
Le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé dans son bureau à Beyrouth lors d’une interview accordée à l’AFP, le 20 décembre 2021. Joseph Eid/AFP
Le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, semble de plus en plus cerné ces derniers jours par les appels à sa démission, lancés par plusieurs ministres et par les commissions parlementaires, depuis l'émission d'une notice rouge d'Interpol et d'un mandat d'arrêt français à son encontre. Des appels qui se multiplient, alors que le département d'Etat américain a enjoint le gouvernement à "respecter le processus pour nommer un nouveau gouverneur".
Mardi, lors d'une réunion des commissions parlementaires mixtes le vice-président de la Chambre, Elias Bou Saab, qui est à la fois membre du groupe parlementaire du Courant patriotique libre (CPL) et proche du chef du Parlement Nabih Berry, a déclaré que les commissions estiment que la situation actuelle n’est "pas saine", même si le mandat de M. Salamé s’achève dans deux mois. M. Bou Saab a en outre "espéré" que le gouverneur de la BDL prendra la "décision appropriée". "Il serait bon que le gouverneur de la banque centrale démissionne", a-t-il laissé entendre.
Ciblé par plusieurs enquêtes au Liban et en Europe concernant la façon dont il s’est constitué un riche patrimoine immobilier, le gouverneur est actuellement sous le coup d'une notice rouge d'Interpol consécutive à un mandat d'arrêt international émis par la justice française. De plus, le Liban a été informé verbalement par l'Allemagne mardi d'un mandat d'arrêt contre Riad Salamé "pour corruption, faux et usage de faux, blanchiment d'argent et détournement de fonds", selon l'agence Reuters qui citait une source judiciaire haut placée.
Audience devant la justice libanaise
M. Salamé s'est dans ce cadre présenté mercredi après-midi devant l'avocat général près la cour de Cassation Imad Kabalan pour répondre à des questions sur le mandat d'arrêt français qui le vise ainsi que la notice rouge d'Interpol. Le juge Kabalan a interdit au patron de la banque centrale de quitter le territoire libanais et a décidé de saisir ses deux passeports, libanais et français, a indiqué à l'AFP une source judiciaire. Il a en outre décidé de demander à la justice française de lui remettre le dossier de l'affaire, selon cette même source.
Malgré les appels à la démission lancés ces derniers jours, le gouvernement, réuni lundi après-midi de manière informelle sous la houlette du Premier ministre sortant, Nagib Mikati, n'a émis aucune mesure concrète contre le patron de la banque centrale et a décidé de laisser l'affaire entre les mains de la justice. Une décision qui déplaît au ministre sortant de la Justice, Henri Khoury, proche de l'ex-président Michel Aoun. M. Khoury a fait part dans un communiqué lundi soir de son "refus que la balle soit dans le camp de la justice libanaise". Il a par ailleurs demandé "que le dossier Salamé soit traité conformément au mandat d'arrêt français pour prendre les mesures nécessaires, à savoir demander au gouverneur de démissionner". Plus tôt lundi en journée, Henri Khoury avait directement appelé Riad Salamé à présenter sa démission, estimant que les poursuites engagées à son encontre en France pourraient avoir des répercussions sur la situation monétaire du Liban.
Mardi, c'était au tour du ministre des Affaires sociales, Hector Hajjar, également proche du CPL, de se prononcer en faveur de la destitution du gouverneur. "Moi, Hector Nagib Hajjar, je suis en faveur de la destitution et du jugement de Riad Salamé", avait-il écrit sur Twitter, avec le hashtag (mot-dièse) "On ne peut pas être plus clair que ça".
Pour sa part, le ministre sortant des Finances Youssef Khalil, un proche du président du Parlement et leader d'Amal Nabih Berry, avait indiqué mardi à la chaîne à al-Jadeed qu'il est "contre la démission de Riad Salamé parce que ce dernier va de toute façon quitter la BDL après la fin de son mandat" (fin juin). "Le gouverneur a d'ailleurs refusé que son mandat soit prorogé", avait-il ajouté. Interrogé par notre journal, Michel Moussa, député de Tyr et membre du groupe parlementaire du mouvement Amal, a affirmé que son bloc "ne s'est pas encore réuni pour débattre du dossier Salamé". "C'est plutôt du ressort de l'Exécutif et non pas du Parlement de trancher en ce qui concerne sa démission", a-t-il fait savoir.
Déjà le 18 mai, le vice-président du gouvernement sortant, Saadé Chami, avait appelé au départ du gouverneur. M. Chami est affilié au Parti national social syrien (PSNS), dont est également issu Elias Bou Saab. Le 19 mai, le ministre sortant de l'Intérieur, Bassam Maoulaoui, avait lui aussi jugé une démission "nécessaire".
Pressions américaines
Le département d'Etat américain a également commenté à mi-mot mardi l'affaire Salamé, lors d'un point presse. Matthew Miller, porte-parole de la diplomatie US, a refusé de répondre directement à une question sur les mandats d'arrêt français et allemand mais a exhorté "le gouvernement libanais à déterminer qui doit continuer à occuper le poste" (de gouverneur de la BDL). "Nous travaillons avec le gouverneur désigné officiellement", a lancé Matthew Miller. "Il est important que le gouvernement libanais respecte le processus en place pour désigner un nouveau gouverneur et se concentre sur la stabilisation de l'économie libanaise et la mise en place de changements significatifs", a-t-il ajouté.
Après l'émission du mandat d'arrêt international le 16 mai par la juge d'instruction française Aude Buresi, M. Salamé avait affirmé qu'il comptait faire appel de cette décision. Deux jours plus tard, il a indiqué qu’il démissionnerait "si un jugement était rendu" à son encontre, et confirmé qu'il quitterait en tout cas ses fonctions à la fin de son mandat le 31 juillet prochain. Le gouverneur de la BDL a aussi affirmé qu'il fera appel de la notice rouge d'Interpol associée au mandat d'arrêt émis par la justice française.
Le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, semble de plus en plus cerné ces derniers jours par les appels à sa démission, lancés par plusieurs ministres et par les commissions parlementaires, depuis l'émission d'une notice rouge d'Interpol et d'un mandat d'arrêt français à son encontre. Des appels qui se multiplient, alors que le département d'Etat américain a enjoint le...
commentaires (5)
En lui interdisant de quitter le territoire Libanais, le systeme mafieux en place lui donne un beau cadeau. Il coulera le reste de ses jours a Fakra bien garde ou il jouera au poker avec Carlos Ghosn.
hrychsted
20 h 12, le 24 mai 2023