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Liban - Présidence

Sleiman accuse le Hezbollah, sans le nommer, de menacer l'unité du Liban

À l’occasion du 70e anniversaire de l’indépendance, le président Michel Sleiman a adressé hier soir un important message à la nation, soulignant que l’on ne peut parler d’indépendance si les forces régulières ne sont pas exclusivement maîtres du potentiel militaire présent dans le pays. « La crise nationale nous pousse à nous interroger sur la nature du système et son aptitude à réaliser l’intérêt public », a souligné le chef de l’État.

Le président Michel Sleiman prononçant son discours à l'occasion de la fête de l'Indépendance du Liban. Photo Dalati et Nohra

Pour son dernier discours de la fête de l’Indépendance avant la fin de son mandat, en mai prochain, le président Michel Sleiman a tenu des propos particulièrement fermes, réaffirmant les constantes nationales qui dictent sa ligne de conduite dans le contexte présent, tout en dressant de manière succincte un bilan de son action et des principales réalisations enregistrées au niveau du pouvoir exécutif sous sa houlette. Fait significatif dont la haute portée politique ne saurait échapper à un observateur averti, le chef de l’État a adressé de sévères critiques, à peine voilées, au Hezbollah – sans le nommer – en soulignant qu’il ne saurait être question d’indépendance si les forces régulières ne sont pas exclusivement maîtres des armes et des capacités défensives du pays, de même que l’on ne peut parler d’indépendance « si une faction libanaise sort du consensus national en prenant la décision de dépasser les frontières pour s’impliquer dans un conflit armé sur le territoire d’un pays frère, mettant ainsi en danger l’unité nationale et la paix civile » (allusion claire à l’implication du Hezbollah dans la guerre syrienne).


Le président Sleiman a également réaffirmé son attachement à la déclaration de Baabda en apportant cette fois-ci un nouvel éclairage sur ce plan, soulignant ainsi que ce document « met l’accent sur l’importance d’une attitude neutre de la part du Liban, une attitude neutre positive qui ne se limite pas à la politique de distanciation (par rapport à la crise syrienne), sans pour autant atteindre le stade de la neutralité ».
Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits du discours du chef de l’État qui a été prononcé, note-t-on, en présence de nombreux présidents et membres de conseils municipaux, et de plusieurs moukhtars et hauts fonctionnaires présents au palais de Baabda pour l’occasion.


Le président Sleiman a entamé son message à la nation en établissant, pour la première fois, un parallèle et une similitude entre le rôle du peuple libanais dans la réalisation de l’indépendance en 1943, la libération du Sud en 2000 et l’affranchissement de la tutelle syrienne en 2005. « Le 70e anniversaire de l’indépendance, a déclaré sur ce plan le président Sleiman, est une occasion de s’adresser au peuple, source de tous les pouvoirs, ce peuple qui par son soulèvement a réalisé l’indépendance en 1943, par sa résistance a libéré le pays en 2000 et par sa révolution blanche en 2005 s’est affranchi de la tutelle et du suivisme. » « Il reste que la crise nationale présente, qui paralyse les institutions et porte préjudice aux intérêts de la population, soulève des interrogations inquiétantes au sujet de la réalité et de la signification de l’indépendance, a relevé le chef de l’État. La crise nationale nous pousse à nous interroger sur la réalité des pratiques démocratiques au Liban et sur notre capacité à gérer nous-mêmes nos propres affaires, de même que cette crise nous amène à nous interroger sur la nature du système et son aptitude à réaliser l’intérêt public. »


« La réalité amère est qu’il est difficile de parler d’indépendance si nous ne parvenons pas à organiser des élections législatives, à former un nouveau gouvernement, à nous asseoir à la table de dialogue sans renier nos engagements passés, ou si nous ne parvenons pas, l’an prochain, à organiser l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels, a déclaré le président Sleiman (...). L’indépendance ne saurait être complète si nous continuons à consolider le confessionnalisme dans les esprits au lieu de renforcer l’idée de citoyenneté et la logique de l’allégeance absolue à la patrie, et elle ne saurait être totale si nous ne parvenons pas à nous tenir à l’écart des retombées négatives des crises régionales parce que nous rendons les intérêts supérieurs du Liban tributaires de la volonté régionale ou soumis au diktat et aux intérêts étrangers. »


Et le chef de l’État de poursuivre, dans une allusion au comportement politique du Hezbollah : « L’État de l’indépendance ne saurait être mis sur pied si des factions libanaises décident de marquer leur indépendance à l’égard de la logique de l’État ou si elles décident d’outrepasser le consensus national en prenant la décision de franchir les frontières pour s’impliquer dans un conflit armé sur le territoire d’un pays frère, mettant ainsi en danger l’unité nationale et la paix civile. L’indépendance ne saurait être en outre consolidée si le peuple ne se libère pas de la pauvreté, du sous-développement, de l’ignorance et de la corruption, si le développement équilibré des régions ne se réalise pas sur les plans culturel, social et économique, et si la justice ne se libère pas de l’intimidation et du terrorisme. Il ne saurait être question d’indépendance si l’État ne parvient pas à établir sa seule autorité sur l’ensemble du territoire national, s’il ne parvient pas à combattre le takfirisme et le terrorisme, et si les forces régulières ne sont pas, exclusivement, maîtres des armes et des capacités de défense sous la supervision du pouvoir politique. »

 

(Vidéo : Liban : le cheminement vers l’indépendance en images)

 

La neutralité du Liban
Le président Sleiman a par ailleurs relevé que « pour la première fois depuis l’indépendance, l’État a réussi à établir des relations diplomatiques avec la Syrie ». « L’État, a-t-il poursuivi, a œuvré à consolider le principe du dialogue en créant le comité national de dialogue et en supervisant le consensus autour de la déclaration de Baabda. Celle-ci a mis l’accent sur l’importance d’une attitude neutre de la part du Liban, une attitude neutre positive qui ne se limite pas à la politique de distanciation, sans pour autant atteindre le stade de la neutralité. J’ai soumis à ce comité de dialogue une stratégie de défense nationale dont l’épine dorsale est l’armée libanaise, convaincu du fait que le problème des armes (du Hezbollah) restera un obstacle à l’entente nationale si la fonction de cet arsenal et son lien avec la légalité et le gouvernement ne sont pas tirés au clair. Il est entendu que nous sommes soucieux de préserver toutes nos potentialités nationales pour faire face à l’ennemi israélien et à ses réseaux d’espionnage dans le but de défendre notre souveraineté et nos richesses naturelles, tout en poursuivant les efforts pour une application de toutes les dispositions de la résolution 1701, en collaboration avec la Finul. »


Le chef de l’État a appelé ensuite à l’adoption d’une nouvelle loi électorale et à l’approbation du projet de décentralisation administrative afin d’assurer le développement équilibré des régions. Il a invité sur ce plan les présidents et membres des conseils municipaux ainsi que les moukhtars et hauts fonctionnaires présents à exprimer leurs points de vue au sujet du projet de décentralisation administrative, indiquant que le texte de ce projet pourra être consulté sur un site électronique qui sera créé spécialement à cette fin.


En conclusion, le président Sleiman a invité expressément tous les leaders et factions du pays à « retourner à l’État, à la logique de l’État et aux institutions, et à contribuer à sauvegarder l’indépendance du Liban dans les faits et concrètement, tout en se conformant aux lois, aux dispositions de la Constitution et à l’esprit du pacte national ».

 

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commentaires (6)

OUTREPASSER SEUL EST UNE CHOSE... MAIS ENTRAÎNER TOUS LES AUTRES MALGRÉ EUX N'EST PAS PERMIS !

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 14, le 23 novembre 2013

Tous les commentaires

Commentaires (6)

  • OUTREPASSER SEUL EST UNE CHOSE... MAIS ENTRAÎNER TOUS LES AUTRES MALGRÉ EUX N'EST PAS PERMIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 14, le 23 novembre 2013

  • CELA RAPPELLE LES JANISSAIRES DE SOMBRE MÉMOIRE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 24, le 23 novembre 2013

  • Oui Monsieur le Président.

    Robert Malek

    11 h 50, le 22 novembre 2013

  • Pourquoi porte t-il toujours un cravate grise?

    Nicolas Rubeiz

    09 h 59, le 22 novembre 2013

  • Vœux "pieux".... ça n'aboutira à Rien !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 35, le 22 novembre 2013

  • Plus clair avertissement du président, à l'adresse du Hezbollah, sur la gravité de ce qu'il fait, c'est impossible. Il dit au Hezb que par sa décision de participer à la guerre en Syrie, il viole "le consensus national", le Pacte national même, la Constitution et toutes les lois libanaises; qu'il prend ainsi délibérément la posture d'un hors-la-loi; qu'il divorce réellement avec le Liban, la nation et le peuple libanais; et qu'il entraîne les plus graves et jamais imaginées conséquences pour "son" pays, comme la présence des criminels takfiristes et leurs "exploits" criminels, comme on vient de le voir à Jnah. D'ailleurs il est absolument incompréhensible comment les hauts responsables du Hezbollah peuvent être démagogues et aveugles au point de pas ne se rendre compte, à ce jour, du fait qu'ils ont réussi, par leurs dérives inouies, à gagner définitivement pour leur formation l'incommensurable antipathie (pour ne pas employer un autre terme) de plus des 3/4 des Libanais.

    Halim Abou Chacra

    06 h 13, le 22 novembre 2013

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