14 + 8 = 22

Il y a des jours comme ça où l’on se prend à rêver que les méchants deviendront gentils et les affreux clairvoyants. Où l’on se dit que les aveugles verront enfin la lumière, celle des justes, et les sourds entendront le fracas de la vérité, celle qui assourdit. Il y a des jours comme ça où l’envie de réviser votre table de multiplication vous revient, de vous dire que 14 et 8 ça fait 22, et que c’est comme ça que nous accéderons à la vraie indépendance. Où l’envie de laisser tomber mari, copains, parents vous prend pour mieux passer vos soirées avec Marcel et Ali, scotchée à la télé, à écouter inlassablement un certain serment. Et où vous commencez à vous poser certaines questions. Si ce n’était pas « eux » ? Si c’était bien plus grand que « ça » ? Et si on ne saura jamais qui ? Et si le monde entier était impliqué ? Et si j’étais en train de devenir parano ? Il y a des jours comme celui-là où, croyant avoir touché le fond, l’attitude d’un vieux lion ou le discours d’une jeune tigresse vous fouettent l’esprit et vous relèvent, le cœur grand comme ça. Il y a des jours comme ça, vous dis-je, qui se transforment en dates-charnières, dates-événements, où plus rien ne reviendra comme avant. Bien à vous. Pour des jours meilleurs. Pour vous. Pour moi. Pour le Liban. Pour qu’il n’y ait plus jamais des jours comme celui-là. Nada ABI SALEH