Pour l’Arabie saoudite, le Liban est redevenu un sujet. Alors que la plupart des observateurs n’étaient pas très optimistes quant aux effets de la rencontre entre le président français Emmanuel Macron et le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane, à Djeddah le 4 décembre, il semble que celle-ci a au contraire convaincu les Saoudiens de remettre le pied à l’étrier. À des conditions précises, toutefois, et sans pour autant adopter une politique moins agressive vis-à-vis du Hezbollah. « La visite de Macron a fait son effet », se félicite un diplomate français, sous le couvert de l’anonymat. Au cours de la discussion, Emmanuel Macron aurait réussi à convaincre son interlocuteur de la nécessité d’empêcher l’effondrement total du Liban, arguant notamment que celui-ci pourrait avoir des répercussions sur le Golfe. L’Arabie saoudite misait pourtant ces derniers mois sur le fait que la détérioration de la situation dans le pays allait affaiblir le Hezbollah et pousser le reste de la population à se retourner contre lui. Mais Riyad semble prêt à revoir une partie de ses calculs, constatant peut-être que la formation chiite s’en sort mieux que les autres en période de crise, et que son retrait contribue aussi à faire son jeu. De sources concordantes, L’Orient-Le Jour a appris que le président français n’est toutefois pas parvenu à obtenir de MBS une promesse d’aides directes aux forces de sécurité et à l’armée, dont la stabilité est une priorité pour les Occidentaux.
L’Arabie saoudite reste prudente et n’est pas prête à se réinvestir au Liban sans avoir au préalable inversé le rapport de force. Mais elle est sensible à l’argument de la France et d’autres pays qui tirent dans la même direction. Peu avant le déplacement du locataire de l’Élysée, une rencontre a été organisée entre des membres de l’ambassade britannique à Beyrouth et des responsables saoudiens dans le même objectif de convaincre les Saoudiens de modifier leur position. « Vous avez de nombreux alliés au Liban, ils doivent être appuyés, pas abandonnés », ont dit les diplomates britanniques à leurs homologues saoudiens, d’après des sources concordantes ayant assisté à la réunion. Celle-ci a été suivie d’un entretien entre l’ambassadeur saoudien au Liban, Walid Boukhari, qui se trouve à Riyad depuis la quasi-rupture des relations diplomatiques avec le Liban le 29 octobre dernier, et l’ambassadeur britannique en Arabie saoudite. Les deux parties sont convenues de la nécessité de porter intérêt au dossier libanais. Riyad est notamment inquiet du fait que son retrait puisse permettre au Hezbollah d’effectuer une percée dans les rangs de la communauté sunnite qui, bien que majoritairement hostile au parti chiite, pourrait se retrouver sans leadership affirmé si le chef du courant du Futur Saad Hariri décide de ne pas se présenter aux élections législatives de 2022. Les Saoudiens comptent aborder cette question avec plusieurs responsables sunnites ainsi qu’avec leurs autres alliés sur la scène libanaise. Le royaume a récemment reçu Melhem Riachi (Forces libanaises) et Waël Bou Faour (Parti socialiste progressiste) dans ce qui ressemble à une volonté de poser les premiers jalons de sa stratégie au Liban. Selon une source diplomatique saoudienne, d’autres invitations à des personnalités sunnites, chrétiennes et même chiites indépendantes pourraient suivre.
Avec Le Caire à mi-chemin
C’est dans cette même dynamique que l’Arabie s’évertue à construire un front diplomatique uni avec les autres pays arabes sur la question libanaise. Lors du sommet de coopération du Golfe qui s’est tenu mardi à Djeddah, le royaume a rallié tous les autres membres à sa vision sur ce dossier. Le communiqué final a insisté sur le respect de la souveraineté, en désignant le Hezbollah comme une organisation terroriste qui déstabilise la sécurité et la stabilité des pays arabes. Non seulement MBS a réussi à entraîner le Qatar et Oman dans cette direction – alors que les deux pays ont des relations moins hostiles avec l’Iran, le parrain du Hezbollah–, mais la déclaration a en plus été complétée par une position claire selon laquelle toute agression contre l’un des États du Golfe est considérée comme une attaque contre tous.
En plus des pays de la péninsule Arabique, l’Arabie saoudite veut aussi obtenir le soutien de l’Égypte. Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Choukri, s’est rendu à Riyad la semaine dernière. « Le Liban était à l’ordre du jour », assure un diplomate arabe, qui a requis l’anonymat. Profitant du retrait saoudien, l’Égypte s’est particulièrement investie sur la scène libanaise au cours de ces derniers mois, tentant de se placer comme le nouveau parrain de la communauté sunnite. Le Caire avait jusqu’ici une politique beaucoup moins frontale que celle de Riyad, en témoigne sa volonté de fournir du gaz au Liban via la Syrie de Bachar el-Assad, allié du Hezbollah. Malgré son hostilité à l’Iran, l’Égypte n’en fait pas son principal ennemi au Moyen-Orient et a pour priorité au Liban d’empêcher l’effondrement des institutions, et en particulier de l’armée. Mais les deux pays ont récemment rapproché leurs positions. « L’Égypte est prête à intensifier sa coordination avec l’Arabie sur la question iranienne, et plus particulièrement sur le dossier libanais », dit le diplomate arabe précité.
Les deux pays se retrouveraient à mi-chemin : Riyad est d’accord pour se réinvestir à condition de mettre en avant le sujet Hezbollah. Pour le royaume, la carte égyptienne est doublement importante, sur le plan symbolique et diplomatique, dans l’esprit notamment d’éloigner Damas de Téhéran sur la question libanaise, dans le cas où la Syrie serait tentée de se réinvestir au Liban. « L’Arabie souhaite être plus présente au Liban, mais elle a besoin pour cela du soutien des autres acteurs », résume un responsable du Golfe. Selon lui, Riyad va désormais coordonner son action avec Paris et Le Caire avant de définir les prochaines étapes, tout en refusant qu’un autre pays du Golfe s’investisse sur la scène libanaise avant qu’elle n’y fasse son retour.
commentaires (12)
IL Y A BIEN UN APRES MACRON. IL SERA PIRE QUE L,AVANT MACRON. C,ETAIENT DES MESURES ECONOMIQUES. DES LORS SE SONT DES CONDITIONS POLITIQUES AUSSI. L,ELIMINATION DES MERCENAIRES IRANIENS. LES ENTURBANES LES PREMIERS.
JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA
00 h 32, le 18 décembre 2021