Qalamoun, selon une source proche du groupe.
"Ali Reda Fouad Hajj Hassan, 22 ans, a été tué avec trois autres combattants du Hezbollah à Qalamoun", au nord de Damas mercredi, a-t-elle dit à l'AFP. "Il était le neveu de Hussein Hajj Hassan", ministre de l'Agriculture libanais et un dirigeant du Hezbollah. Les dépouilles des quatre hommes n'ont pas été rapatriées, a-t-elle ajouté.
Le Hezbollah, un allié indéfectible du président syrien Bachar el-Assad, a envoyé des centaines de combattants en Syrie voisine pour prêter main forte au régime. Le soutien du Hezbollah, seul parti libanais disposant d'un puissant arsenal et expert dans la guérilla urbaine, a été déterminant pour aider l'armée à reprendre d'autres bastions de la rébellion comme Qousseir en juin.
Le Hezbollah affirme que sa lutte aux côtés du régime syrien vise à combattre des "extrémistes" sunnites, les takfiristes, qui menacent selon lui les chiites et les chrétiens.
(Pour mémoire : Nasrallah : "Tant que les raisons de notre présence en Syrie existeront, nous y resterons")
Les combats continuent de faire rage sur d'autres fronts. Au nord, au moins six personnes ont été tuées et 30 blessées dont deux femmes dans la chute d'un missile sol-sol sur Raqa, lancé dans la nuit de la province de Damas, a poursuivi l'OSDH. Raqa est l'unique capitale provinciale tombée aux mains des insurgés depuis le début en mars 2011 du conflit qui a fait plus de 120.000 morts et forcé plusieurs millions de Syriens à fuir leurs foyers. Actuellement, Raqa est contrôlée principalement par les jihadistes de l'EIIL, mais des militants accusent régulièrement l'armée d'y viser les seuls secteurs civils plutôt que ceux où sont positionnés les jihadistes.
Les combats continuent donc malgré un appel de l'Iran et la Turquie à un cessez-le-feu avant la tenue d'une conférence de paix annoncée pour le 22 janvier par l'ONU qui cherche à mettre fin à la guerre qui a fait plus de 120.000 morts et poussé des millions de syriens à fuir leurs foyers.
Le pouvoir syrien a annoncé sa participation à Genève-2 en soulignant que sa délégation y allait non pas "pour remettre le pouvoir mais pour dialoguer avec ceux qui soutiennent une solution politique".
Mardi, l'opposition a accepté d'aller à Genève mais insisté sur son "refus total de la participation d'Assad" dans un gouvernement transitoire.
Idriss dénonce les exactions des jihadistes
Les abus commis par les jihadistes en Syrie "nous sont étrangers", a, par ailleurs, affirmé mercredi le chef militaire de la rébellion syrienne dans une interview télévisée. "Ceux qui sont entrés en rébellion (contre le régime de Bachar el-Assad) sont connus et ce sont des musulmans, tout comme nous sommes musulmans", a déclaré Sélim Idriss, chef du Conseil militaire syrien, à la chaîne Al-Aan, basée à Dubaï.
Mais, "il y a ceux qui viennent de l'étranger (...) pour nous apprendre ce qu'est l'islam et qui veulent nous imposer leurs coutumes (...) étiquetant les gens comme musulmans, athées, hérétiques ou digne de décapitation", a-t-il ajouté, assurant que de tels abus "nous sont étrangers et sont étrangers à la modération (...) de l'islam auquel nous voulons nous tenir".
Les déclarations de M. Idriss interviennent alors que des abus, tels que des exécutions brutales ou des enlèvements, sont rapportés presque tous les jours dans les régions où sont présents des jihadistes de l'EIIL. L'EIIL a combattu aux côtés de groupes rebelles dans certaines régions, mais a également pris pour cible des combattants de l'opposition dans une tentative d'éliminer la concurrence au sein de la rébellion et de s'imposer comme unique autorité.
Dans son interview, M. Idriss a également reproché à certains combattants de l'EIIL d'agir en faveur du régime et accusé les groupes enlevant des journalistes étrangers de "travailler contre les intérêts de la révolution".
La dernière exécution en date perpétrée par l'EIIL a eu lieu dans le nord, dans la cité d'Atareb. Le mouvement jihadiste y a exécuté l'ex-commandant du groupe rebelle Ghouraba al-Cham, Hassan Jazra, et six autres membres de cette faction après les avoir accusés de vol et de pillage, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui fait souvent état de telles exactions.
Les rebelles n'ont reçu "ni aide financière, ni arsenal suffisant, ni des véhicules ou des équipements de communication" qui auraient pu leur permettre de s'unir, a également regretté le général Idriss, ajoutant que c'est la fragilisation de l'opposition traditionnelle qui a ouvert la voie à l'implantation des jihadistes.
Dans des extraits de l'interview, dont la version complète sera diffusée jeudi, M. Idriss, respecté à titre personnel par les groupes rebelles, mais à la tête d'un Conseil militaire qui a peu d'influence sur le terrain, a également annoncé que ce Conseil coordonnerait ses actions avec le "Front islamique" créé la semaine dernière et dont la charte, publiée mardi, annonce son intention d'établir un "Etat islamique". "Je félicite nos frères de ce Front", a déclaré M. Idriss, ajoutant qu'un "grand nombre d'entre eux sont avec nous au sein du Conseil militaire syrien".
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commentaires (6)
Qu'elle verrouille bien, mais une fois que les mercenaires et tueurs professionnels (y compris le barbu enterré puisqu'il a eu la grande gueule de se porter volontaire pour aller combattre en personne) se soient tous rendus en Syrie. Ainsi ils ne reviendront plus souiller notre pays.
Robert Malek
11 h 32, le 29 novembre 2013