Cinq ans après avoir échafaudé le compromis politique qui devait hisser en octobre 2016 le fondateur du Courant patriotique libre Michel Aoun à la tête d’une République aujourd’hui agonisante, le chef des Forces libanaises Samir Geagea a reconnu qu’il avait commis une erreur fondamentale, affirmant sans ambages regretter une décision dont les conséquences ont été « tragiques » pour le Liban.
Par ce mea culpa qui fait écho aux reproches allant dans le même sens formulés à son encontre par des milliers de Libanais toutes appartenances communautaires confondues, Samir Geagea a officiellement inauguré dimanche sa bataille électorale dans la perspective des législatives de 2022, mais aussi de la présidentielle qui devrait suivre cette échéance. Deux rendez-vous sur lesquels il a particulièrement insisté, au point de menacer indirectement d’un recours à la rue au cas où ils seraient compromis. « Toute tentative de reporter les élections déclenchera un nouveau soulèvement populaire multiforme », a-t-il prévenu. Leur importance à ses yeux réside dans le fait qu’ils représentent de vrais vecteurs de changement, alors que le soulèvement populaire d’octobre 2019, aussi gigantesque soit-il, n’avait pas réussi à déloger une classe politique qui reste réfractaire au changement.
Le discours que le leader chrétien a prononcé dimanche soir à Meerab, au terme de la messe annuelle à la mémoire des victimes des FL, ne ressemble en rien aux précédents, sinon par ses critiques au Hezbollah et au CPL à qui il a fait assumer la responsabilité principale de la déliquescence de l’État et de l’effroyable crise dans laquelle le pays ne fait que s’enliser. Une véritable diatribe qui a vite fait pâle figure face au réquisitoire qu’il a dressé contre la personne de Michel Aoun, le « président-pirate qui prend en otage tout un pays au profit de ses propres intérêts ». Samir Geagea n’a pas appelé à la démission du chef de l’État, sans doute parce que ce dernier ne franchira jamais le pas – et il l’a déjà annoncé – et parce qu’une telle démarche à quelques mois des législatives sera inutile, compte tenu de la majorité actuelle à la Chambre.
Il a donc choisi de lancer sa bataille dès à présent contre le camp présidentiel et sur un terrain exclusivement chrétien, prenant ainsi le risque d’une exacerbation de la polarisation politique interchrétienne au fur et à mesure que nous nous rapprochons des élections parlementaires. Le chef des FL, qui s’est dit en faveur de législatives et d’une présidentielle anticipées, a affirmé vouloir se prononcer sur cette échéance en temps voulu, il est vrai, mais il a quand même dressé le portrait du futur président. Un portrait à l’antipode, selon lui, de celui de l’actuel chef de l’État contre qui il s’est déchaîné avec une violence inouïe, devant une foule qui l’ovationnait. « Nous ne voulons pas d’un président fort qui provoque les crises, fait couler l’État et appauvrit les Libanais (…). Nous refusons un président qui soit soumis, qui est capable de concessions sur les constantes nationales et qui est seulement fort lorsqu’il s’agit de faire primer ses intérêts et ceux de son entourage sur ceux de l’État et des Libanais », a-t-il martelé. « Les résultats du mandat du président Michel Aoun ont été catastrophiques pour tous, mais surtout pour les chrétiens. Et si certains nous reprochent d’avoir favorisé son élection à la tête de l’État, je dois avouer que je regrette profondément qu’une démarche dont l’objectif aux plans national et chrétien était très importante se transforme en véritable tragédie. Nous voulions mettre fin au vide présidentiel. Nous voulions que son élection soit l’occasion d’une véritable unité nationale, qu’elle consacre le retour des chrétiens à l’État et panse les blessures historiques au sein d’un même foyer », a poursuivi Samir Geagea, en allusion à la guerre dite d’élimination déclenchée en 1989 par le général Michel Aoun contre les FL. « Nous voulions un président souverain, libre, indépendant et intègre pour avoir une République souveraine, libre, indépendante, forte et crédible. Nous voulions un président-capitaine qui puisse mener à bon port le navire de l’État et des Libanais et non un président-pirate qui fait de la population l’otage de son égoïsme et qui oriente le navire en fonction de ses propres intérêts », a encore lancé Samir Geagea, pour qui il est « incontestable » qu’il n’y a pas de salut possible pour le Liban avec le duo Hezbollah-CPL.
Des ratés et des voleurs
Les deux partis n’ont d’ailleurs pas échappé aux foudres du chef des FL qu’il a pratiquement accusés de former à eux deux « le noyau » d’une association de malfaiteurs, qui hypothèque le pouvoir des décisions nationales et draine ses ressources. « La crise aujourd’hui est causée par la prise en otage de l’État et de ses institutions par des puissances non libanaises », a-t-il dit, en allusion à l’Iran. « C’est l’ère de l’effondrement général que dirige un groupe au pouvoir qui a renoncé à la souveraineté de l’État, porté un coup à ses institutions et fait du Liban un État failli, gouverné par des corrompus, des ratés, des voleurs et des traîtres criminels. L’État ne peut pas se relever avant d’avoir récupéré son pouvoir de décision et le monopole de l’usage de la force sur tout le territoire », a prévenu le leader chrétien, pour qui le Hezbollah « ne peut plus ignorer les demandes de la population ».
Quoique très critique à l’égard de la formation chiite, le leader chrétien a opté pour une nouvelle stratégie, plus porteuse que les condamnations habituelles, pour descendre la politique que celle-ci suit. Il s’est adressé directement au public chiite pour l’interroger sur le point de savoir ce qu’il gagne, au plan personnel, de toutes les « victoires » dont s’enorgueillit le Hezbollah. « Les missiles ne rassasient pas les affamés et les drones ne guérissent pas les blessés. Celui qui vous appelle les “plus honorables” accepte de vous humilier dans les files d’attente devant les stations essence, les boulangeries et les pharmacies. Frères chiites, les Libanais attendent que vous criez à la figure du Hezbollah pour lui dire : “Non à l’humiliation” », a tonné Samir Geagea, soucieux aussi de faire adhérer à sa cause les partisans de la révolte du 17 octobre, qui accusent le chef des FL de vouloir surfer sur cette vague. Lui pense ferme, au contraire, qu’en joignant leurs efforts, les protestataires et les forces politiques de l’opposition, notamment son parti, peuvent opérer le changement souhaité. « Peuple du 17 octobre, les FL font partie de vous et sont à votre disposition. Ne gaspillez pas cela, sinon vous perdrez le dernier espoir d’un vrai changement », leur a-t-il lancé.Dans le même ordre d’idées, il a fustigé les détracteurs de Bkerké ainsi que l’indifférence de Baabda face aux souffrances des Libanais, prenant fait et cause pour le patriarcat maronite, contre qui le public de la formation chiite et celui du CPL avaient lancé une violente campagne de dénigrement, il y a quelques semaines. « Entre une orange flétrie (couleur du CPL) et un jaune blême (couleur du Hezbollah), le rouge de l’habit (patriarcal) reste rayonnant, tel le disque d’un soleil qui ne se couche jamais », a-t-il encore affirmé.
Samir Geagea a enfin abordé la question de l’enquête sur la double explosion meurtrière du 4 août 2020 au port de Beyrouth. « L’enquête sur l’affaire du port revient au juge d’instruction et non au Parlement. Il n’y a pas de lignes rouges dans ce dossier », a-t-il affirmé, au moment où la classe politique tente d’entraver l’enquête en réclamant que les responsables poursuivis par le juge d’instruction soient jugés devant la Chambre et non par le magistrat.
Il nous faut des dirigeants qui ne volent pas ce pays et ces ressources. C'EST TOUT ! Il n'est plus a demontrer que le CPL, Harriri, Amal (et par extension le hezb), Frangieh (en digne heritier de son grand-pere) nous ont depouillé !! Reste les FL tout le monde (sauf evidement le CPL) s'accorde a dire que leurs ministres furent d'une probité exemplaire. le reste n'a que peu d'importance a ce niveau d'effondrement
11 h 17, le 07 septembre 2021