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Économie - Liban - Projet

Siniora présente, enfin, un plan anticrise... Mais à quel prix ?

À son tour, le Liban envisage de se doter d'un « plan » pour faire face au ralentissement mondial. Mais alors qu'à l'étranger les plans sont annoncés avec le montant qui leur sera alloué, la version libanaise ne chiffre pas les (vagues) mesures proposées. 
La bonne nouvelle est que les autorités commencent, enfin, à réaliser que le Liban ne peut pas être une île de prospérité dans un monde en crise. Le Premier ministre a ainsi soumis hier aux membres du gouvernement un plan s'étalant sur deux ans, 2009-2010, visant à atténuer l'impact de la crise sur le Liban. Alors qu'on nous répète depuis des mois que le pays est à l'abri de la crise, le document reconnaît l'existence d'un certain nombre de risques. Il évoque les craintes d'une baisse des transferts de la diaspora, d'un retour des expatriés, d'une baisse des opportunités d'emplois à l'étranger, d'un recul des investissements directs étrangers, notamment dans l'immobilier, d'un ralentissements des exportations des biens et services, et d'une baisse du moral des consommateurs locaux et étrangers.
Il souligne également le risque de voir les banques libanaises accroître leurs placements à l'étranger à la recherche de rendements importants, notamment dans les pays du Golfe à court de liquidités. Cela pourrait réduire les liquidités disponibles sur le plan local, indique le document en prévoyant dans ce cas une hausse des taux d'intérêt de nature à déprimer l'investissement local. Le texte fait toutefois l'impasse sur les besoins de financements massifs de l'État en 2009 et l'impact d'une éventuelle hausse des taux d'intérêt sur le service de la dette.
 Il n'évoque pas non plus le risque de baisse des versements des fonds promis à Paris III. Évidemment, le texte ne chiffre pas ces risques et ne propose pas de scénarios potentiels.
Par le FMI, on sait toutefois que la masse monétaire au Liban doit croître d'au moins 5 % par an pour assurer le financement de l'État.
Au niveau des solutions préconisées, le plan propose trois séries de mesures : des injections de liquidités, des mesures pour stimuler l'investissement public et privé, et des mesures de soutien à l'emploi.

Injections de liquidités : 10 % du PIB
En matière d'injection de liquidités, le document indique que la hausse des salaires dans le public et l'effet rétroactif devraient générer 900 millions de dollars en 2009 et 2010, tandis que la baisse des prix des matières premières devrait générer 600 millions de dollars.
Avec l'hypothétique hausse des salaires dans le privé, des promesses d'accélération des versements publics aux entrepreneurs et aux hôpitaux ainsi que des financements des expropriations nécessaires, et la poursuite des indemnisations de la guerre de juillet, le document estime les liquidités injectées à environ 10 % du PIB.
Ces injections de liquidités devraient soutenir la consommation. Or une politique de relance par la consommation dans un pays fortement importateur n'est pas optimale puisque les fonds injectés, bien qu'ils bénéficient dans un premier temps au secteur commercial, finiront par sortir de l'économie nationale au profit des producteurs étrangers. Sans parler du risque d'inflation en l'absence de développement des capacités productives du pays, un pays comme le Liban aurait plutôt intérêt à privilégier une politique de relance par l'investissement.
Mais en termes d'investissement public, les marges de l'État libanais sont très limitées, sachant que près de 82 % du budget est englouti par les salaires, le service de la dette et l'EDL.
 
Soutien à l'investissement
Optimiste, le plan propose toutefois « d'accélérer » les projets de travaux publics et d'investissements financés par les aides extérieures, menées par le CDR. La présidence du Conseil ne prend donc pas en compte les expériences plus que décevantes du passé. En effet, de l'aveu même du CDR, seuls 40 % des contrats de financement signés avec des bailleurs de fonds étrangers entre 2000 et 2006 ont été entièrement exécutés. Le président de l'organisme Nabil Jisr a lui-même énuméré cinq obstacles à la bonne tenue des projets : le retard pris au niveau des expropriations, l'absence de continuité lors des changements ministériels, l'absence de réformes dans les compagnies publiques, l'absence d'un cahier des charges unifié basé sur une loi moderne sur les marchés publics, et enfin l'incapacité de l'État à remplir ses engagements dans les projets à financement mixte. Si l'État n'agit pas sur cette série de facteurs, même une « accélération » des travaux publics semble compromise.
Quant aux mesures de soutien à l'investissement privé, elles consistent, encore une fois, à « accélérer » le versement des prêts bonifiés obtenus à Paris III en faveur des entreprises. Mais le plan propose également d'élargir la base des bénéficiaires des prêts subventionnés par le Trésor à travers la BDL. Le programme de subvention actuel coûte environ 85 milliards de livres par an à l'État, mais le document ne mentionne pas le coût éventuel de son élargissement.
Il propose aussi d'« annuler certaines taxes qui ne rapportent pas des sommes conséquentes au Trésor, mais dont la suppression pourrait améliorer le climat des affaires », sans préciser lesquels.
Autre nouveauté : œuvrer avec les institutions locales et internationales à créer des fonds de capital risque « capital and private equity funding ».
Évidemment, le document reprend aussi les éternelles promesses de réformes des établissements publics, du cadre législatif, d'amélioration du climat des affaires, de libéralisation du secteur des télécoms... bref les incontournables.

Encourager les nouvelles embauches
Les mesures de soutien à l'emploi sont certes moins vagues, mais toujours sans financement. Le texte propose ainsi d'élaborer un projet de loi permettant à l'État de prendre en charge les cotisations patronales à la CNSS pour toute nouvelle création d'emploi en 2009-2010. Il prévoit également d'accorder des facilités de financements et des exemptions fiscales aux entreprises à haute valeur ajoutée ou créatrices d'emplois. Le document ne mentionne toutefois pas le montant de l'enveloppe envisagée pour ces deux projets.
Par ailleurs, il propose la création de pas moins de trois zones industrielles et économiques (à Tripoli, à Rayak et à Zahrani) et la révision du programme Export Plus.
Finalement, la majorité des mesures proposées ressemblent beaucoup à celles qu'on nous promet depuis des années. Étant donné la crédibilité acquise par les gouvernements successifs en la matière, les Libanais devraient, une nouvelle fois, se préparer à affronter seuls la crise. 
La bonne nouvelle est que les autorités commencent, enfin, à réaliser que le Liban ne peut pas être une île de prospérité dans un monde en crise. Le Premier ministre a ainsi soumis hier aux membres du gouvernement un plan s'étalant sur deux ans, 2009-2010, visant à atténuer l'impact de la crise sur le Liban. Alors qu'on nous...
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