Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a affirmé mardi qu'il n'était pas en faveur d'une démission du président de la République, Michel Aoun, estimant que le chef de l'Etat ne peut être mis en cause dans le cadre de ses fonctions qu'en cas de "haute trahison". Selon le patriarche, toute démission d'un chef d'Etat est tributaire de "mécanismes constitutionnels", en cas de "haute trahison".
Depuis octobre 2019, des voix s'élèvent dans la rue pour demander le départ du président Aoun. Selon l'article 60 de la Constitution, "le président de la République n'est responsable des actes de sa fonction que dans le cas d'une violation de la Constitution ou de haute trahison" et, le cas échéant, il ne peut être mis en accusation que par la Chambre des députés décidant à la majorité des trois quarts des membres de l'Assemblée entière" et "il ne peut être jugé que par la Haute Cour prévue à l'article 80".
Dimanche soir, c'est le chef des Forces libanaises et opposant politique du président Aoun, Samir Geagea, qui avait affirmé être opposé à une démission du chef de l'Etat tant que la "majorité actuelle" reste au pouvoir. Par "majorité", M. Geagea faisait référence au Courant patriotique libre (aouniste), au tandem chiite Amal-Hezbollah et à leurs alliés.
"Aucune ligne rouge"
"Il faut que l'audit juricomptable ait lieu dans toutes les institutions de l'Etat", a par ailleurs déclaré le patriarche qui recevait à Bkerké une délégation de groupes se revendiquant "souverainistes" et issus du soulèvement populaire du 17 octobre 2019. Cet audit, qui doit commencer par les comptes de la Banque du Liban (BDL), fait face à de nombreux obstacles et n'a toujours pas été mis sur les rails. Le prélat a dans ce contexte affirmé qu'il n'a "jamais protégé personne et n'a tracé aucune ligne rouge pour empêcher que des poursuites soient menées contre qui que ce soit", appelant à ce que des sanctions soient lancées contre tous les dirigeants impliqués dans des affaires de corruption.
Protéger le Liban d'une mort définitive
"Nous voulons une conférence qui permettrait de protéger le Liban d'une mort définitive", a en outre lancé une nouvelle fois le prélat, qui a fait de cette demande l'un de ses chevaux de bataille. "Le secrétaire général des Nations Unies (Antonio Guterres, ndlr) est inquiet pour le Liban. Il a salué l'idée de l'organisation d'une telle conférence internationale et nous a appelé à en préparer les bases", a-t-il ajouté. "En outre, la majorité des ambassadeurs des pays arabes que j'ai rencontrés soutiennent la neutralité", s'est réjoui Mgr Raï, qui a affirmé avoir reçu une invitation officielle pour se rendre aux Emirats arabes unis.
Le patriarche s'était entretenu le 23 mars dernier au téléphone avec M. Guterres. Lors de cet appel, le responsable onusien avait exprimé "sa grande préoccupation" face à la situation au Liban et rappelé l'importance de la formation rapide d'un gouvernement et de ne pas entraîner le pays dans "des conflits".
La délégation présente a de son côté affirmé son soutien aux positions du patriarche, notamment sur la neutralité du Liban et sur la tenue d'une conférence internationale pour sauver le pays du Cèdre, saluant dans ses propositions un "espoir", après "avoir entendu des déclarations disant que le pays se dirigeait vers l'enfer". A l'automne, le chef de l'Etat avait averti que "sans gouvernement, le pays allait vers l'enfer".
Le Liban est sans cabinet actif depuis près de huit mois, depuis la démission de celui de Hassane Diab, dans la foulée des explosions meurtrières au port de Beyrouth. Le chef de l'Etat et le Premier ministre désigné, Saad Hariri, empêtrés dans des rivalités personnelles et un bras de fer autour de la nomination des ministres, ne sont toujours pas parvenus à former un gouvernement. Et ce, alors qu'il est plus que jamais indispensable pour réformer un pays qui s'écroule et obtenir des aides tangibles de la communauté internationale, lassée de financer la corruption.
Dans ce contexte, la délégation reçue par le patriarche a proposé un programme en trois points pour "libérer le Liban" : l'application de la Constitution et du Pacte national, l'adhésion aux résolutions 1559, 1680 et 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, prônant notamment le désarmement du Hezbollah, l'adoption de la neutralité par rapport aux axes régionaux et l'organisation d'une conférence internationale.
commentaires (13)
si Aoun pouvait, il prendrait aussi votre place cher patriache Rai. D'ailleurs, même qu'il lorgne du côté du vatican, allez savoir . Tellement il insiste pour la défense des chrétiens...Lui prétend à tous les postes . Faudra que vous fassiez attention à votre poste Mgr Rai :) Oui Aoun doit démissionner parce qu'il a été, il est et il sera un danger pour le liban et pour la fin de la présence chrétienne du liban. Même les chrétiens ne veulent plus de chrétiens pareils à ceux dont parle Aoun...Comment voudriez vous que les non chrétiens réagissent? C'est malheureux à dire mais c'est la vérité : Aoun a sali la réputation des chrétiens à cause de son égo , caractère, guerres, désastres et son parcours horrible et d'échecs à tout va. Les chrétiens demandent désormais un président musulman, juif, athé ou peu importe...L'important est de sauver le pays. Le libanais s'en tape de quelle manière prie ou non son président. Il demande à vivre tout simplement ...Donc le départ de ce monsieur est obligé Mgr Rai.
LE FRANCOPHONE
21 h 33, le 30 mars 2021