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Idées - Point de vue

Le Liban a plus que jamais besoin de l’aide du FMI

Le Liban a plus que jamais besoin de l’aide du FMI

Photo d’illustration : la conférence de presse du Premier ministre Nagib Mikati, en présence d’une délégation du FMI, lors de la signature de l’accord préliminaire avec l’organisation internationale, le 7 avril 2022. Archives Dalati et Nohra

Alors que le Liban continue de faire face aux conséquences économiques et sociales dramatiques de la crise protéiforme qu’il traverse depuis plus de trois ans, l’essentiel des mesures prévues par le plan de redressement adopté par le gouvernement sortant n’a toujours pas vu le jour. Au point que ces difficultés, conjuguées à l’apparente résilience de la population et aux perspectives de production de gaz, finissent par même faire douter de la participation du Fonds monétaire international (FMI). Or, miser sur les revenus potentiels des hydrocarbures – dont l’exploitation n’a pas commencé – comme solution à la crise n’est pas viable : il n’y a aucune certitude – en termes de montant et de calendrier – sur ces revenus et, selon la plupart des prévisions, ils ne représenteront de toute façon qu’une petite fraction de la dette publique. Par ailleurs, il sera de toute façon nécessaire de renforcer la gouvernance afin que ces recettes ne soient pas mal gérées. Quant à la capacité d’adaptation de la population libanaise face aux nouvelles réalités économiques et sociales, elle n’exclut pas la nécessité de prendre des mesures pour inverser l’augmentation massive et soudaine des taux de pauvreté, ou celle d’améliorer immédiatement l’accès à des services sociaux décents – à commencer par la santé et l’éducation – aux larges segments de la population qui n’y ont plus accès. Plus largement, il est plus que jamais urgent de prendre des mesures de grande envergure pour remédier aux déséquilibres du secteur public et de la balance des paiements, rétablir la viabilité de la dette, assurer une protection sociale efficace, restaurer la crédibilité de la monnaie et renforcer la gouvernance économique.

Effet catalyseur

Certes, le Liban pourrait mettre en œuvre ce programme de réformes sans la participation du FMI, d’autant que le programme qui a été convenu avec ses services n’impose aucune mesure qui ne soit déjà incluse dans le plan de redressement du gouvernement et que le Fonds ne considère pas comme étant dans l’intérêt du Liban. Cependant, la participation du FMI – en aidant à formuler le programme, en surveillant sa mise en œuvre et en fournissant une évaluation indépendante de l’adéquation des politiques – donnerait au programme de réforme du Liban la crédibilité dont il a besoin, à savoir que des politiques appropriées sont prises pour remédier à ses déséquilibres macroéconomiques et à ses faiblesses structurelles. En outre, bien que le financement éventuel assuré directement par le FMI soit nettement inférieur aux besoins du Liban, la mise en œuvre d’un programme négocié avec lui permettrait à d’autres institutions financières internationales, comme la Banque mondiale et d’autres créanciers et donateurs bilatéraux, d’apporter un soutien supplémentaire : c’est ce qu’on appelle couramment le rôle catalyseur du FMI.

Un programme du FMI ne serait d’ailleurs pas approuvé par son conseil d’administration du FMI sans l’assurance de la part des donateurs et des créanciers que les besoins de financement extérieur du Liban seront satisfaits. Cette aide supplémentaire est estimée à environ 8 à 10 milliards de dollars sur la durée de quatre ans du programme. Un accord avec le FMI faciliterait également les négociations avec les détenteurs d’eurobonds, qui en ont fait une condition d’une négociation sur la restructuration de la dette publique, comme ils l’ont fait avec d’autres pays auparavant, dans la mesure où cela donnerait des garanties sur la capacité du Liban à honorer les conditions renégociées des contrats d’obligations.

Assistance prioritaire

Le Liban pourrait recevoir un soutien financier supplémentaire du FMI une fois que la mise en œuvre du programme aura commencé. Selon la politique du FMI, les prêts au Liban, actuellement en défaut sur sa dette souveraine, sont limités à des plafonds spécifiques liés à sa quote-part au sein de l’organisation. Selon les limites actuelles, les prêts du FMI aux pays dont la dette publique est jugée insoutenable ne peuvent dépasser 145 % de leur quote-part par an, ou un cumul de 435 % à tout moment. La quote-part du Liban est de 633,5 millions de DTS (droits de tirage spéciaux), soit environ 840 millions de dollars. Cette limite de prêt se traduit par un montant d’environ 1,2 milliard de dollars par an, sous réserve d’un plafond total d’environ 3,6 milliards. Les montants dépassant ces limites sont considérés comme exceptionnels et sont soumis à des critères supplémentaires liés à la nécessité d’un financement plus élevé, à la viabilité de la dette, à la capacité de retrouver l’accès au marché et aux perspectives de réussite du programme. Le FMI peut donc avoir une certaine marge de manœuvre pour augmenter les prêts au Liban, même si la dette de ce pays est jugée insoutenable, dans le cas où il y aurait un besoin de balance des paiements et que le programme est en bonne voie.

Un programme du FMI donnera par ailleurs la priorité aux demandes d’assistance technique gratuite dans plusieurs domaines économiques et financiers. Les demandes d’assistance technique des pays dépassant la capacité du FMI à la fournir, les pays ayant un programme en cours avec le FMI sont en général prioritaires, en particulier pour les mesures qui sont essentielles au succès du programme. Cette aide couvre un large éventail de domaines liés à la banque centrale, aux mesures fiscales et au développement des statistiques, autant d’éléments qui pourraient être très utiles au Liban alors qu’il reconstruit ses institutions publiques.

Si le fait de devoir recourir au FMI est parfois stigmatisé, les avantages qui découlent d’un accord avec cette institution en font une solution difficilement contournable, à condition cependant que le pays devienne vraiment sérieux dans sa volonté de réformes économique et financière.

Par Sami GEADAH

Ancien directeur du Centre d’assistance technique pour le Moyen-Orient, ancien membre du conseil d’administration du Fonds et chercheur associé de l’Institut Issam Farès pour les politiques publiques et les questions internationales (IFI) de l’AUB.

Alors que le Liban continue de faire face aux conséquences économiques et sociales dramatiques de la crise protéiforme qu’il traverse depuis plus de trois ans, l’essentiel des mesures prévues par le plan de redressement adopté par le gouvernement sortant n’a toujours pas vu le jour. Au point que ces difficultés, conjuguées à l’apparente résilience de la population et aux...

commentaires (14)

Ce pays a été transformé en mendiant permanent par sa classe politique défaillante et sans vergogne !

Pandora

12 h 50, le 20 février 2023

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Commentaires (14)

  • Ce pays a été transformé en mendiant permanent par sa classe politique défaillante et sans vergogne !

    Pandora

    12 h 50, le 20 février 2023

  • - AIDE DE TROIS MILLIARDS DE DOLLARS SUR QUATRE ANS. - LA DIASPORA PAR AN PLUS DE MILLIARDS TRANSFERE. - L,AIDE EN PRETS GONFLERA L,EMBONPOINT DES BRIGANDS, - QUI PILLERENT LES SOUS DE TOUT DEPOSITAIRE. = - QU,ONT-ILS D,UTILE FAIT CES MAFIEUX CORROMPUS, - AUTRE QU,ESCROQUERIE, MALHEUR ET DECHEANCE ? - VAURIENS IMBERBES ET ENTURBANNES BARBUS, - ILS SONT TOUS DES SUPPOTS OEUVRANT DE CONNIVENCE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 02, le 20 février 2023

  • Il faut également se rappeler qu’en Octobre 2019, les réserves de la BdL étaient à environ $35 milliard, contre $10 milliard aujourd’hui. Qu’avons nous fait de ces $25 milliards en trois ans? Alors que nous n’espérons recevoir pas plus d’une dizaine de milliard aujourd’hui (si tous les pays s’y mettent)? Quel gâchis.

    Akote De Laplak

    18 h 04, le 19 février 2023

  • Excellent article de Mr Geadah! Quant au “look” de Mr Rigo, il ne reflète pas la fatigue: il est, comme toujours, au naturel, venant juste d’atterrir d’une lointaine planète.

    Akote De Laplak

    13 h 50, le 19 février 2023

  • Le Liban a surtout besoin d’un porte-avions qui nous débarrasse de la mafia au pouvoir et appuie un coup d’Etat de l’armée

    LeRougeEtLeNoir

    13 h 09, le 19 février 2023

  • - QUE LE COMPLOT DONNE DES FRUITS, - JE CROIS QUE PERSONNE N,EN DOUTE. - LE PEUPLE PAYERA LE PRIX. - UN GOLGOTHA SERA SA ROUTE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 21, le 19 février 2023

  • C’est hallucinant de voir ces mêmes pillards réclamer des réformes qui seront soit disant suivies des aides faciles pour se remplir les fouilles encore et encore sans que les occidentaux et avant eux les libanais n’exigent leur départ illico pour pouvoir édifier un état digne de ce nom. Tous les vendus corrompus se précipitent pour prendre la pause au haut de leur tribune pour ânonner des discours et quémander de l’argent qui ne servirait qu’à les engraisser et les maintenir au pouvoir. Ils seraient même capable de vendre le gaz et pétrole avant même leur extraction pour assurer leurs lendemains, des fois que les libanais décident une fois pour toute de se débarrasser d’eux avant l’exploitation des produits. Il faut agir vite chers libanais y a le feu, et notre avenir est toujours entre les mains de ceux qui nous ont pillés, assommés et terrorisés pour pouvoir nous achever et nous remplacer le moment venu. C’est uniquement de cela dont il s’agit.

    Sissi zayyat

    12 h 07, le 19 février 2023

  • ***************** L,EQUITE **************** = - SYSTEME FINANCIER ET SOCIETES BANCAIRES, - A DESSEIN SAUTES PAR COMPLOT RETENTISSANT, - QUI POUR FINIR AVEC BARBUS ET MERCENAIRES, - SACRIFIA, SANS REMORDS, TOUT UN PEUPLE INNOCENT. = - SANS COUVRIR CEUX QUI SONT ET SERVIRENT DE CAUSE, - AUX DISTINCTS COMPLOTEURS ET COMPLICES LOCAUX, - L,EQUITE NOUS COMMANDE ET LE DROIT NOUS IMPOSE, - D,INCRIMINER LES DEUX POUR NOS ATROCES MAUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 48, le 19 février 2023

  • Cher monsieur multi cartes et expert. Premièrement, pour mettre en place un programme de sortie de crise avec l’aide du FMI, il faut avoir des gouvernants honnêtes, compétents, humbles et dévoués à leur pays. Or toute notre classe politique est pourrie jusqu’à l’os, totalement incompétente, orgueilleuse comme une grenouille et dévouée à des pays étrangers de tous les coins de la planète. Donc, pour mettre en place votre programme ambitieux, il faudrait d’abord se débarrasser de toute cette pourriture en lui demandant de rendre l’argent volé au passage. Et c’est là que chaque leader politique brandira le spectre du confessionalisme (avec ou sans armes) pour galvaniser une bande d’imbéciles qui le protègeront. Donc équation insoluble dans la composition actuelle du pays. La solution commencera donc par modifier la géographie et le système politique actuels avant d’aborder l’aspect économique de ce qui jadis s’appelait la république libanaise

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 54, le 19 février 2023

  • Le Hezb et la canaille politichienne du pouvoir veulent d'abord s'assurer de mettre la main directement sur les revenus du gaz off-shore. Apres, ils songeraient peut-etre a repondre aux demandes du FMI seulement, et seulement si ils obtiennent une quote part sous forme de dessous de table. Les Libanais n'ont rien a esperer de cette canaille. Il faut s'en debarasser avant d'envisager quelque reforme que ce soit.

    Michel Trad

    09 h 39, le 19 février 2023

  • L'urgence économique semble être le dernier souci des dirigeants. Même sans président et avec un gouvernement démissionnaire, les soient disant dirigeants auraient dû constituer un "comité de salut public ", ie, un comité d'urgence économique. Il n'est jamais trop tard de le faire. Un tel comité pourrait prendre des décisions qu'un gouvernement qui n'arrive même pas à se réunir. Le drame c'est que l'exécutif actuel n'ose même pas considérer l'idée. Robespierre se morfond dans sa tombe.

    Raed Habib

    08 h 22, le 19 février 2023

  • Est-ce sue le FMI pourrait nous prêter un gouverneur intègre en remplacement du crapuleux de la BDL ?

    Ca va mieux en le disant

    01 h 13, le 19 février 2023

  • Encore des généralités, des vœux pieux, et des vérités que tout le monde connaît déjà, et que vous répétez ad nauseam dans des analyses d’experts depuis le début de cette catastrophe nationale…Et puis, la clique au pouvoir s’en contre-balance, fait la sourde oreille, joue la comédie de l’impuissance, du facteur communautaire et après moi le déluge, tant qu’eux-mêmes et leurs tribus s’en tirent à bon compte…Et puis, on ne veut pas ouvrir la boite de Pandore des comptes à rendre ni des responsabilités collectives…Et vogue la galère: arrêtons de rêver en couleurs: le pays, dans sa structure actuelle n’est simplement plus viable et, soit on rejoint la longue liste des pays faillis, au seuil de la misère et de l’assistance internationale, soit qu’il y ait une révolution sociale même si sanglante et drastique…mais cette dernière solution fut essayée il y’a 3 ans et l’on sait à quoi ça avait abouti…Donc la conclusion s’impose d’elle-même hélas!

    Saliba Nouhad

    00 h 52, le 19 février 2023

  • Ernesto Rigo avait l'air bien fatigué sur les photos... et sans doute pressé de rentrer à la maison avec sa cravate en bataille et son sac prêt à embarquer dans le premier avion ! A l'époque, le gouvernement s'était engagé sur dix réformes dont deux lois, une sur le contrôle des capitaux et l'autre sur le secret bancaire. De réformes, nenni. Du contrôle des capitaux, point trop n'en faut. Et du secret bancaire, voué au Gémonies. Bref, on est pas près de les recevoir nos 3 milliards de dollars ! Mais tout va très bien Madame la Marquise. Tout va très bien.

    Ca va mieux en le disant

    00 h 35, le 19 février 2023

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