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Nos Lecteurs ont la Parole

Le bonheur et ses visages multiples

Quand on pense qu’il y a tous ces « gagne-petit » d’un bonheur au quotidien, qui se contenteraient d’être heureux ou de seulement survivre sans se plaindre au jour le jour !

Et puis encore tous les faux malheureux qui tirent du plaisir à rester dans l’inconfort et le regret. Et tant d’autres encore, les ambitieux, les capitalistes ou les forcenés du bien-être, qui voudraient, eux, en plus de tout ce qu’ils ont, de tout ce qu’ils vont avoir, le bonheur à temps plein !

Quelle dérision, quelle déraison apparente ! Et pourtant, chacun dans sa croyance semble sincère. Chacun d’entre nous a une idée du bonheur, au plus profond de lui, énoncée ouvertement ou cultivée plus secrètement. La recherche du bonheur, même si elle prend les chemins les plus invraisemblables, est quasi universelle. Mais est-ce bien le bonheur tout court que l’on recherche vraiment, celui qui ne s’affiche pas, se reçoit avec des joies simples, des gestes justes, une sérénité évidente ?

Il y a quelques sages qui savent que le bonheur est discret, semblable à la flamme d’une bougie dans une orgie de néons. Que le bonheur se couronne autour de la beauté entrevue et perdue, de l’incertitude présente et tenace, des émerveillements qui se réveillent dans les moments de paix ou qui se bousculent dans l’étonnement d’être vivant. Le bonheur au quotidien, en cadeau dans son cristal de lumière, dans la bonté du soleil, dans la chaleur bienveillante d’un jour qui s’alanguit.

Le bonheur généreux dans la stabilité reçue ou offerte, dans la contemplation inespérée d’un paysage, d’une œuvre d’art, dans les couleurs retrouvées, les vibrations d’une rencontre bien accordée. Le bonheur, tout simplement pétillant, ardent, inépuisable, telle une respiration amplifiée, dans un présent ébloui. Le bonheur non après le malheur, mais en premier, avant toute autre manifestation dans l’éternité d’un instant.

Le bonheur de se réveiller chaque matin, de respirer, d’ouvrir les yeux, de se lever, d’exister, d’être debout, de commencer une journée. Et le reste ? Tout le reste dans un quotidien tourbillonnant qui vient en plus. Être heureux ou malheureux ? Crispé ou détendu ? Affairé ou disponible ? Tout cela en plus. Nous voulons que le bonheur, avec ses visages multiples, ses surprises, soit là en nous, au premier plan telle une évidence, voilé parfois mais toujours présent, côtoyant le chagrin, cohabitant avec l’insuffisance, traversant le monde imparfait des apparences. Le bonheur, source devenue rivière, attendu, exigé, capable d’irriguer toute une existence.

Le bonheur est surtout une attente, et parfois, miraculeusement, il devient une part du réel. Dans l’attente du bonheur, l’injustice n’est pas dans les remous ou les violences impitoyables de la vie, elle est plutôt dans tout ce qui empêche chacun d’entre nous de se relier à son bonheur de vivre. Elle est dans l’incapacité de se sentir vivant, présent au présent. Dans le refus de s’agrandir, par crainte de se perdre ou de se trouver ! Le malentendu qui peut se transformer en injustice est dans la persistance de toutes les autoprivations que nous nous infligeons, par peur de déplaire, par crainte du qu’en-dira-t-on, des jugements de valeur, des croyances erronées qui nous éloignent du chemin quand nous voulons oser le bonheur envers et contre tout, quand nous craignons de le rencontrer, quand nous hésitons à l’accueillir et à nous fondre en lui.

Le bonheur, faut-il le rappeler, c’est également une petite lumière au plus sombre de soi. Petite veilleuse fidèle, patiente et inaltérable, patiente mais qu’il est bon de raviver sans cesse jour après jour, qu’il est bon de tenir à l’abri des vents, de protéger des tempêtes du chagrin ou de la pluie des désespoirs. Une petite lumière qu’il appartient à chacun de préserver de la malveillance, des pensées négatives, des poisons du ressentiment, de l’inattention des habitudes.

Le bonheur, une toute petite flamme scintillant en plein jour, courageuse, précieuse, magique et mystérieuse au cœur de chacun. Une lumière sertie dans les voiles bleutés de la tendresse, en ses murmures tissés de bienveillance et d’acceptation.

Le bonheur, ah ! Le bonheur...

Il ne s’agit pas d’être angélique devant le bonheur, mais au contraire suffisamment lucide et ouvert, pour accepter de le savourer sans retenue, sans culpabilité, sans vouloir le capter ou le garder à jamais « que pour soi ». Comme si nous saisissions une poignée de sable et que nous voulions la garder à tout prix en serrant très fort la main. Car alors le sable s’écoule et nous perdons jusqu’à sa sensation, ne gardant que quelques grains qui ne sont plus du sable, seulement la trace de notre impuissance.

Le bonheur n’est pas un état permanent, mais une vibration subtile qui colore, dynamise, embellit un instant et l’agrandit loin très loin jusqu’aux rêves les plus fous.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique Courrier n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Quand on pense qu’il y a tous ces « gagne-petit » d’un bonheur au quotidien, qui se contenteraient d’être heureux ou de seulement survivre sans se plaindre au jour le jour !Et puis encore tous les faux malheureux qui tirent du plaisir à rester dans l’inconfort et le regret. Et tant d’autres encore, les ambitieux, les capitalistes ou les forcenés du bien-être, qui...

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