
Un premier convoi de camions chargés de fuel iranien, le 16 septembre 2021 dans le village d'al-Aïn, dans la Békaa, au milieu de drapeaux du Hezbollah. Photo REUTERS/Aziz Taher
Quatre convois composés de 80 camions-citernes chargés de carburant iranien affrété par le Hezbollah afin de tenter de remédier, du moins en théorie, aux graves pénuries au Liban, sont arrivés ce matin dans le Hermel, dans la Békaa. Ces véhicules, les premiers à arriver au Liban, venaient de Syrie, où la cargaison d'un premier navire iranien avait été déchargée mardi dans le port syrien de Banias.
Dès 8h30 ce matin, plusieurs camions chargés de fuel étaient visibles sur des photos et des images vidéos relayées par notre correspondant Michel Hallak. Des drapeaux du parti chiite, ainsi que quelques partisans étaient visibles sur les lieux, au milieu d'une foule de journalistes. Le correspondant de l'AFP sur place a indiqué que le premier convoi était formé de 20 camions-citernes, portant des plaques d'immatriculation syriennes, et qu'il est entré en territoire libanais mercredi matin via un passage illégal dans la région du Hermel.
#Liban Les premiers camions chargés de fuel iranien sont arrivés jeudi matin dans le Hermel. (Vidéo envoyée par notre correspondant Michel Hallak) pic.twitter.com/UqoOXTA4Sp
— L'Orient-Le Jour (@LOrientLeJour) September 16, 2021
"Sayyed Hassan a brisé l'hubris des Etats-Unis"
Selon notre correspondante dans la Békaa Sarah Abdallah, une partie du convoi s'est dirigée à 10h vers la ville de Baalbeck où des partisans du parti chiite se sont rassemblés malgré les consignes du chef de la formation, Hassan Nasrallah, qui avait demandé mercredi soir l'annulation des célébrations prévues, par souci de sécurité.
Au total, 80 camions-citernes, d'une capacité totale de quatre millions de litres, sont arrivés jeudi au Liban. Ils déchargeaient leurs cargaisons à Baalbeck dans les réservoirs des stations-service Amana, détenues par le Hezbollah et visées depuis février 2020 par des sanctions américaines, avant d'être distribuées sur le marché, par ordre de priorités.
"Aujourd'hui est un jour de fierté", affirme Nawal Fakhry, 55 ans, à notre journaliste sur place Lyana Alameddine. "Mon sentiment est indescriptible, magnifique même. Sayyed Hassan a brisé l'hubris des Etats-Unis", poursuit cette fervente partisane du Hezbollah.
Des partisans du Hezbollah dans la Békaa, le 16 septembre 2021. Photo Lyana Alameddine
Pour Yassine Jaafar, venu avec ses enfants de Baalbeck, les craintes concernant des sanctions américaines contre le Liban en raison de la cargaison de fuel iranien ne sont que "spéculations".
Un peu plus loin, sur une affiche arborant un portrait de Hassan Nasrallah, on peut lire "Merci à la Syrie d'Assad". Une affiche brandie dans une station-service fermée en raison de la pénurie.
Photo Lyana Alameddine
Le Liban souffre d'une grave pénurie d'électricité et de carburant, ainsi que de manque de liquidités. Depuis plusieurs mois, l'organisme public Electricité du Liban (EDL) ne produit plus de courant que pour n'approvisionner le pays que quelques heures par jour. Des générateurs privés, fonctionnant au mazout, doivent prendre le relais pendant les coupures, comme c'est déjà le cas depuis des années. Toutefois, face au rationnement draconien et au fait que le mazout, comme l'essence, devient une denrée rare sur le marché local, les propriétaires de ces groupes électrogènes sont obligés, à leur tour, de limiter leur production, plongeant les Libanais de longues heures dans le noir et provoquant la panique dans certains secteurs, comme les hôpitaux.
C'est dans ce cadre que le chef du Hezbollah avait indiqué, lundi soir, qu'un premier navire iranien était bien arrivé en Syrie et que son chargement serait attendu dès jeudi au Liban, où il serait distribué gratuitement à des institutions prioritaires. Un mécanisme toutefois entouré de flou. Un autre navire chargé de mazout est en route, selon lui, tandis qu'un troisième, transportant de l'essence, devrait bientôt prendre la mer. La décision de faire transiter le fuel iranien à travers la Syrie semble motivée par la volonté du Hezbollah d'éviter au Liban des sanctions américaines, celles-ci visant les exportations de fuel iranien.
Mercredi soir, Hassan Nasrallah avait appelé ses partisans à ne pas se rassembler pour célébrer l'arrivée du fuel iranien, alors que des festivités étaient prévues aujourd'hui. Le leader chiite a fait par d'inquiétudes relatives à la sécurité. Le 15 août dernier, un rassemblement près d'une cuve à essence illégale dans le Akkar avait tourné au drame avec l'explosion de son contenu, provoquant la mort de plus d'une trentaine de personnes et blessant environ 100 autres.
Qu’on se rassure il n’y a pas de fuel dans ces citernes. Il a demandé à la population de ne pas se rassembler autour car il craint que sa blague ne soit découverte.
18 h 51, le 16 septembre 2021