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Nos Lecteurs ont la Parole - Par Janine SOMMA

Carrières : attention, danger !

Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
Depuis la fin de la guerre au Liban, la dégradation de l'environnement et des patrimoines naturels et culturels va bon train, avec pour prétexte une réponse à des besoins économiques ou de reconstruction. Pourtant, cela est loin de conduire à un développement durable du pays ; bien au contraire, cela mène à sa paupérisation.
En effet, parmi ces dégradations, l'une des plus dangereuses ce sont les carrières qui se multiplient, mettant sérieusement en danger nos ressources en eau et la stabilité des terrains. Pas plus loin qu'à Hrajel et Meyrouba, des montagnes entières sont en ce moment en train d'être enlevées. Il avait été annoncé que cette opération serait arrêtée le 31 décembre. Or il n'en est rien : quel que soit le temps, les marteaux piqueurs et pelleteuses continuent de creuser la montagne.
Permettez-moi de vous signaler en résumé quelques-uns des dangers de ces carrières :
- Le Liban est un château d'eau. Ses formations géologiques de grés et de calcaires constituent des réservoirs. Leur ablation conduit à la diminution du débit des sources en contrebas quand cela ne mène pas à leur tarissement total, comme c'est déjà le cas à Aarsal. Autre exemple : du côté de Hrajel-Nabeh el-Qana (où je passe l'été), les cultivateurs se plaignent de ne plus pouvoir arroser suffisamment leurs vergers. Avec le réchauffement climatique et la diminution drastique des précipitations, une sérieuse politique de préservation des ressources devrait préoccuper les Libanais.
- Le sous-sol n'est-il pas du « domaine public » ? N'y a-t-il pas une loi en faveur de sa préservation ?
- L'ablation des roches fragilise les terrains ; en conséquence, les pluies torrentielles qui prévalent au Liban peuvent entraîner des éboulements, des glissements de terrains et d'importantes coulées boueuses. Or ces carrières se situent, pour certaines, à quelques mètres au-dessus des habitations, compromettant sérieusement leur sécurité.
- De plus, elles favorisent une érosion accélérée par le biais des sables et fragments de roches entraînés par le ruissellement.
- La dégradation du paysage qui découle de ces innombrables découpages peut mener, entre autre, à la baisse de valeur des terrains alentours et conduire à la paupérisation des petits propriétaires terriens. Cela entraîne également la dépréciation touristique qui, elle, conduit à un manque à gagner des populations.
La magnifique partie aval de Nahr Ibrahim est une zone qui devrait être cataloguée comme patrimoine mondial ou réserve naturelle. Malheureusement, des carrières l'ont déjà pas mal enlaidie. Un resserrement de la vallée est verrouillé par un superbe versant rocheux. Il y a quelques semaines, nous avons constaté que du matériel attend dans les encoches du versant. Est-ce à dire que cette merveille est amenée à disparaître ?!
- Les carrières contribuent au mitage du couvert végétal. Plus celui-ci est morcelé, moins il peut constituer un habitat faunique. Or la disparition des espèces végétales et animales mène à la baisse de la biodiversité et, à long terme, à la désertification totale.
- La dissémination des poussières en « sursol » peut entraîner des problèmes respiratoires pour les personnes dont le lieu d'habitat se situe à proximité ; en sous-sol, elle peut boucher des conduits souterrains et modifier la résurgence de nappes phréatiques au niveau des sources.
Elle entraîne également bien des désagréments liés au transport des matériaux (camions dont la ronde commence à 4h00 du matin, surpoids, défonçage des routes...).
Aujourd'hui, il est cependant possible, par le biais des nouvelles techniques de la « géomatique » (télédétection et SIG), de trouver des sites où l'impact aurait une moindre importance.
Nous vous serions donc reconnaissants de bien vouloir prendre, dans l'intérêt du pays, les mesures nécessaires, soit :
1- l'arrêt de toutes les carrières sur la façade occidentale du Liban (comme cela avait déjà été proposé et soulevé au Conseil des ministres dans les années 90);
2- la recherche de sites potentiels moins dégradants (du côté de l'Anti-Liban surtout).
Nous vous en remercions d'avance, Monsieur le Ministre.

Janine SOMMA
Ph D. géographie
Monsieur le Ministre de l'Intérieur,Depuis la fin de la guerre au Liban, la dégradation de l'environnement et des patrimoines naturels et culturels va bon train, avec pour prétexte une réponse à des besoins économiques ou de reconstruction. Pourtant, cela est loin de conduire à un développement durable du pays ; bien au contraire, cela...
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