Le patriarche maronite Béchara Raï a accusé dimanche les hommes politiques libanais de chercher à transformer le Liban en un pays religieux et sectaire, qui fait passer à la trappe le principe de séparation de la religion et de l’État.
« Les intentions sont révélées, découlant des résultats de la vacance (présidentielle), visant à transformer le Liban d'un pays qui sépare la religion et l'État en un État religieux, sectaire et de confrontation », a affirmé le cardinal Raï dans son homélie dominicale prononcée au siège patriarcal de Bkerké.
Lors de la messe célébrée pour « le repos des croyants décédés » à quelques jours de la Saint Maron, le saint patron des maronites, fêtée le 9 février, le patriarche a aussi fait référence indirectement aux complications qui entourent la nomination d’un successeur au procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, qui prend sa retraite le 21 février.
Mgr Raï s'en est pris aux « personnes au pouvoir qui violent la constitution et interviennent politiquement » pour saboter le processus des nominations à plusieurs hautes fonctions dans le pays, qui doivent respecter les critères de répartition confessionnelle établis par la Constitution.
Le Liban est sans chef de l'État depuis la fin du mandat de Michel Aoun en octobre 2022, et la Chambre des députés ne parvient pas à lui trouver un successeur.
Sur un autre sujet, le dignitaire religieux a pointé du doigt « les corrompus qui ont accumulé de l'argent en volant des fonds publics à l'État, en effectuant des transferts frauduleux, en s'enrichissant de manière illicite et en fraudant le fisc », assurant qu’ils ne pouvaient pas « défier Dieu ». Une remarque qui intervient alors que le pays, en grave crise depuis plus de 4 ans, n’a toujours pas mis en place les réformes devant permettre de se replacer sur les rails et de renforcer l’indépendance du système judiciaire.
Guerre « monstrueuse »
Mgr Raï a également abordé le sujet de la guerre qui fait rage à Gaza entre le mouvement islamiste Hamas et le Hezbollah depuis le 7 octobre 2023. « Depuis le début, nous considérons la guerre israélienne contre Gaza dans sa forme monstrueuse que nous voyons comme un génocide du peuple palestinien et une élimination de sa cause. Et nous avons répété que les parties libanaise et israélienne devaient respecter la résolution 1701 [de l'ONU] afin de protéger les villages du sud contre les meurtres, les destructions et les déplacements », a notamment dit le patriarche. La résolution 1701 du Conseil de sécurité, adoptée en août 2006, a donné un pouvoir explicite à la Force intérimaire des Nations unies (Finul) et à l'armée libanaise sur ce qui est connu comme la ligne bleue le Liban et Israël.
Le chef de l'Église maronite a également déclaré que le Liban ne pouvait pas jouer le rôle de médiateur dans le conflit en cours à Gaza et au Liban-Sud, « alors qu'il est impliqué dans des conflits qu'il ne souhaite pas ». Les échanges de tirs en le Hezbollah pro-iranien et l’armée israélienne à la frontière sont quotidiens depuis le 8 octobre dernier.
Mgr Raï a également lu des passages d'un article de l'ex-ministre Sejaan Azzi, qui était devenu proche du patriarcat avant son décès. « Si le pacte national a promis un président chrétien, il ne reconnaît pas le rôle des maronites dans la création du nouveau Liban mais aussi pour renforcer ce président qui devrait avoir une personnalité exceptionnelle... Il n'y a aucune valeur dans un président maronite dans une république qui a perdu sa culture et a cédé à sa dynamique et s'est comportée de la même manière que les régimes oppressifs qui sont proches [du Liban] ».
commentaires (8)
La corruption, "moteur" de la crasse politique libanaise. Les mauvais bergers de ces "communautés" ethniques, claniques, tribales, sectaires, hérétiques, rarement religieuse (Reléguere= qui nous relie d'abord à Dieu pour relier les Hommes) ont comme idole le "Dieu Bâal", le veau d'or, un mélange d'orgueil, d'argent et d'hérésies ? Le Liban, une Nation ? Existe t-il un collectif ? Peut-il en existait ? Compte tenu de la fragmentation de la population en plusieurs communautés, parfois aux ordres d'intérêts étrangers, quel serait les éléments fédérateurs ? A part la Sainte Vierge ?
Nicolas ZAHAR
17 h 18, le 06 février 2024