À l’instar de Hassan Nasrallah, Nagib Mikati a le regard tourné vers l’Est. Pas en direction de l’Iran ou de la Chine, mais plutôt du royaume saoudien, cet ex-allié du Liban dont le retour paraît indispensable pour redresser le pays comme pour conforter le pouvoir du nouveau Premier ministre. « Je vais frapper à toutes les portes, notamment à celles du monde arabe, pour rétablir les ponts. Nous avons besoin du monde arabe auquel le Liban appartient, et je suis persuadé que nos frères ne vont pas nous lâcher », avait dit le magnat des télécoms le jour de l’annonce de la formation du gouvernement, après treize mois d’impasse.
Les pays du Golfe, qui sont les principaux donateurs historiques du Liban, ont pris leurs distances avec le pays du Cèdre au cours de ces dernières années, considérant qu’il est sous la coupe du Hezbollah. Mais Nagib Mikati mise sur le fait que son gouvernement a reçu un feu vert occidental, et que lui-même n’est pas persona non grata en Arabie, contrairement à Saad Hariri, pour renouer les liens. « On ne sait pas si ça va marcher, mais on a déjà envoyé des messages dans ce sens », confie un proche du président du Conseil. Selon des informations obtenues par L’Orient-Le Jour, le milliardaire de Tripoli a tenté une ouverture vers le royaume dès sa nomination, en contactant plusieurs responsables saoudiens, dont l’ambassadeur au Liban, Walid Boukhari.
Mais du côté du Golfe, c’est le silence radio. À l’exception du Qatar, aucun autre pays de la péninsule Arabique n’a pour le moment réagi à la naissance du gouvernement. S’il est d’usage que l’Arabie saoudite attende la déclaration ministérielle et le vote de confiance pour faire part de sa position, les voyants ne semblent pas virer au vert. Riyad avait en effet boycotté le gouvernement de Hassane Diab, dont la déclaration ministérielle était, à quelques différences économiques près, la même que celle adoptée par le nouveau cabinet. « Le royaume n’est pas concerné par le processus de formation du gouvernement », dit un diplomate du Golfe. « Ce qui était attendu, c’était un gouvernement de mission capable de sortir le Liban de ses crises. Et le résultat n’est pas à la hauteur », ajoute-t-il. Contrairement à ce que prévoyait la feuille de route française, le gouvernement a été formé « à l’ancienne », avec un partage du gâteau entre les principales formations politiques.
Sans se faire trop d’illusions, les pays du Golfe attendent de voir le nouveau cabinet réaliser de réelles réformes avant de montrer un signal positif en retour. Seule petite étincelle, les Émirats arabes unis, qui ne cachent pas non plus leur désintérêt politique pour le pays du Cèdre, ont accepté de jouer un rôle dans l’accord énergétique conclu entre l’Irak et le Liban. C’est en effet une société émiratie qui va transformer le pétrole irakien en carburant prêt à l’emploi et le livrer au Liban.
« Le contraire de ce qu’ils promettaient »
« C’est le gouvernement du Hezbollah, né à la suite d’un accord franco-iranien », tance un responsable saoudien ayant souhaité garder l’anonymat. Le nouveau cabinet a en effet été annoncé quelques jours après un coup de téléphone entre le président français Emmanuel Macron et son homologue iranien, Ebrahim Raïssi, qui faisait lui-même suite à la visite du locataire de l’Élysée à Bagdad à la fin du mois d’août. « Les Français sont à la manœuvre, mais ils ont fait le contraire de ce que promettait leur initiative », critique le responsable précité.
Selon les informations recueillies par L’OLJ, Riyad considère que Paris a privilégié ses propres intérêts et sa coopération avec l’Iran au détriment du Liban. « Nous avons bien d’autres priorités que le Liban, à commencer par le Yémen et la préservation de la relation avec Washington », dit un autre responsable saoudien qui craint les conséquences de la volonté de la puissance américaine de poursuivre son désengagement dans la région. Sur la scène libanaise, les Saoudiens ne cachent toutefois pas leur inquiétude concernant une montée en puissance du Hezbollah dans les milieux sunnites, notamment au Akkar, où le parti chiite a récemment distribué une aide financière aux victimes de l’explosion de Tleil.
S’il faudra encore faire bien des efforts pour que l’Arabie saoudite remonte à bord, le Liban peut toutefois compter sur l’Égypte, qui fait un retour assez remarqué sur la scène régionale depuis quelques mois. « L’Égypte a positivement accueilli la formation du gouvernement », confirme un diplomate arabe ayant requis l’anonymat. Le Caire s’est impliqué de près dans tout le processus de la formation gouvernementale, défendant les « prérogatives sunnites » et prônant l’équilibre entre les parties. Mais il semble avoir modéré sa position dans les derniers temps, fort de l’accord énergétique qui lui permet d’exporter son gaz au Liban via la Syrie et la Jordanie, avec le feu vert des Américains. « L’Égypte a travaillé de concert avec la France pour aboutir à la naissance du cabinet », affirme le diplomate arabe.
Ne vous faites pas d’illusion .. si avant l’arrivé du pétrole iranien il y avait un peu d’espoir !! Après son arrivé … khallas oubliez
13 h 57, le 17 septembre 2021