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À La Une - conflit

Syrie : Washington évoque le devoir d’agir et parle d’une action « limitée »

La France devient l’alliée principale des Américains.

Barack Obama a affirmé, vendredi, qu’il n’avait pas pris de « décision finale », mais que le monde ne pouvait pas accepter que des femmes et des enfants soient gazés. Jason Reed/Reuters

Les États-Unis ont mis en avant hier le devoir d’agir en Syrie devant l’accumulation des preuves sur la responsabilité du régime dans l’attaque aux armes chimiques du 21 août. Le président américain Barack Obama a ainsi souligné qu’il réfléchissait à une action militaire « limitée » contre le régime de Bachar el-Assad en réponse à cette attaque qui a fait, selon le renseignement américain, au moins 1 429 morts dont 426 enfants, près de Damas. Assurant qu’un recours à de telles armes menaçait la sécurité nationale américaine, M. Obama a affirmé qu’il n’avait pas pris de « décision finale », mais que le monde ne pouvait pas accepter que des femmes et des enfants soient gazés.
Dans une déclaration solennelle, le chef de la diplomatie américaine John Kerry a de son côté justifié la position américaine en présentant les conclusions des agences de renseignements américaines sur l’attaque.
Le secrétaire d’État américain a évoqué une action ciblée sans troupes au sol contre la Syrie et qui ne serait pas « infinie » dans le temps. La question d’une action militaire « va au-delà » de la Syrie, mais doit servir d’avertissement à l’Iran, au Hezbollah ou à la Corée du Nord, que les États-Unis ne resteront pas inertes si un jour ils « songeaient à recourir à des armes de destruction massive », a ajouté M. Kerry.

 

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Après le coup de théâtre jeudi à Londres, où le Parlement a rejeté une intervention militaire, et face à l’impasse à l’ONU, Washington a dit pouvoir compter sur des alliés comme la France, la Ligue arabe et l’Australie.
En effet, les Américains cherchent toujours « une coalition » en vue d’éventuelles frappes contre le régime syrien, face à la léthargie de la communauté internationale. « Les États-Unis continueront à consulter le gouvernement britannique » mais « les décisions du président Obama seront guidées par ce qui est dans l’intérêt des États-Unis », a déclaré la porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, Caitlin Hayden. M. Obama, qui ne veut pas répéter le scénario irakien de George Bush, « pense que des intérêts cruciaux des États-Unis sont en jeu, et que les pays qui violent les règles internationales sur les armes chimiques doivent rendre des comptes », a-t-elle poursuivi.
C’est dans ce cadre d’intervention probable que les États-Unis n’ont cessé de renforcer leurs capacités déployées face aux côtes syriennes. Ils disposent désormais de cinq destroyers équipés de missiles de croisière capables de mener des attaques ciblées contre des dépôts de munitions ou des infrastructures stratégiques du régime Assad.

 

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Europe (dés)unie
Ce recrutement pour une intervention unie contre la Syrie laisse toutefois à désirer du côté européen. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a exclu une participation de son pays à une intervention militaire en Syrie. Cité par l’agence Belga, le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a déclaré la position britannique « conforme à celle du gouvernement belge qui demande des preuves avant toute intervention en Syrie ». Ce que Pékin soutient de vive voix. La Pologne, qui elle non plus ne prévoit pas d’intervention, a pointé un doigt accusateur vers la Russie. À Varsovie, son chef de diplomatie, Radoslaw Sikorski, a laissé entendre qu’elle serait coresponsable de l’arsenal chimique syrien qui date de l’époque soviétique et qu’elle pourrait jouer de son influence auprès du président Assad. Au cours d’une réunion européenne, le ministre des Affaires étrangères de la Lituanie, le pays qui préside actuellement l’UE, a reconnu qu’il n’y avait « pas de position commune » entre pays européens sur la question syrienne.


En effet, la France est montée hier en première ligne aux côtés des États-Unis pour mener une éventuelle offensive en Syrie contre le régime de Bachar el-Assad. À Paris, on estime que le refus de Londres d’intervenir ne change pas la position de la France qui souhaite une action « proportionnée et ferme » contre le régime de Damas, selon François Hollande. La président français n’a pas exclu des frappes aériennes avant mercredi, date de la session extraordinaire du Parlement français sur la Syrie.

 

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Par ailleurs, M. Hollande s’est entretenu au téléphone avec son homologue américain. Les deux hommes « partagent la même certitude sur la nature chimique de l’attaque » et la « responsabilité indubitable du régime », selon l’entourage du chef de l’État français.



Position russe
Pour sa part, la Russie a salué hier le rejet par le Parlement britannique d’une intervention militaire, le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov, estimant que « de telles actions, outrepassant le Conseil de sécurité de l’ONU, si elles ont lieu bien sûr, porteraient gravement atteinte au système basé sur le rôle central de l’ONU et un sérieux coup (...) à l’ordre mondial ». « Il me semble que les gens commencent à comprendre à quel point de tels scénarios sont dangereux », a conclu M. Ouchakov, dont le pays a décidé d’envoyer deux nouveaux bateaux de guerre en Méditerranée. L’alliée de la Syrie a répété hier son opposition à une action militaire : « La Russie est contre toute résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, prévoyant la possibilité d’user de la force », a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Guennadi Gatilov, cité par l’agence officielle ITAR-Tass. Fort de ce soutien, le président syrien Bachar el-Assad s’était engagé jeudi à « défendre » son pays « contre toute agression » des Occidentaux, assurant que son pays était « déterminé à éradiquer le terrorisme soutenu par Israël et les pays occidentaux », assimilant une nouvelle fois la rébellion à du « terrorisme ».

 


Panique
Sur le terrain, des batteries mobiles de missiles Scud ont quitté jeudi matin une base importante de l’armée syrienne sur les contreforts du mont Kalamoune dans les environs de Damas, de crainte probablement d’un bombardement occidental. L’opposition pense aussi qu’une autre base de missiles a été évacuée à Sahya, au sud de Damas. Dans la capitale, les forces armées syriennes ont été repositionnées hors de leurs postes de commandement, et les habitants se préparaient au pire, certains pliant bagage, d’autres subissant des contrôles renforcés à des barrages routiers. 

 

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Parallèlement, des combats faisaient rage hier dans la localité de Mouadamiyat al-Cham au sud-ouest de Damas, quatre jours après la visite des inspecteurs de l’ONU qui enquêtaient sur l’usage présumé d’armes chimiques contre cette ville, a annoncé l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Selon l’Observatoire, des bombardements ont également eu lieu sur la Ghouta orientale, banlieue agricole à l’est de Damas, et des combats se sont déroulés à Beit Sakhem, sur la route de l’aéroport international de Damas.
Enfin, les agences humanitaires de l’ONU ont indiqué que leur personnel continuait de travailler en Syrie, en dépit des menaces d’intervention militaire.

 

 

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Commentaire

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