Les efforts que déploierait le président de la Chambre, Nabih Berry, en vue de débloquer le processus de formation du gouvernement semblent faire déjà face à de sérieux obstacles, la présidence de la République ayant de nouveau opté pour l’escalade face au Premier ministre désigné, Saad Hariri.
Le compromis concocté par Nabih Berry et son partenaire de longue date, Walid Joumblatt, consiste en la mise en place d’un cabinet de 24 ministres (8 au lieu de six pour chacun des trois camps politiques). L’idée est celle du leader druze, qui l’a proposée à Michel Aoun lors d’un entretien le 20 mars au palais de Baabda. Elle a ensuite été affinée avec le président du Parlement qui y a ajouté la condition qu’aucun camp ne puisse détenir le tiers de blocage. Cette formule aurait reçu l’aval de Saad Hariri tant que, indépendamment du nombre de ministres, il est garanti que le camp aouniste ne pourra pas revendiquer le tiers de blocage pour bloquer une décision prise par l’exécutif.
Selon notre correspondant politique Mounir Rabih, le président de la Chambre attendait dès lors une réponse du chef de l’État à cette proposition avant de la présenter officiellement en tant qu’initiative pour une sortie de crise. La nouvelle charge lancée par Michel Aoun contre Saad Hariri dans l’interview que le président a accordée lundi à notre confrère arabophone al-Joumhouriya vient sérieusement compliquer la tâche à Nabih Berry, comme le soulignent les milieux proches de Aïn el-Tiné. Dans cet entretien, le président a accusé le Premier ministre désigné de « saper toutes les règles d’usage pour la formation des gouvernements ». Mais « je ne me soumettrai pas », a-t-il prévenu. « Avec ce genre de prises de position, quel est l’intérêt pour le président de la Chambre de poursuivre ses efforts? » s’interroge un proche de M. Berry, contacté par L’Orient-Le Jour. Il s’empresse toutefois de préciser que le chef du législatif n’a pas encore jeté l’éponge et poursuit ses contacts.
Des garanties du Hezbollah
Outre une réponse de M. Aoun, ce sont deux garanties de la part du Hezbollah que Nabih Berry attend également pour intervenir « officiellement », souligne Mounir Rabih. D’abord, l’accord du parti de Hassan Nasrallah à cette solution alors que les divergences entre les deux formations chiites alliées ont éclaté au grand jour dernièrement au sujet de la formation du gouvernement. En réponse à l’appel de Hassan Nasrallah à envisager la mise sur pied d’une équipe techno-politique ou à « réactiver » le gouvernement de Hassane Diab, le mouvement Amal avait répondu en insistant sur la formation d’un gouvernement de ministres « technocrates non partisans, conformément à l’initiative française ». M. Berry attend en outre du Hezbollah qu’il exerce une pression sur ses alliés, Michel Aoun et son gendre Gebran Bassil, en vue d’un déblocage.
Sauf que rien ne présage une réponse positive de Hassan Nasrallah aux attentes de Nabih Berry. Selon des milieux proches du Hezbollah contactés par L’OLJ, le secrétaire général du parti devrait réitérer son appel à un cabinet techno-politique dans son discours prévu mercredi après-midi. Une source gravitant dans l’orbite du parti chiite critique implicitement les efforts du chef du législatif, l’accusant d’agir « uniquement en direction de M. Hariri sans essayer de rapprocher les points de vue avec le camp aouniste ». Elle fait référence à l’insistance du président de la République et du parti qu’il a fondé, le CPL, à s’accrocher à la nomination des ministres chrétiens. Une position que Michel Aoun a réitérée dans l’interview de lundi et justifiée par sa volonté de défendre les « droits » de sa communauté, « les principales forces chrétiennes ne participant pas aux négociations ». Donnant raison au président, la source proche du Hezbollah rappelle que le Premier ministre désigné, dans le cadre de ses concertations, s’est réuni à plusieurs reprises avec Ali Hassan Khalil, bras droit de Nabih Berry, et Hussein Khalil, conseiller politique de Hassan Nasrallah. Pourquoi ne fait-il pas de même avec Gebran Bassil ? se demande-t-elle, ajoutant que le Hezbollah n’entend pas intervenir auprès du camp aouniste pour faciliter la naissance du cabinet.
« Message reçu »
Pour sa part, Saad Hariri, premier concerné par ce bras de fer, a choisi de ne pas répondre frontalement à Michel Aoun. « Message bien reçu. Il n’est pas nécessaire d’y répondre. Que Dieu ait pitié des Libanais », s’est-il contenté de tweeter lundi après la publication de l’interview accordée par le président. Quel « message » a donc reçu le Premier ministre désigné ? La réponse semble évidente, selon un proche de la Maison du Centre : Michel Aoun veut que Saad Hariri se réunisse avec Gebran Bassil. « C’est le message principal du chef de l’État. Mais si Hariri peut négocier avec le véritable président, pourquoi doit-il se tourner vers le président de l’ombre? » s’interroge-t-il, dans une claire allusion au chef du CPL. Sous couvert d’anonymat, ce proche de Saad Hariri explique que si ce dernier évite une nouvelle confrontation avec Baabda, « cela ne signifie pas qu’il a abandonné ses constantes ». « M. Hariri est ouvert à des tractations portant sur un cabinet de 20 ou 22 ministres, mais craint l’attribution de la minorité de blocage à un camp quelconque », dit-il.
Partageant cette lecture, Moustapha Allouche, vice-président du courant du Futur, explique que le blocage actuel n’est toutefois pas uniquement interne, mais s’explique aussi par l’escalade verbale pour laquelle l’Iran a opté récemment. « Après les récentes déclarations de Hussein Amir Abdel Lahiyan – haut responsable iranien qui a accusé il y a quelques jours la communauté internationale de suivre une politique qui empêche la formation d’un gouvernement, favorise les divisions (au Liban) et tend à affaiblir la résistance – il faut s’attendre à une escalade de la part de Hassan Nasrallah, parce que pour l’Iran, l’heure n’est pas encore à la mise sur pied d’un cabinet », décrypte M. Allouche.
commentaires (9)
Apparement le prez fort (genre rok-fort aux arômes violents) aurait souhaité hériter le jardin de son granpapa plutôt que de devenir prez... Feignant, avec grands très grands efforts, de le croire, je me trouve à rêver de son grand-père jeune, très religieux et qui à l'âge tendre de 7 ans décide de se faire moine type ...euh, cloîtré sans femmes ni enfants et surtout sans grands enfants... On aurait sûrement échapper à la guerre d'élimination, le séjour parisien, la St Michel (non, pas la plage), mais surtout pas de régime fort, si fort que 4 millions de libanais et une myriades de réfugié vont perdre des livres de poids et des livres monétaires!!! Et surtout surtout et dieu de tout les surtout, ces mêmes 4 millions d'esclaves n'auront plus à se casser la tête à deviner le chiffre magique du nombre de ministres qui nous ferons, finalement, mordre la m...e !!! ... Où est donc ce lopin de lit doux d'une chèvre que les poètes chantaient et que l'humanité entière nous enviaient pour l'avoir !!???!!!
Wlek Sanferlou
23 h 59, le 31 mars 2021