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Liban - Trafic routier

Dix mois plus tard, la route controversée de Qanater Zbaydeh rouverte aux voitures

Fermé pendant dix mois à la circulation en raison de doutes sur sa solidité, le pont de Qanater Zbaydeh sera rouvert ce soir aux voitures, lors d’une cérémonie officielle... après avoir fait l’objet d’une rapide expertise technique de dernière minute.

Le site romain de Qanater Zbaydeh, un patrimoine à préserver. Photo Anne-Marie el-Hage

 

Devant le pont de Qanater Zbaydeh, deux ouvriers balaient les résidus de sable rouge, avant la réouverture du pont aux voitures, prévue ce soir, après presque dix mois de fermeture. Bordant l’accès au pont, un muret revêtu de pierres de taille, nouvellement construit, porte déjà les traces du passage de deux amoureux, Élie et Mélissa. Fraîchement asphaltée, élargie par endroits, bordée de murs de soutènement pour parer à d’éventuels éboulements, la route encore déserte se prépare à recevoir les automobilistes. Des blocs de béton bouchent toujours l’accès à cette étroite voie qui relie les collines de Hazmieh et Mansourieh, conçue dans les années cinquante sous forme de barrage surplombant la rivière Daychouniyeh. Ils seront enlevés incessamment. Les camions, eux, n’y auront pas accès.



Une longue réhabilitation
Dix longs mois que ce pont à une seule voie est fermé à la circulation. Et pourtant, au fil des années, et vu les embouteillages monstres dans la région de Mkallès, cette route secondaire, mal aménagée, s’est imposée comme un raccourci incontournable pour les automobilistes. Et pour cause, c’était la seule voie de passage dans la vallée reliant les deux cazas voisins du Metn et de Baabda. L’ouverture du centre médical Bellevue, il y a quelques années, a poussé les autorités à la réhabiliter, jusqu’au centre hospitalier, uniquement. Depuis dix longs mois donc, pour relier les deux collines voisines, les automobilistes ont l’obligation d’emprunter Mkallès et ses dédales, paralysés par de longs travaux d’infrastructure.


C’est en janvier 2013, après l’effondrement d’une route donnant sur la vallée, côté Hazmieh, provoqué par des pluies torrentielles, que le président de la municipalité de Hazmieh, Jean Asmar, a pris la décision de fermer la route. D’autant que cet effondrement avait causé la mort d’un automobiliste. « D’une part, il devenait urgent de réhabiliter une route qui était devenue dangereuse, expliquait-il à L’Orient-Le Jour, le mois dernier. D’autre part, ce passage est un barrage et non pas un pont routier. Il n’a pas pour vocation de supporter un tel trafic routier. Nous avons des doutes sur sa solidité. Nous craignons qu’il ait subi des dommages, vu que des camions l’empruntent régulièrement. Sans parler de l’érosion provoquée par le cours d’eau. »


La municipalité a donc envoyé deux requêtes. La première était adressée au ministère de l’Intérieur et des Municipalités, l’invitant à réhabiliter la route et à construire des murs de soutènements. La seconde, invitait le ministère de l’Énergie et de l’Eau à effectuer une expertise pour vérifier l’infrastructure du barrage. Transférées au ministère des Travaux publics, car il s’agit de circulation routière, les deux demandes ont attendu de nombreux mois dans les tiroirs. Mais aucune décision n’a jamais été prise.



Un expert dépêché la veille de la réouverture du pont
La municipalité s’est alors chargée de réhabiliter la route, conformément à ses prérogatives, car il s’agit d’une route intérieure et non pas d’une artère principale. « Nous l’avons élargie et asphaltée. Nous avons également construit des murs de soutènement pour parer aux éboulements, a indiqué M. Asmar. Cela nous a coûté 2 milliards de LL. » Les travaux viennent tout juste de se terminer. Quant au pont, ce n’est qu’à la veille de sa réouverture et sur sollicitation de L’Orient-Le Jour que le directeur de la maintenance au sein du ministère, Adib Dahrouge, a dépêché un expert sur les lieux, comme il l’affirme. « Le pont est apte à la circulation des voitures uniquement », a-t-il assuré. Point de camions donc, conformément à la demande du président de la municipalité de Hazmieh.


On est en droit de se poser des questions sur le sérieux de cette expertise. A-t-elle seulement eu lieu ? Si oui, l’expert s’est-il donné la peine de descendre dans la vallée pour analyser l’état des fondations du barrage ?
Ou alors cette affaire n’était que de la poudre aux yeux, et la fermeture du pont une diversion destinée à empêcher la circulation dans un quartier où les immeubles poussent comme des champignons. C’est ce que confirme une source informée, qui a préféré garder l’anonymat. « L’état du pont n’a jamais été remis en question. Une personnalité locale influente est propriétaire de plusieurs immeubles en construction. Elle a fermé la route et l’accès au pont, car elle voulait poursuivre les travaux sans être dérangée », affirme-t-elle. « D’ailleurs, rien ne l’en empêche. Cette route n’est pas reconnue officiellement en tant que telle. » Comme pour confirmer ses propos, nombre d’immeubles en construction arborent désormais des murs de clôture ou de soutènement flambant neufs.


L’affaire, pour le moins louche, a en revanche mis le doigt sur l’absence criante d’accès entre les deux collines voisines de Mansourieh et Hazmieh. « Le tracé d’une route n’est pas envisageable à l’heure actuelle », observe M. Dahrouge. Non seulement il serait préjudiciable au site romain de Qanater Zbaydeh qu’il est impératif de préserver, mais il faudrait procéder à des expropriations, qui ne seraient pas du goût des riverains. Affaire à suivre ou dossier clos ?

 

 

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