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Nos Lecteurs ont la Parole

Rétrospective historique du parti de Dieu

Rétrospective historique du parti de Dieu

L’histoire du parti de Dieu débute lorsque la révolution islamique d’Iran répand un vent de changement dans la région du Moyen-Orient. L’ambition des mollahs perses est de faire de Téhéran un centre de gravité des mouvements chiites de la région. Le pays du Cèdre, avec une population chiite longtemps marginalisée, est un terreau fertile pour l’expansion de l’idéologie de l’ayatollah Rouhollah Khomeyni, le guide suprême de la République islamique d’Iran. Le moment est d’autant plus propice que le charismatique leader de la communauté chiite du Liban, l’imam Moussa Sadr, est porté disparu lors de son voyage en Libye en 1978. Sous le prétexte d’apporter un soutien logistique à la résistance islamique contre Israël, les gardiens de la révolution iranienne s’implantent sournoisement au Liban, surtout dans la région de la Békaa. Ils ont pour mission d’endoctriner la mouvance islamiste chiite pour en faire des militants dont l’allégeance au guide suprême de la République islamique est indéfectible.

Le parti de Dieu voit officiellement le jour en 1985. Cependant, il opère dans la clandestinité. Sa mission est principalement militaire, en l’occurrence la confrontation avec Israël, non seulement pour libérer le territoire libanais des troupes de Tsahal, mais pour aussi éradiquer Israël de la carte du monde. En effet, Israël représente l’ennemi éternel et juré de la mouvance chiite. Le commandement du parti de Dieu revient au guide suprême (à l’époque l’ayatollah Khomeyni) en tant qu’héritier du Prophète et des imams (le waliy al-faqih). Cette allégeance est d’ailleurs mentionnée dans la charte originale du parti.

Le principal rival du parti de Dieu est le mouvement Amal dont de nombreux cadres ont fait défection pour intégrer la milice pro-iranienne. Après des années de conflits sanglants entre les deux formations chiites, la hache de guerre est finalement enterrée grâce au parrainage de Téhéran et de Damas. La solution se fait par un partage des tâches : le parti de Dieu prend le monopole de la résistance militaire, alors qu’Amal prend le monopole de la représentation chiite au sein des institutions étatiques. À cette même époque, suite à un débat houleux, le parti de Dieu prend alors une décision majeure, celle de participer aux élections législatives de 1992. Un courant sécessionniste s’opère au sein du parti dont le chef de file est le cheikh Sobhi Toufayli, le premier secrétaire général du parti. Cependant, l’influence de cette force séparatiste est insignifiante.

En février 1992, à quelques mois des élections législatives, le secrétaire général du parti (Abbas Moussaoui) est liquidé par un raid israélien. Cependant, le parti de Dieu fait une entrée fracassante au Parlement en raflant 12 sièges. Sous l’impulsion de son nouveau leader Hassan Nasrallah, le parti de Dieu multiplie ses opérations contre l’État hébreu dans le sud du pays. La tension ne cesse de monter à la frontière jusqu’au déclenchement de l’opération israélienne « Raisins de la colère » en avril 1996. Durant l’année 2000, les soldats israéliens se retirent au-delà de la zone de sécurité située au Sud-Liban. De même, sa milice libanaise alliée, l’Armée du Liban-Sud, finit par s’effondrer suite aux coups de boutoir du parti de Dieu.

Rafic Hariri devient Premier ministre de 2000 à 2004. Pour ce pro-occidental, la priorité absolue est l’essor socio-économique du Liban, et non la guerre. L’instabilité à la frontière sud du pays le préoccupe donc fortement. À l’été 2004, les présidents Bush et Chirac (l’ami intime de Hariri) saisissent le Conseil de sécurité de l’ONU pour dénoncer de façon virulente le rôle toxique de la Syrie au Liban. Par la résolution 1559 du 2 septembre 2004, le Conseil de sécurité vote, entre autres, le retrait de l’armée syrienne ainsi que le désarmement des milices (dont le parti de Dieu). Cependant, le parti de Dieu est tout-puissant. Outre une imposante structure militaire, il possède des places fortifiées, des services sophistiqués de renseignements et de contre-espionnage, des infrastructures de téléphone privées, des réseaux de recrutement, des chaînes logistiques régionales, sans oublier les services sociaux, comme les écoles, les hôpitaux, les coopératives, etc.

Le 14 février 2005, Rafic Hariri (alors ex-Premier ministre) est assassiné de façon spectaculaire à Beyrouth. Les Américains et les Français demandent à la Syrie de quitter illico le Liban sans conditions ni retard. Les troupes syriennes quittent alors prestement le Liban. Quant à l’ONU, elle envoie une commission d’enquête afin d’élucider le mode opérationnel de l’assassinat de Rafic Hariri. Il s’ensuit une série de crimes et d’attentats contre des personnalités politiques influentes connues pour leurs opinions hostiles au parti de Dieu et au régime syrien.

Le 12 juillet 2006, la guerre éclate entre Israël et le parti de Dieu. Le Conseil de sécurité de l’ONU vote le 12 août 2006 la résolution 1701 qui met fin au conflit et décide l’envoi d’une nouvelle force de la Finul au Sud-Liban aux côtés de l’armée libanaise. Dans la foulée de cette guerre, des enquêtes sont menées afin de déterminer les commanditaires de l’assassinat de Rafic Hariri. Le second mandat du président Émile Lahoud arrive à terme en novembre 2007. Le Parlement n’arrive pas élire à la majorité absolue son successeur. Le Liban reste six mois sans président. Le 7 mai 2008, les partisans du parti de Dieu font une démonstration de force dans les rues de Beyrouth. Les hostilités, impliquant chiites, sunnites et druzes, font plus de 80 morts. Elles prennent fin avec la signature de l’accord de Doha (au Qatar) le 21 mai 2008. L’accord prévoit l’élection du général Michel Sleiman à la présidence et la formation d’un gouvernement d’union nationale.

Le Tribunal spécial pour le Liban s’ouvre aux Pays-Bas le 1er mars 2009. Il est chargé par l’ONU (résolution 1664) de juger les responsables des attentats commis au Liban, dont ceux de l’attentat commis contre Rafic Hariri. Cette même année, le parti de Dieu redéfinit sa vision et sa stratégie pour les années à venir. Fait marquant, le parti lit officiellement les 32 pages du document dans le cadre d’une cérémonie officielle. Le parti reconnaît officiellement le système politique en vigueur au Liban ainsi que sa diversité religieuse. Par cette même logique, le parti ne réclame plus l’établissement d’un pouvoir islamique ni son allégeance inconditionnelle à la wilayet el-faqih, appliquée en Iran. Cependant, il ne renonce pas à la résistance contre Israël ni à prôner une identité idéologiquement antioccidentale, et surtout antiaméricaine.

De mai 2014 à octobre 2016, les députés proches du 8 Mars (dont le parti de Dieu est le fer de lance) refusent 45 fois de se rendre au Parlement pour élire un successeur au président de la République Michel Sleiman. Ils voudraient empêcher l’établissement du quorum des deux tiers (86 députés sur 128) qui permettrait l’élection d’un président non conforme aux souhaits du parti de Dieu. Finalement, après deux ans d’attente agonisante et fort préjudiciable, Michel Aoun est élu président de la République le 31 octobre 2016. Cette élection marque une signifiante avancée pour le parti de Dieu qui a âprement soutenu la candidature de Aoun, son unique candidat à la présidence. Elle concrétise la suprématie du parti chiite sur les institutions-clés du pays. Le 18 août 2020, le Tribunal spécial pour le Liban déclare Salim Ayache (membre du parti de Dieu) coupable d’acte terroriste à l’encontre de Rafic Hariri, sans pour autant impliquer les dirigeants du parti de Dieu, faute de preuves suffisantes.

De nos jours, le combat du parti de Dieu ne se limite plus sur la scène locale contre Israël, bien que ce pays demeure sa bête noire. Il englobe aussi les conflits régionaux, que ce soit en Syrie, au Yémen ou ailleurs. La frénésie du parti est galvanisée par l’idéologie du martyre. En effet, le parti chiite se considère comme le représentant de Dieu sur terre. Sa mission est donc divine par excellence. C’est la raison pour laquelle il se pose en juge suprême et infaillible pour délimiter le bien du mal. Dans la même veine, il encense ses alliés tout en diabolisant ses rivaux.

Au final, le parti de Dieu est déterminé à mener son combat divin jusqu’à la victoire finale, même si cela signifie l’écroulement intégral du Liban ainsi que la déstabilisation de la région, voire du monde.


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L’histoire du parti de Dieu débute lorsque la révolution islamique d’Iran répand un vent de changement dans la région du Moyen-Orient. L’ambition des mollahs perses est de faire de Téhéran un centre de gravité des mouvements chiites de la région. Le pays du Cèdre, avec une population chiite longtemps marginalisée, est un terreau fertile pour l’expansion de l’idéologie de...
commentaires (2)

Le Hezbollah ou le parti du diable n’est pas libanais …

Eleni Caridopoulou

18 h 27, le 02 mars 2022

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Commentaires (2)

  • Le Hezbollah ou le parti du diable n’est pas libanais …

    Eleni Caridopoulou

    18 h 27, le 02 mars 2022

  • avec toute ma sympathie pour mr. rebeiz je dois critiquer son article pour avoir omit une partie ESSENTIELLE de l'arrivee de Hezb au vrai et a l'ultime pouvoir au Liban : les multiples assassinats qu'il avait commis contre les cadres de la VRAIE RESISTANCE LIBANAISE contre Israel, qui lui avait permis de s'introniser LE SEUL RESISTANT LIBANAIS contre israel ?

    Gaby SIOUFI

    16 h 21, le 02 mars 2022

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