L’abominable roulette russe

L’effondrement de l’Union soviétique en 1991 aurait pu être salvateur pour la Russie. Cette nation illustre aurait pu rêver grand surtout qu’elle possède des potentiels humains impressionnants et des ressources naturelles considérables. Mais le cruel destin en a décidé autrement au XXIe siècle lorsque Vladimir Poutine prend les rênes du pouvoir de façon peu orthodoxe. Ce nostalgique de la puissance de l’ex-Union soviétique décide d’aller allègrement en guerre, que ce soit en Tchétchénie, en Géorgie, en Crimée ou en Syrie.

Mais c’est surtout en s’aventurant imprudemment en Ukraine que Poutine a commis sa plus grande erreur. Il a surestimé la capacité de son armée à accomplir des victoires rapides et faciles. Il a surtout sous-estimé la volonté des Ukrainiens à se défendre âprement. Au vu de ce qui se passe actuellement sur le terrain, Poutine devrait vraisemblablement maintenir plus de 150 000 soldats russes en Ukraine pour une période indéterminée. Les risques d’enlisement de l’armée russe sont énormes. Les Ukrainiens continueront à se battre farouchement, s’attirant ainsi les foudres de plus en plus virulentes de Poutine. Les conséquences de cette guerre sanglante s’annoncent terrifiantes avec des morts et des blessés à la pelle, sans oublier la destruction systématique des villes et le déplacement chaotique des populations. C’est du jamais-vu en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

De surcroît, la Russie se dirige vers un naufrage économique titanesque suite aux sanctions drastiques imposées par les États-Unis, l’Union européenne ainsi que d’autres pays, dont notamment l’Australie et la Suisse. Peut-être que Poutine mise sur la Chine pour lui offrir une bouée de sauvetage. En effet, la Chine est la deuxième plus grande économie du monde. En outre, elle possède une frontière commune avec la Russie.

Toutefois, la Chine ne pourra pas vraiment sauver l’économie russe. D’après Paul Krugman, détenteur du prix Nobel d’économie, la Chine est profondément intégrée à l’économie mondiale. Cela signifie que de nombreuses entreprises chinoises hésiteraient à traiter avec la Russie de Poutine par crainte de représailles foudroyantes de leurs partenaires occidentaux. De plus, l’économie chinoise est dix fois plus importante que l’économie russe. Dans cette alliance d’inégaux, la Russie ferait figure de Petit Poucet face au géant chinois. Ce sentiment d’infériorité n’est certainement pas du goût de Poutine, mégalomane obsédé par la restauration de la puissance russe.

Il est fort probable que l’issue de la guerre d’Ukraine serait l’humiliation de Poutine. Comme Nelson Mandela l’a déclaré un jour : « Il n’y a guère de plus dangereux que celui qui a été humilié. » Ce péril est d’autant plus pernicieux que Poutine est le genre de personnage narcissique qui ne peut tolérer le moindre camouflet. C’est dans cette logique de prudence que les pays occidentaux font des acrobaties d’équilibristes pour aider l’Ukraine tout en évitant une confrontation directe avec Poutine.

Cependant, s’il est acculé au pied du mur, Poutine pourrait recourir aux armes biologiques, voire aux armes nucléaires tactiques. Ce serait son recours ultime pour s’extirper du bourbier poisseux qu’il s’est lui-même infligé. En somme, il suffit d’une étincelle pour embraser le monde. Les conséquences apocalyptiques de cette abominable roulette russe sont indicibles.

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