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Société - Focus

Malgré la menace, les journalistes libanais toujours sur le front

Un mois après la mort de Issam Abdallah, tué le 13 octobre par une frappe israélienne, les tirs de roquettes essuyés lundi par des journalistes dans le village frontalier de Yaroun sont interprétés par de nombreux confrères comme un message à la profession.

Malgré la menace, les journalistes libanais toujours sur le front

Les flammes provoquées par un tir de missile israélien près d’un véhicule de presse à Yaroun, au Liban-Sud, le 13 novembre 2023. Photo AFP

Mardi 14 novembre, au siège du journal as-Safir à Hamra, le hasard du calendrier a pris une tournure macabre. « Nous étions en train de préparer l’événement d’aujourd’hui pour parler de la mort de Issam Abdallah quand nous avons appris ce qui s’est passé hier à Yaroun », explique Elsy Moufarrej, coordinatrice du Syndicat alternatif de la presse, à l’origine de la conférence de presse intitulée « Empêcher le criminel d’échapper aux sanctions : quel chemin vers l’enquête et la responsabilité ? ».

Un mois jour pour jour après la mort de Issam Abdallah, tué le 13 octobre par une frappe israélienne dans le village frontalier d’Alma el-Chaab ayant aussi blessé plusieurs journalistes, une trentaine de confrères libanais ont frôlé la mort lundi 13 novembre dans le village frontalier de Yaroun, quand deux roquettes israéliennes se sont abattues à quelques mètres d’eux à trois minutes d’intervalle, blessant légèrement un reporter de la chaîne qatarie al-Jazeera. Lundi, vers 15h10 selon Nahed Youssef, journaliste de la chaîne panarabe al-Arabiya présente sur place, une première roquette est tombée à quelques mètres des voitures des journalistes. Trois d’entre elles ont été endommagées, a-t-elle indiqué le jour même à L’OLJ, précisant que « si les voitures n’avaient pas absorbé le choc de l’explosion, nous aurions probablement péri ».

La nouvelle n’a pas échappé à Carmen Jokhadar, l’une des journalistes d’al-Jazeera qui a été blessée le 13 octobre. En convalescence, elle a tenu à témoigner à distance lors de la conférence : « Ce qui s’est passé hier montre qu’Israël continue de cibler la presse et apporte la preuve à ceux qui attendaient encore le résultat d’une enquête pour comprendre ce qui s’est passé le 13 octobre : la situation est désormais claire », a-t-elle lâché.

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« Une forme de garantie »

Quand le reporter de la MTV Nakhlé Odaimé a appris que, pour la première fois depuis le début du conflit au Liban-Sud entre Israël et le Hezbollah, il avait la possibilité de se rendre à Yaroun, il reconnaît s’être interrogé, conscient du danger : « J’y vais ou je n’y vais pas ? Au final, j’ai décidé de m’y rendre pour décrire ce qu’il se passe précisément » dans le village visé la veille par des bombardements israéliens qui, dit-il à L’OLJ, s’est vidé de ses habitants et est désormais une zone de combat. Il précise que le groupe de journalistes a obtenu l’accord du Hezbollah et était accompagné de plusieurs civils de Yaroun, dont le maire du village, « qui sont issus de l'environnement du Hezbollah ». Malgré le risque, il dit s’être senti rassuré par « une forme de garantie » de sécurité, car le parti de Dieu « a affirmé coordonner leur venue avec l’armée libanaise et la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) ». Contacté par L’OLJ, le Hezbollah n’a pas répondu à notre demande de confirmation.

Présent à Yaroun lundi, Ali Mortada, journaliste à al-Mayadeen, abonde : « La Finul et l’armée libanaise étaient au courant de notre présence et la Finul l’avait préalablement communiquée à l’armée israélienne. »

Pourtant, contactées par L’OLJ, tant la Finul que l’armée libanaise nient avoir été informées de la venue des journalistes. « La Finul n’était pas au courant de la présence de journalistes dans la région et n’était pas impliquée dans l’organisation ou la coordination de leur visite », a par ailleurs déclaré Andrea Tenenti, porte-parole de la Finul, à l’Agence nationale d’information (ANI).

« Quel que soit le prix à payer »

Contactés par L’OLJ, les journalistes d’al-Jazeera présents lundi à Yaroun, Mazen Ibrahim et Issam Mawasi, légèrement blessé à la jambe, continuent de couvrir les tensions au Liban-Sud. La chaîne qatarie, l’un des rares médias encore présents dans la bande de Gaza, voit régulièrement ses journalistes ciblés par Israël, qui la considère comme un porte-voix du Hamas. Le 25 octobre, le chef du bureau de Gaza d’al-Jazeera, Waël Dahdouh, a appris en direct la mort de sa famille dans un bombardement israélien. Mais pour Nakhlé Odaimé, ce n’est pas en raison de leur présence que le convoi a été visé par Israël : « La frappe a visé l’ensemble des journalistes, cela dépasse al-Jazeera. » Au total, depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas le 7 octobre, 43 journalistes, dont 37 Palestiniens, 4 Israéliens et un Libanais ont été tués, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).

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Avec cette frappe ayant frôlé le convoi de journalistes, Ali Mortada estime que l’armée israélienne a envoyé « un message clair aux journalistes présents sur place ». Nakhlé Odaimé partage la même grille de lecture : « S’ils nous avaient ciblés de façon directe, personne ne serait sorti vivant », dit-il. Mais il nuance : « En tirant une roquette à dix mètres, ils nous faisaient certes passer le message que personne ne pouvait s’approcher plus près. Mais la possibilité d’une erreur était très élevée… » Désormais, il affirme que « Yaroun est devenu une zone impossible à couvrir », mais affirme être déterminé à rester dans la région « pour couvrir ce qui se passe, quel que soit le prix à payer ». 

NB : Cet article a été modifié le 15 novembre à 20h45 pour ajouter une clarification dans la citation de Nakhlé Odaimé évoquant la nature des relations entre plusieurs civils de Yaroun et le  Hezbollah. 

Mardi 14 novembre, au siège du journal as-Safir à Hamra, le hasard du calendrier a pris une tournure macabre. « Nous étions en train de préparer l’événement d’aujourd’hui pour parler de la mort de Issam Abdallah quand nous avons appris ce qui s’est passé hier à Yaroun », explique Elsy Moufarrej, coordinatrice du Syndicat alternatif de la presse, à l’origine de la conférence...

commentaires (1)

Et dire que NATANYAHOU déclare vouloir sauver la civilisation.... Il tue la presse, la liberté d'expression ( tout comme il le fait auprès de ses citoyens via les lois qu'il essaie de faire passer alors que les israéliens refusent et le refusent). Ce type est LE danger même pour la civilisation, pour Israel même et évidemment pour la VRAIE Paix. Ce qui l'interesse ce sont les paix de pacotiles et non la paix des peuples. D'ailleurs, aujourd'hui, les régimes arabes sont sur une planète et leurs populations sont sur une autre planète. Deux mondes différents en cette période de tension.

LE FRANCOPHONE

11 h 56, le 15 novembre 2023

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Commentaires (1)

  • Et dire que NATANYAHOU déclare vouloir sauver la civilisation.... Il tue la presse, la liberté d'expression ( tout comme il le fait auprès de ses citoyens via les lois qu'il essaie de faire passer alors que les israéliens refusent et le refusent). Ce type est LE danger même pour la civilisation, pour Israel même et évidemment pour la VRAIE Paix. Ce qui l'interesse ce sont les paix de pacotiles et non la paix des peuples. D'ailleurs, aujourd'hui, les régimes arabes sont sur une planète et leurs populations sont sur une autre planète. Deux mondes différents en cette période de tension.

    LE FRANCOPHONE

    11 h 56, le 15 novembre 2023

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