Qualifié de « magicien de la finance » pendant des années, avant l’effondrement économique du pays depuis plus de deux ans, le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, a décidément plus d’un tour dans son sac. Dans le but de continuer de stabiliser les fluctuations erratiques du taux de change sur le marché parallèle entre la livre libanaise et le dollar, la BDL a récemment prolongé les effets de la circulaire n° 161 jusqu’à fin février.
Ce texte, publié le 16 décembre dernier, permet à la BDL d’octroyer des dollars aux banques afin qu’elles les vendent à leurs clients dotés de comptes en livres selon le taux de change de la plateforme Sayrafa de la veille (21 200 livres hier). Concrètement, tous les retraits doivent s’effectuer en dollars, à l’exception des clients qui préfèrent malgré tout retirer leur argent en livres et qui doivent par conséquent en faire une demande par écrit à leur banque.
Un état de fait que peu de déposants avaient compris, les banques ne communiquant pas à ce sujet, selon certains témoignages recueillis par L’Orient-Le Jour, jusqu’à hier lorsque le taux de change sur le marché parallèle est passé sous celui de Sayrafa, soit sous la barre de 20 000 livres pour un dollar. Par exemple, pour un montant d’un million de livres, le client avait droit hier à retirer 46,5 dollars au taux du 31 janvier, la veille, soit 21 500 livres pour un dollar. Or voulant les échanger ensuite sur le marché parallèle, il obtiendrait 921 000 livres au taux de 19 800 livres le dollar, selon le taux du jour, causant ainsi une perte de près de 80 000 livres sur son retrait.
Pour compliquer encore plus les choses, certaines banques n’utilisent pas le taux de la veille, selon certains témoignages, mais celui, plus élevé, datant de plusieurs jours, celles-ci gagnant alors au change. Une situation qui vient s’ajouter aux restrictions bancaires que les clients des banques subissent déjà depuis le début de la crise. Des manifestants ont d’ailleurs organisé hier des sit-in, notamment devant plusieurs banques à Tripoli (Liban-Nord), pour protester contre leur mise en œuvre de ce mécanisme. En cours de journée, alors que plusieurs clients se plaignaient que les distributeurs de billets étaient à court de livres, le gouverneur de la BDL a indiqué, via un communiqué, que les banques ayant besoin de liquidités en livres peuvent en obtenir en vendant leurs dollars au taux de Sayrafa.
L’une des conséquences apparentes de l’application de cette circulaire est donc la reprise de contrôle relative de la banque centrale sur le taux dollar/livre et le marché des changes. En intervenant de cette façon, la BDL a réussi à faire baisser le niveau de la monnaie en circulation sur le marché de près de 4 000 milliards de livres, tandis que ses réserves en devises ont fondu de près de 400 millions de dollars en à peine 15 jours, selon son dernier bilan bimensuel.
Parallèlement, depuis hier, la BDL a indiqué que le taux Sayrafa sera désormais adopté pour les retraits en livres au niveau des distributeurs automatiques et des paiements effectués avec des cartes bancaires en dollars frais (ceux qui ne sont pas soumis aux restrictions bancaires sur les dépôts en devises) via les terminaux de paiements. Dans les faits, la parité officielle de 1 507,5 livres ne s’applique donc plus dans ces deux cas. Autrement dit, l’addition au restaurant peut désormais être payée en dollars en convertissant le montant en livres au taux fixé par Sayrafa.
commentaires (7)
Comme c'est bien dit: ces CRETINS de liberateurs: mais surtout TRAITRES au pays, ce pauvre Liban. Raymond Saidah
RAYMOND SAIDAH
20 h 18, le 02 février 2022