Enième tollé lié à l’éducation sexuelle dans les écoles au Liban. Une fiche distribuée aux élèves du CE1 au Collège central des moines libanais de Jounieh, affichant entre autres des familles homoparentales, a suscité une vague d’indignation parmi les parents et la direction de l’établissement.
L’affaire, qui a également enflammé les réseaux sociaux, a rapidement gagné de l’ampleur : la justice libanaise et l’Ordre libanais maronite ont pris de sévères mesures à l’encontre des enseignantes concernées. Que contenait ce document et quid du sort des enseignantes ? L’Orient-Le Jour revient sur ce qui s’est passé.
Toutes sortes de familles
Consultée par notre publication, la copie affiche une illustration de l’auteure québécoise Élise Gravel, connue pour ses dessins visant à déconstruire les stéréotypes imposés aux enfants. « Il existe toutes sortes de familles différentes. Je ne peux pas toutes les dessiner, c’est impossible ! Ce qui compte dans une famille, c’est l’amour », peut-on lire sur le document qui montre onze exemples de familles. Des parents hétérosexuels accompagnés de leur enfant, des parents de races différentes, des familles composées d’un seul parent… mais aussi de parents homosexuels. La fiche appelle enfin les élèves à dessiner leur propre famille.
Vivement critiquée sur la toile, l’activité a été fustigée par les parents. « Les enseignantes n’ont pas le droit de véhiculer des messages liés à l’homosexualité alors que nos enfants n’en ont même pas conscience à cet âge », a confié une mère à L'Orient-Le Jour sous couvert d’anonymat. « Le document est passé par plusieurs enseignantes et personne n’a été choqué par les photos. Que ce soit de manière volontaire ou par manque d’attention, c’est une attitude non professionnelle », a dénoncé une autre.
Cette affaire a également fait réagir la députée aouniste du Kesrouan Nada Boustany. « Le Collège central de Jounieh est connu pour son professionnalisme. Si une erreur est commise, il existe des parties compétentes à même de résoudre l'affaire de sorte à protéger la réputation de l’école, les droits des enfants et les revendications des parents », a-t-elle souligné sur le réseau social X.
Réagissant à ce tollé, la direction de l’école a souligné dans un message diffusé aux parents que « l’enseignante a expliqué en classe que les images qui posaient problème montraient des enfants orphelins », et reconnu que le support a été « mal choisi ». L'administration a également affirmé dans un communiqué qu’elle « menait l’enquête nécessaire » pour prendre des mesures à l’égard des personnes concernées.
Accusation d'incitation à l’homosexualité
Entre-temps, c’est la juge unique pénale statuant sur les affaires des mineurs au Mont-Liban, Joëlle Abou Haïdar, qui a ouvert l'instruction lundi. La magistrate a convoqué les enseignantes dont le nom figurait sur le document (Pauline, Jennifer, Melissa, Karen et Paloma), ainsi que le responsable du cycle II à une audience fixée au 15 mars. Principal élément à charge : « l’incitation à l’homosexualité qui enfreint les valeurs morales et éducatives ainsi que les lois de la nature ». Pointant du doigt dans sa décision les illustrations affichant deux couples homosexuels (masculin et féminin) accompagnés d’un enfant, la juge a averti que les contrevenants seront passibles d’une « amende de 50 millions de livres libanaises » s'ils ne se présentent pas devant le tribunal.
Une enseignante et sa coordinatrice suspendues
A son tour, l’Ordre libanais maronite, auquel le collège est rattaché, a affirmé mardi avoir enquêté sur l’affaire et décidé de « suspendre pendant un mois » l’enseignante qui a préparé l’activité et la coordinatrice qui a validé sa diffusion auprès des élèves.
Dans un communiqué, il a expliqué que « l’enseignante qui a téléchargé le document voulait aborder le thème des orphelins, certains de ses élèves ayant perdu leur parent ». « Elle voulait montrer que d’autres membres de la famille élargie peuvent entourer un orphelin », ajoute le texte, notant que l'éducatrice « n'avait pas de connaissances en matière de genre ». « Le comité d'enquête a conclu qu'elle a commis une erreur qui n’était pas intentionnelle, d'autant plus qu’elle est connue pour son engagement chrétien et moral, et que le document, selon différents avis, prête à de nombreuses interprétations », ajoute l’Ordre.
Selon lui, la coordinatrice a également commis une « erreur non-intentionnelle », voyant aussi dans le document des orphelins. L’Ordre a enfin souligné qu’il s’opposait à « la théorie du genre » et « défendait les valeurs catholiques de la famille ».
Contactée à plusieurs reprises, la direction du collège n’était pas joignable dans l’immédiat.
commentaires (22)
Le wokisme serait-il déjà arrivé à notre frontière ??
Vero M
12 h 10, le 14 mars 2024