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Nos Lecteurs ont la Parole

« Culpabiles sumus... »

Le 4 août 2020, c’était votre tour ! Vous avez été déportés dans le seul train macabre qui passe et repasse toujours au Liban en emportant pêle-mêle un père, une mère, un enfant, une jeune mariée, un homme, un vieux… Safar Barlik, guerre civile, explosion, incendie, accident, n’importe. Dans notre pays, seul le train de la mort est ponctuel et jamais en panne… Les causes sont multiples, les contextes et les scénarios différents, mais la mort est une. Comme consolation et pour calmer les blessures, il vous désigne par le terme glorieux de « martyrs ». Mais oh que non ! Vous n’avez pas choisi de mourir et on aurait bien voulu vous avoir parmi nous. La douleur et la souffrance sont insupportables ! Vos parents, vos amis, nous qui avons survécu jusqu’à aujourd’hui, parce qu’on ne sait jamais dans ce pays comment on va mourir et ce que nous réserve le sort, nous sommes aussi des victimes ! Victimes vivantes attendant le train ! Ce train nommé explosion, obus, corona, guerre, famine, inflation…

Nous sommes des victimes d’un génocide prémédité. D’abord, il y a eu la crise économique, le secteur bancaire qui semblait être solide s’est effondré. Suivra la crise sanitaire doublée de l’effondrement économique qui ont exterminé le secteur de la santé qui faisait notre fierté. Mais le coup de grâce, qui a marqué le point final, fut l’éducation. Les écoles et les universités sont anéanties et vides. Sans professeurs, sans élèves…

Nous sommes aussi des victimes de notre appartenance politique ! Victimes de notre Constitution qui nous classe par religion et par confession ! Victimes de nos identités qui nous déchirent et deviennent meurtrières !

Que nous reste-t-il, sinon attendre ce train qui repassera sûrement avec ce sentiment d’échec devant un pays brisé, fragmenté, et un sentiment de culpabilité ?

Nous sommes des victimes coupables ! Oui ! Coupables d’avoir survécu !

Coupables de pouvoir manger, boire et vivre alors que l’économie du pays s’effondre !

Coupables parce que nous n’avons pas pu réussir notre révolution et notre vengeance !

Coupables de revoir les mêmes dirigeants vivre et revivre et survivre et revivre encore alors que nous continuons à les soutenir.

Coupables d’entendre les mensonges éloquents, de ne pas les croire et de garder le silence !

Nous sommes coupables de n’avoir pas transformé notre douleur en vengeance dévastatrice meurtrière !

Coupables d’avoir accepté d’être des victimes silencieuses pleurant devant des tombes, victimes visitant des cimetières avec des bouquets de fleurs… Les fleurs se fanent, mais la justice est éternelle. Les tombeaux sont vides et silencieux ! La mort est silence ! Un silence douloureux ! Un couteau qu’on tourne dans la plaie ! Une souffrance qui crie vengeance et qui va exploser ! Oui, l’explosion se prépare et elle sera aussi grande que notre douleur et plus puissante que celle du 4 août ! La justice arrivera !

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Le 4 août 2020, c’était votre tour ! Vous avez été déportés dans le seul train macabre qui passe et repasse toujours au Liban en emportant pêle-mêle un père, une mère, un enfant, une jeune mariée, un homme, un vieux… Safar Barlik, guerre civile, explosion, incendie, accident, n’importe. Dans notre pays, seul le train de la mort est ponctuel et jamais en panne… Les causes sont...
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