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Nos Lecteurs ont la Parole

I. Les dangers et les opportunités au Levant en 2013-2014

Par Roy BADARO
L’année 2013 porte en elle des défis immenses et existentiels pour l’avenir du Levant et plus spécifiquement la Syrie, le Liban, la Jordanie et l’Irak.
Le cordon ombilical qui relie le Liban et la Syrie depuis le début de l’histoire, bien qu’il se soit étiolé, tient toujours grâce à la proximité géographique, aux liens familiaux, aux religions partagées et aux différentes ethnies et confessions disséminées entre les deux pays.
La Syrie telle que nous l’avons connue durant les 40 dernières années, sous le régime des Assad, vit ses derniers moments et risque fort de ne plus pouvoir conserver ni ses frontières actuelles ni le même type de gouvernance.
La désintégration de la Syrie est en cours et risquerait d’être irréversible. Que Assad quitte le pouvoir ou qu’il y reste, il ne pourra plus étendre son autorité sur de larges pans de la Syrie. Dans la meilleure des hypothèses, il garderait le pouvoir au sein de la communauté alaouite; dans la pire, il la perdrait au profit d’un autre clan, ou d’un nouveau pouvoir sunnite.
Face à ces scenarii, il devrait lâcher le nord-est de la Syrie et surtout Alep qui tomberait sous l’influence néo-ottomane ou purement salafiste, alors que Damas abriterait une multitude de factions sunnites qui s’entre-tueraient pour un hypothétique pouvoir. Une somalisation de la Syrie est probablement en cours. Dans cette longue lutte, un des scenarii verrait l’émergence de deux grandes factions: d’une part, l’organisation des Frères musulmans qui pourraient s’allier aux laïcs et modernistes et, d’autre part, la mouvance salafiste-Qaëda qui s’allierait aux jihadistes irakiens afin d’occuper un nouvel espace à l’ouest de l’Irak, dans la province des Anabar et de Salaheddine qui devra contrebalancer l’influence iranienne à Bagdad. Conflit irako-iranien des années 80 revu et actualisé!
Il existe, bien entendu, d’autres scenarii qui, par manque d’espace, ne pourraient être examinés dans le cadre ce cet article.
Dès que ce conflit approchera sa phase de maturation, attendue entre la mi-2013 et le début de 2014, il pourrait poser de grands défis à la formule libanaise, déjà ébréchée par des années de luttes externes, relayées par des politiciens véreux, sur un sol fertile et ayant pour cause l’ignorance, la naïveté ou la compromission d’une population insouciante.
Devant cette vision alarmiste, la seule solution qui nous reste est de revoir notre système de gouvernance en fonction de la nouvelle donne. Il faudrait beaucoup de sagesse et d’abnégation pour s’asseoir autour d’une même table et discuter des défis, tels qu’ils sont avec tous les dangers qu’ils représentent.
Deux choix s’offrent aux chiites du Liban: soit ils garderaient un lien géographique et politique avec la région autonome alaouite qui se formerait entre Tartous et Lattaquié en se prolongeant jusqu’au Hermel à travers la vallée de l’Oronte; soit, au cas où une solution globale du conflit n’est pas trouvée, ils devraient s’accommoder de la perte du soutien de la Syrie alaouite et de la wilayat al-fakih de l’Iran afin de cohabiter paisiblement avec les autres communautés au sein du Liban, pays en voie de modernité. Dans ce cas, le prétexte de la lutte contre Israël, si noble soit-il, ne pourrait plus être invoqué comme prétexte pour conserver les armes. Il y aurait d’autres moyens de lutte contre Israël et ils devraient être débattus sans émotivité aucune.
Personne ne voudrait se séparer de la communauté chiite si vive en politique et si dynamique dans les affaires. Elle assure entre autres les liens avec une nouvelle Afrique qui s’affiche comme un des continents les plus dynamiques de ce siècle. Nous devons la rassurer, la protéger et la sécuriser à court et à long terme, et ce, en la convaincant qu’un État moderne est le meilleur moyen d’assurer sa prospérité, son éducation, sa santé et sa pérennité. Il faut reconnaître qu’elle se sentirait plus sécurisée si on lui facilitait une liaison directe entre la région alaouite de Syrie et la région chiite au nord de la Békaa. L’affinité religieuse entre ces deux composantes est un atout sur lequel doit compter le Liban du XXIe siècle. La sécurisation ne dépendrait pas seulement de la bonne volonté du Liban, mais aussi du résultat du conflit dans la région de Qousseir et de Homs. Ni le Hezbollah ni les alaouites ne lâcheront prise dans la lutte qui assurerait la contiguïté des deux régions.
(À suivre)
L’année 2013 porte en elle des défis immenses et existentiels pour l’avenir du Levant et plus spécifiquement la Syrie, le Liban, la Jordanie et l’Irak. Le cordon ombilical qui relie le Liban et la Syrie depuis le début de l’histoire, bien qu’il se soit étiolé, tient toujours grâce à la proximité géographique, aux liens familiaux, aux religions partagées et aux différentes...

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