Entre lundi dernier et hier, le discours du Premier ministre désigné, Nagib Mikati, a connu des changements significatifs, donnant l’impression que des concessions seraient désormais possibles de sa part en vue de paver la voie à la formation du gouvernement. Mais on n’en est pas encore là, en dépit d’un progrès « certain », dont se félicite Baabda.
Les pressions internationales, notamment dans le cadre de la troisième conférence de soutien au Liban, tenue mercredi, y sont certainement pour quelque chose. Les manifestations et actes de violence observés à Beyrouth à l’occasion du premier anniversaire du cataclysme du 4 août, aussi. Sauf que cette légère avancée demeure à ce stade imprécise.
Le Premier ministre désigné s’est rendu hier une nouvelle fois à Baabda pour s’entretenir avec le chef de l’État, Michel Aoun. Leur prochaine rencontre est prévue aujourd’hui pour « poursuivre les discussions autour du partage des portefeuilles au sein de la future équipe », comme le confie à L’Orient-Le Jour un proche de la présidence.
Les obstacles ne sont pas donc complètement aplanis. Même si Baabda converge avec M. Mikati sur le fait que la réunion s’est déroulée dans une atmosphère positive, après l’entretien tendu de lundi dernier. « Le progrès est certain », assure à L’OLJ un proche collaborateur de Michel Aoun. Il n’explique pas pour autant les raisons de ce constat, en attendant la sixième réunion entre le président Aoun et le Premier ministre désigné.
« Il faut être optimistes, nous sommes obligés de l’être », a quant à lui déclaré M. Mikati, soulignant que la réunion d’hier avait permis une « avancée » dans les discussions, même si elle restait « lente ». À en croire une source proche de Baabda, le chef de l’État se dit « satisfait » quant à un « progrès au niveau de la répartition des portefeuilles régaliens », sans donner plus de détails.
Le principal point d’achoppement entre MM. Aoun et Mikati s’articule autour du ministère de l’Intérieur, que le chef de l’État réclame pour lui, à quelques mois des législatives prévues en mai 2022. Sur ce plan, Nagib Mikati a tenu des propos significatifs hier. Pour la première fois depuis sa nomination à la présidence du Conseil, le 26 juillet dernier, le député de Tripoli a défini (quoique implicitement) la mission de son équipe comme étant celle de tenir des élections législatives. Un scrutin qui sera « honnête », s’est engagé le chef du gouvernement désigné. « Il y a un processus constitutionnel qui devrait mener aux élections, qui décideront de l’avenir du Liban », a-t-il lancé.
Mais tel n’est pas le seul message que M. Mikati a voulu adresser aux protagonistes concernés par les tractations, notamment le président de la République.
Après avoir annoncé, lundi, que le principe de la rotation des postes (régaliens) n’était pas sur la table et qu’il préférait garder inchangé le partage des portefeuilles, Nagib Mikati a nuancé ses propos. « Constitutionnellement, il n’y a pas de délai pour que le Premier ministre désigné forme le cabinet », a-t-il affirmé, contrairement à des propos antérieurs selon lesquels les délais n’étaient « pas ouverts ». « Aucun ministère n’est lié à une confession spécifique », a-t-il souligné, excluant la possibilité pour lui de se récuser à ce stade.
Flexibilité de Aoun ?
Ce revirement peut-il être interprété comme une volonté de Nagib Mikati de céder aux conditions de M. Aoun pour pouvoir mettre en place son équipe ? Rien n’est moins sûr. Le député de Tripoli a exprimé sa volonté de ne pas se noyer dans ce qu’il a appelé « des problèmes secondaires », à savoir les querelles politiciennes autour de la répartition des ministères régaliens. Dans certains cercles proches de l’entourage du président Aoun, on croit savoir que le président serait désormais prêt à faire preuve de flexibilité sur ce plan. Il pourrait accepter l’idée de garder intacte la répartition actuelle des quatre ministères régaliens (un sunnite à l’Intérieur, un chiite aux Finances et deux chrétiens aux Affaires étrangères et à la Défense).De source informée, on apprend que des discussions seraient actuellement en cours pour qu’un sunnite qui résulterait d’une entente entre MM. Aoun et Mikati soit nommé à l’Intérieur. Des contacts seraient également en cours afin de nommer un chrétien sur lequel s’entendrait le chef de l’État avec le Premier ministre désigné à la tête de la Justice. Ce ministrable devrait également obtenir l’aval du club des anciens Premiers ministres, dont fait partie M. Mikati. Des informations que les milieux du chef de l’État et du Premier ministre désigné ne confirment pas officiellement.
« Je n’ai jusqu’à présent aucune raison de me récuser »
Le Premier ministre désigné, Nagib Mikati, a affirmé à l’issue de sa cinquième réunion avec le président Michel Aoun qu’il n’avait jusqu’à présent aucune raison d’abandonner sa mission de formation d’un nouveau cabinet, assurant qu’aucun des protagonistes ne « s’obstine » à vouloir obtenir un portefeuille plutôt qu’un autre.
« Selon la Constitution, aucun ministère n’est lié à une confession spécifique. La réunion d’aujourd’hui était particulièrement importante après ce qu’il s’est passé hier », a déclaré M. Mikati, en référence aux dizaines de milliers de personnes qui sont descendues dans les rues de Beyrouth pour la première commémoration des explosions au port de Beyrouth. « Il faut prendre en considération les appels des sinistrés du 4 août qui se sentent laissés à leur sort en l’absence d’un État capable. Il faut aussi prendre en considération les déclarations faites hier lors de la conférence internationale de donateurs à laquelle j’ai participé. Vous avez entendu les participants tous nous dire : Formez un gouvernement et nous serons à vos côtés. » Lors de la troisième « conférence internationale de soutien à la population libanaise », la communauté internationale avait en effet sommé les dirigeants libanais d’agir pour extirper le Liban de la pire crise économique de son histoire, faute de quoi elle ne volerait pas au secours du pays. « Il n’y aura aucun chèque en blanc au bénéfice du système politique libanais », avait averti le président français.
Nagib Mikati a expliqué que c’est à partir de là qu’il a entamé sa réunion aujourd’hui avec M. Aoun, lui soulignant la nécessité de former rapidement un cabinet, sinon nous « commettrions un grand péché ». « Il faut être optimistes, nous sommes obligés de l’être », a encore déclaré le Premier ministre désigné, avant d’indiquer que la réunion d’aujourd’hui avait permis des « avancées » dans les discussions, même si elle restaient « lentes ». Et d’annoncer une nouvelle réunion aujourd’hui avec le président.
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LORSQUE LES MULETS COMMENCERONT A PARLER MIKATI TIRERAIT DU PUITS DE L,EAU ANISEE.
LA LIBRE EXPRESSION
14 h 07, le 06 août 2021