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Économie - Rapport

Secteur touristique au Liban : l’effondrement en 2020 encore plus dramatique que prévu

Les revenus nets du secteur n’atteignent même pas 700 millions de dollars sur l’ensemble de l’exercice.

Secteur touristique au Liban : l’effondrement en 2020 encore plus dramatique que prévu

Des touristes devant le château de Beaufort, au Liban-sud. Photo M.A.

Entre la crise, la pandémie de Covid-19 et l’effroyable carnage provoqué par la double explosion survenue au port de Beyrouth, 2020 a définitivement gagné ses jalons d’année noire pour l’ensemble des composantes de la société libanaise et de son économie.

La période a été particulièrement destructrice pour le secteur touristique, un des principaux pourvoyeurs de devises du pays, et dont les revenus se sont effondrés dans des proportions encore plus sévères qu’attendu, comme l’ont confirmé les derniers chiffres de la Banque du Liban (BDL) compilés par le Lebanon this Week de Byblos Bank.

Selon ces données récemment publiées, les revenus du tourisme n’ont atteint que 2,4 milliards de dollars, soit une chute spectaculaire de 72,6 %, qui est plus prononcée qu’au premier semestre (près de 68 % pour 1,3 milliard, toujours selon la BDL). Le bilan de l’année est, lui, inférieur aux 3,6 milliards de dollars (calculé au taux de change officiel de 1 507,5 livres pour un dollar) anticipés au printemps par le Conseil mondial du voyage et du tourisme (World Travel and Tourism Council-WTTC).

« Il n’y a pas eu de rebond, même minime, au second semestre », regrette Jean Abboud, le président de l’Association des agences de voyages et de tourisme au Liban (Attal). Outre les événements liés à la crise ou à la catastrophe du 4 août, il rappelle également que l’Aéroport international de Beyrouth a fonctionné au quart de ses capacités pendant longtemps en raison des restrictions sanitaires qui n’ont été que progressivement levées.

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Le président du syndicat des restaurants, cafés, boîtes de nuit et pâtisseries, Tony Rami, acquiesce. « Le Liban est confronté à de graves difficultés économiques, dont les origines remontent aux années précédentes mais qui se sont aggravées au cours des derniers mois. La situation ne s’est guère améliorée depuis et les exploitants sont aujourd’hui à peine capables d’honorer le minimum de leurs engagements envers leurs employés et leurs fournisseurs », dénonce-t-il.

Pour donner un ordre d’idées encore plus clair de l’ampleur de la chute, le tourisme libanais avait généré 8,6 milliards de dollars en 2019, année record pour le secteur et dernier exercice avant la crise que traverse le pays depuis. À noter que la BDL ne communique pas la proportion de transactions en livres dans les totaux qu’elle relaye, alors que la monnaie nationale s’est effondrée et que la parité officielle fixée à 1507,5 livres pour un dollar depuis 1997 n’est plus utilisée que pour certaines transactions spécifiques.


Des chiffres et des performances en berne

Les 2,4 milliards de dollars engrangés par le tourisme ont pesé pour 10,4 % du PIB pour ce même exercice, ce qui reflète l’ampleur de l’effondrement de l’économie (selon nos calculs, le PIB n’a donc atteint que 23 milliards de dollars en 2020, soit moins de la moitié de son niveau d’avant la crise).

Pour ne rien arranger, les 2,4 milliards de dollars de revenus doivent même être mitigés par le fait que dans le même temps, pas moins de 1,7 milliard de dollars ont été dépensés par les touristes libanais à l’étranger sur la même année. Un total qui, même s’il affiche lui aussi une baisse drastique de l’ordre de 73,6 %, réduit à 682,2 millions de dollars le total des revenus nets du tourisme sur la période étudiée. Ces résultats confirment ainsi le statut de 2020 comme la pire année pour le secteur depuis que la BDL a commencé à publier ces revenus dans ce format. Sans surprise, les revenus nets du tourisme sont largement inférieurs aux environ 2,3 milliards de dollars annuels dégagés en moyenne par le secteur entre 2002 et 2020.

L’ampleur de la baisse est ainsi palpable sur les performances de chacune des filières qui composent le secteur touristique du pays du Cèdre.

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Pour les agences de voyages, la baisse de revenus est par exemple de l’ordre de « 85 % » en 2020 pour un total inférieur à 110 millions de dollars en titres de voyage et autres prestations vendues, selon Jean Abboud. La tendance ne devrait pas vraiment changer en 2021, selon les échos des coulisses de la filière, notamment en raison de l’impact des restrictions bancaires sur le pouvoir d’achat des Libanais, les agences devant encaisser les prix des prestations vendues en dollars, à la demande de l’Association internationale du transport aérien (IATA).

Au printemps dernier, Ernst & Young (E&Y) avait révélé que le taux d’occupation des hôtels 4 et 5 étoiles de la capitale avait atteint 18 % sur ce même exercice, un niveau nettement plus bas que ceux des quatorze autres capitales de la région que le cabinet évalue et qui ont pourtant elles aussi été affectées par les restrictions adoptées par les pays en réaction au Covid-19. L’année a en tout cas été fatale pour certains prestigieux établissements beyrouthins, comme l’hôtel Bristol qui a fermé ses portes en avril 2020. L’impact de la crise a cependant été légèrement mitigé par le développement du tourisme local – mais plus en termes de fréquentation que de revenus, compte tenu de l’effondrement continu de la livre depuis le second semestre de 2019.

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Au niveau de la restauration, la filière déplore la « fermeture de 3 500 établissements entre début 2019 et fin 2020 » toutes catégories confondues, déplore Tony Rami. Les 5 000 restants pourraient diminuer de moitié d’ici à la fin de l’année, craint-il. Là aussi, les signes permettant d’espérer un rebond en 2021 ne sont que trop rares. Tony Rami rappelle en effet que les acteurs de la filière, qui importent une partie non négligeable des produits proposés à leurs clients, ont été pénalisés aussi bien par l’effondrement de la livre que par la crise du carburant qui s’est manifestée en 2021 avec la levée des subventions sur cette catégorie de produits. Un malus amplifié par le fait qu’ils sont contraints d’adopter des prix en livres inférieurs à ceux du marché noir afin de maintenir un certain roulement (9 000 à 11 000 livres pour un dollar hier, alors que le taux était de 17 500 livres hier sur le marché parallèle).

Entre la crise, la pandémie de Covid-19 et l’effroyable carnage provoqué par la double explosion survenue au port de Beyrouth, 2020 a définitivement gagné ses jalons d’année noire pour l’ensemble des composantes de la société libanaise et de son économie.La période a été particulièrement destructrice pour le secteur touristique, un des principaux pourvoyeurs de devises du pays,...

commentaires (3)

COVID-19 en etant la principale raison, quelle serait la position du Liban compare aux pertes du secteur du reste du monde ?

Gaby SIOUFI

10 h 51, le 06 octobre 2021

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Commentaires (3)

  • COVID-19 en etant la principale raison, quelle serait la position du Liban compare aux pertes du secteur du reste du monde ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 51, le 06 octobre 2021

  • Mais "ils" détestent l'industrie touristique. Ca fait pas bien. Et bien maintenant c'est leur chance, "ils" n'ont plus qu'a transformer le Liban en pays 'productif', 'agricole' et 'industriel'... Comme dans les images de leurs bouquins... Bon courage!

    Mago1

    01 h 59, le 06 octobre 2021

  • je retournerai au Liban quand tous les mafieux quittent le Liban : pauvre pays tous ceux qui croient que les élections changeront quelque chose ils se trompent

    barada youssef

    00 h 39, le 06 octobre 2021

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