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Société - Journée de la pauvreté

À Bkerké, un cri contre la paupérisation de la société

Des milliers de personnes se sont rassemblées dimanche au siège du patriarcat maronite, qui avait organisé cet événement avec l’appui de L’Œuvre d’Orient.

À Bkerké, un cri contre la paupérisation de la société

Des milliers de participants sous de grandes tentes dimanche, au siège du patriarcat maronite. Photo S.B.

La route étroite et sinueuse qui mène jusqu’au siège du patriarcat maronite à Bkerké est noire de bus et de voitures, en ce dimanche matin. La pluie torrentielle n’a pas dissuadé des dizaines d’organisations de la société civile et d’écoles, avec leurs milliers de bénéficiaires, de faire le déplacement des quatre coins du pays pour répondre à l’appel du patriarche Béchara Raï, à l’occasion de la Journée de la pauvreté, décrétée il y a sept ans par le pape François. Un cri qui trouve son origine dans la crise économique et financière aiguë qui secoue le Liban depuis quatre ans, alors même que l’État est aux abonnés absents.

Pour mémoire

Les bruits sourds de l’effondrement du Liban

Dans l’enceinte de Bkerké, où une messe doit être célébrée à l’intention de ce vaste public, des tentes ont été dressées pour abriter les milliers de personnes de la pluie. L’atmosphère est à la bonne humeur, même si le thème du rassemblement, la pauvreté, est vécu quotidiennement comme un fléau par nombre de présents. « Nous n’avons pas hésité à répondre à cette invitation, parce que l’occasion est belle et que pour nos malades c’est l’opportunité de sortir et ressentir la solidarité de ceux qui sont dans le même cas », affirme sœur Léna Moukarzel, des Sœurs de la Croix, à Chrifa (Liban-Sud).

L’événement est appuyé par L’Œuvre d’Orient et rassemble de nombreuses écoles et organisations chrétiennes et laïques. Les bénéficiaires, eux, viennent de diverses régions et de différentes communautés. Le poids de la crise est ressenti autant par ces derniers que par les associations elles-mêmes, qui peinent à poursuivre leur mission. Nour Abbas est une des enseignantes de l’association Kafaàt. « Il était important de participer à cet événement parce que le thème concerne directement nos bénéficiaires, qui ont des besoins spéciaux et qui nécessitent continuellement de l’aide », raconte la jeune femme.


Aux premières rangées durant la messe, des bénéficiaires d'associations, dont des handicapés et des malades. Photo S.B.

Les bénéficiaires des associations présents dimanche à Bkerké sont majoritairement libanais, mais certains sont originaires de Syrie, habitant le Liban depuis plusieurs années. Naziha Dagher est issue de Homs, elle a fait le déplacement à Bkerké avec l’Association Saint-Joseph. « Ma maison a été brûlée et pillée durant la guerre, dit-elle. Je suis là pour prier avec ceux qui souffrent. D’ailleurs les nantis, je ne les connais pas ! »

L’absence de l’État

Quand vient le temps de la messe, le patriarche Raï est acclamé à son entrée à l’église. Aux premières rangées de l’église circulaire de Bkerké, où se tient l’office religieux, les bénéficiaires des associations, handicapés et malades en tête, remplacent les personnalités politiques coutumières de la messe de dimanche.

Dans son homélie, le patriarche revient longuement sur une initiative prise par l’Assemblée des évêques catholiques, celle de consacrer les recettes de la quête de ce dimanche dans les églises aux déplacés du Liban-Sud en raison des combats qui s’y déroulent entre le Hezbollah et Israël depuis le 8 octobre dernier. Cette initiative, annoncée mercredi dernier en conférence de presse, avait provoqué une campagne sur les réseaux sociaux visant Mgr Raï personnellement par certains internautes qui avaient perçu de la suffisance dans cette proposition. Répondant indirectement aux critiques, le prélat a confirmé que les recettes de cette quête iront bien aux déplacés du Sud, soulignant avoir reçu la visite de délégations des villages frontaliers la veille, qui lui ont décrit les difficultés économiques et l’absence de sécurité dans cette zone.


Le patriarche Raï à son arrivée à la messe. Photo S.B.

Si dans son homélie le patriarche a pointé du doigt l’absence (et la responsabilité) de l’État dans la lutte contre la paupérisation de la société libanaise, le mot de Mgr Pascal Gollnisch, directeur général de L’Œuvre d’Orient, y fait écho. Celui-ci estime que les organisations catholiques, qui ont toujours soutenu le Liban, ne peuvent plus « agir sans un État efficace et crédible ».

Interrogé sur le sens de ces propos, Vincent Gelot, représentant de L’Œuvre d’Orient au Liban et dans la région, précise que son organisation ainsi que d’autres espèrent « une réelle réaction des Libanais ». « Il faut réclamer les droits des pauvres, ce qui n’est pas assez fait actuellement », ajoute-t-il, déplorant que les associations libanaises elles-mêmes soient aujourd’hui dans la précarité. Si l’État libanais, principal partenaire de ce secteur associatif, se retire, la charge devient trop lourde, autant pour les organisations locales qu’internationales, avertit-il.

La longue journée à Bkerké se clôt par une série de témoignages de responsables d’associations et de leurs bénéficiaires, qui mettent l’accent sur l’impasse dans laquelle ils se trouvent en raison des moyens de moins en moins disponibles. 

La route étroite et sinueuse qui mène jusqu’au siège du patriarcat maronite à Bkerké est noire de bus et de voitures, en ce dimanche matin. La pluie torrentielle n’a pas dissuadé des dizaines d’organisations de la société civile et d’écoles, avec leurs milliers de bénéficiaires, de faire le déplacement des quatre coins du pays pour répondre à l’appel du patriarche Béchara...

commentaires (2)

BRAVO! Il faut répéter l’expérience dans nos régions qui sont jusque là inaccessibles aux voyous sur mobylettes. On voit sur les photos, des libanais venus de toute part pour crier leur désespoir et on ne peut que s’en réjouir. Il ne faut pas se résigner il ne faut pas les laisser usurper notre pays. Les libanais ont aussi leur mot à dire et il faut que le monde entier les entende et les écoute. ENCORE BRAVO pour cette initiative.

Sissi zayyat

12 h 26, le 20 novembre 2023

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Commentaires (2)

  • BRAVO! Il faut répéter l’expérience dans nos régions qui sont jusque là inaccessibles aux voyous sur mobylettes. On voit sur les photos, des libanais venus de toute part pour crier leur désespoir et on ne peut que s’en réjouir. Il ne faut pas se résigner il ne faut pas les laisser usurper notre pays. Les libanais ont aussi leur mot à dire et il faut que le monde entier les entende et les écoute. ENCORE BRAVO pour cette initiative.

    Sissi zayyat

    12 h 26, le 20 novembre 2023

  • Ce que le pstriarche a omis de dire c'est que la pauperisation des Libanais est la consequence directe de la corruption erigee par les mafias miliciennes, politiques et bancaires, du pouvoir en systeme de gestion du pays. Car enfin les 100 milliards de dollars disparus ne se sont pas evapores. Ils ont ete, en partie, financer le regime du boucher de Damas et aussi, en grande partie, sur les comptes des mafieux a l'etanger. Mafieux qui tien'ent toujours le pays sous leur coupe. Kellon ya3ne kellon.

    Michel Trad

    09 h 19, le 20 novembre 2023

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