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Nos Lecteurs ont la Parole

Le scrutin de mai 2022 dans la Békaa III : victoire du tandem chiite et ancrage des FL

Les élections législatives du 15 mai 2022 ont représenté une échéance importante pour la classe politique libanaise tout entière, mais elles ont été une étape particulièrement cruciale pour le parti des Forces libanaises (FL) : celui-ci a confirmé son ancrage sur le territoire libanais, les FL ont obtenu un bloc de 19 sièges – 20 avec le siège remporté par le président du PNL Camille Dory Chamoun à Baabda – contre 15 en 2018, et récupéré des électeurs déçus par le mandat aouniste en plus des « votes utiles » aux formations issues de la mouvance du 17 octobre.

La circonscription de Baalbeck-Hermel représente un enjeu particulier pour le parti, ce fief du Hezbollah comporte un siège maronite, remporté par le candidat des FL Antoine Habchi en 2018 et en 2022. Néanmoins, la réélection du député sortant n’était pas acquise en raison de l’absence d’une alliance des FL avec le courant du Futur et des difficultés des FL à composer une liste avec des figures chiites influentes dans la région.

Si les élections n’ont laissé place qu’à peu de suspense dans les régions sous l’influence du tandem Amal-Hezbollah, des percées de listes opposées au tandem ont néanmoins eu lieu : les FL ont à nouveau gagné leur pari en remportant le siège maronite de la Békaa III, mais, plus étonnant, la liste Ensemble vers le changement, réunissant des personnalités issues des mouvements de contestation, a gagné deux sièges dans la circonscription du Liban-Sud III.

Le siège maronite de la circonscription de Baalbeck-Hermel (Békaa III) représente un enjeu particulier pour les FL. D’une part, parce qu’il se situe dans une circonscription largement dominée par l’hégémonie du tandem chiite. D’autre part, la localité de Deir el-Ahmar, historiquement acquise aux FL et marginalisée durant l’occupation syrienne, a longtemps été représentée au Parlement par des figures dites prosyriennes, notamment Nader Succar et Émile Rahmé. La victoire du candidat FL a ainsi représenté une étape importante pour le parti en 2018. Ce double enjeu, à la fois symbolique et stratégique, restait de mise en mai 2022.

La localité de Deir el-Ahmar, située à la bordure de la plaine de la Békaa, constitue avec quelques petits villages avoisinants une enclave maronite au sein d’un environnement majoritairement chiite. Le village est administrativement rattaché au mohafazat de Baalbeck-Hermel. Cette région n’a été intégrée que tardivement au Liban moderne et est considérée comme délaissée par l’État libanais. Les habitants de ce village constituent un électorat rural, plutôt modeste, assez conservateur et en grande partie acquis aux FL.

Déjà en 2010, lors des élections municipales, les électeurs de la municipalité avaient largement opté pour la liste des FL. Les élections législatives ont confirmé cette tendance en 2018, puis en 2022. La marginalisation économique de cette localité pour son positionnement politique durant l’occupation syrienne du Liban est largement utilisée dans le discours des FL pour justifier leur combat : « L’État est absent de cette région depuis plus d’un demi-siècle. Ses habitants ont été punis pour leur appartenance au camp souverainiste et patriote », avait notamment déclaré la députée Sethrida Geagea dans le passé (L’Orient-Le Jour, 21 octobre 2015).

Les Forces libanaises avaient annoncé deux candidats dans la circonscription de la Békaa III : le député sortant Antoine Habchi pour le siège maronite et le candidat indépendant Élie Bitar pour le siège grec-catholique. Le retrait du courant du Futur et de son leader, Saad Hariri, de la vie politique du pays a fortement compliqué la tâche aux FL lors de ces élections. Avec 17 000 voix préférentielles obtenues pour Antoine Habchi, les FL semblent avoir réussi leur pari. Quant aux candidats issus de la société civile, éparpillés sur trois différentes listes, ils avaient très peu de chances de réaliser une percée dans cette circonscription.

Du point de vue national, les FL apparaissent renforcées par le scrutin. Néanmoins, l’élargissement de leur électorat au-delà de celui leur étant traditionnellement acquis reste un enjeu pour la direction du parti. Les agissements de certains partisans ou sympathisants des FL contrastent fortement avec l’image que le parti cherche à renforcer, comme en témoignent récemment certains actes ou incidents.

Si les FL sont manifestement sorties renforcées de ces élections, leur positionnement reste encore flou concernant certains sujets politiques et sociétaux, le parti se retrouvant coincé entre d’une part les mouvements issus de la révolution du 17 octobre, le parti Kataëb ayant entamé de profondes réformes ou encore d’autres ; et d’autre part une partie de sa base militante sensible aux discours confessionnels et radicalement opposée à tout compromis avec le Hezbollah.

Victor MAES

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Les élections législatives du 15 mai 2022 ont représenté une échéance importante pour la classe politique libanaise tout entière, mais elles ont été une étape particulièrement cruciale pour le parti des Forces libanaises (FL) : celui-ci a confirmé son ancrage sur le territoire libanais, les FL ont obtenu un bloc de 19 sièges – 20 avec le siège remporté par le président du...
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