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Nos Lecteurs ont la Parole

Le prix Nobel de la paix et nous

Peut-on présenter une candidature pour le prix Nobel de la paix ? Oui, comme tout le monde. Inutile de faire de grandes analyses ! Les agences de l’ONU l’ont eu, certains grands politiciens l’ont eu, des figures de la société civile, etc.

Le nom est, en général, proposé par des universitaires ou des États œuvrant pour la paix via des causes qui leur sont tout à fait honorables. Puis le comité Nobel décide.

Pourquoi évoquer un tel sujet alors que le pays traverse des moments dramatiques et une phase extraordinaire dans tous les sens du terme ? Qui, actuellement, s’intéresserait à aller en Norvège s’adresser au comité Nobel pour lui dire que nous, libanais, avons des associations dignes de recevoir une aussi prestigieuse récompense ?

Nous avons longtemps espéré avoir le prix Nobel de littérature avec le poète Adonis. Actuellement, nous pouvons aspirer à plus. Pourquoi la paix alors que le pays est un continuel brasier et en proie à des luttes de pouvoir intestines ?

Et bien voilà, la raison est simple. Ceux qui l’ont eu ne sont pas mieux que nous et il est inutile de s’autoflageller en pensant le contraire.

En voici une preuve qui j’espère convaincra :

Zineb el-Rhazaoui, franco-marocaine menacée de mort pour ses positions humanistes et hardie défenderesse des droits de l’homme, est actuellement en lice pour le prix Nobel de la paix 2021. Je n’avais jamais entendu parler d’elle avant que je ne tombe malencontreusement sur une interview dans une revue française. Si Zineb el-Rhazaoui est nominée, ce n’est pas pour rien. Elle lutte depuis des années pour une égalite des droits entre les hommes, à comprendre entre tous les êtres humains indépendamment de leur race, de leur couleur de peau, de leur religion, de leur sexe, etc. Bref, cette jeune femme, à travers des convictions bien ancrées, entre directement dans les préceptes onusiens et européens des droits de l’homme. Elle ne nie pas pour autant que vivre dans un monde tel qu’elle le souhaite est utopique. Elle crie haut et fort qu’elle a une cruelle envie de déposer les armes. Mais on n’obtient rien sans rien. Le combat de Zineb el-Rhazaoui est louable et a été reconnu par la communauté internationale. Elle est consciente des réalités de son époque et elle déplore certains agissements au nom de préceptes analysés au gré des envies des uns et des autres qui arrivent à stigmatiser la majorité en faisant perdre l’idée même de liberté au concept de base.

Dans un autre ordre d’idées, en 2004, Wangari Maathai avait été la première femme africaine à avoir reçu le prestigieux prix. Le comité avait salué « sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix » à la suite de son engagement contre la déforestation du Kenya.

Citer ces jeunes femmes n’est pas pour rien. Si une personne peut le faire et a réussi à se faire entendre, nous pouvons le faire aussi. Certaines associations libanaises ont la capacité de l’avoir. Entre les femmes battues et les associations écologiques, nous disposons d’un florilège d’associations et de personnes capables et dont le combat, depuis des années, est à la hauteur des plus grands prix internationaux. Autant leurs efforts dans le cadre des causes pour lesquelles elles se mobilisent que leur contribution à un renouveau social et à certaines prises de conscience ou une volonté de voir le Liban évoluer vers des routes plus saines sont des causes certaines pour démontrer au monde que, malgré les maigres résultats ou les réussites à l’arraché qu’elles ont eues, le Liban est capable, indépendamment de la crise économique, des vices de ses politiques ou du marasme social, de lutter de façon différente dans sa promotion de la paix en vue d’un avenir plus serein.

Certes, nous avons d’autres chats à fouetter actuellement et avoir une récompense ne fait pas partie de nos premiers soucis. Mais la vérité est tout autre. Montrer le revers de la médaille au monde signifie que la lutte se fait également sur le terrain, au-delà d’un système social ou religieux bien ancré et sûrement au-dessus des aléas d’une situation qui ne fait que plonger le pays dans un gouffre sans fond. Tout n’est pas dans le rendement de comptes. Si ça devait marcher comme ça, nous l’aurions su depuis longtemps et nous aurions agi en conséquence. Nous avons tenté de le faire en octobre 2019. En vain…

Si nos dirigeants ont tenté, comme de Gaulle en Algérie, de crier juste après que les tensions se sont légèrement apaisées : « Libanais, nous vous avons compris », fort est de constater qu’aucune des deux parties n’a toujours rien compris.

Revenons à nos moutons, sans trop digresser ! Avoir le prix Nobel de la paix pour nos associations relèverait d’un défi colossal. Au moins, nous montrerons que nous faisons quelque chose et que nous ne sommes pas seulement la proie de notre ressentiment envers tout et tout le monde. C’est une façon comme une autre de se blanchir la face. Car nous le méritons. Les conséquences s’en feront ressentir automatiquement. Mais personne n’est présent pour encourager qui que ce soit au pays de l’individualisme et du chacun pour soi. Être altruiste ne signifie pas ne pas s’occuper de soi-même mais accorder aussi de l’importance aux autres à des fins désintéressées. Cette vision utopique d’un Liban qui veut atteindre un degré non pas de perfection, car il n’existe nulle part, de sérénité, de paix et d’égalité, est encore loin d’être atteinte. Cependant, si les efforts des uns et des autres ne sont pas récompensés, comment réussir à avancer ?

Je tiens seulement à signaler que dès que nos athlètes ont des médailles à des championnats régionaux, dès que des artistes sont sélectionnés pour des prix internationaux (et parfois en ressortent vainqueurs), dès qu’il y a une réussite d’un quelconque Libanais hors du Liban, les journaux en font leur une et nous crions haut et fort notre fierté. Est-ce que ça nous a avancés en quelque chose ? Le pays s’en est-il mieux porté pour autant ? Non, et pourtant nous sommes heureux.

Que serait-ce alors si une de nos associations a le prix Nobel de la paix ? Il est temps encore d’agir. Il est temps pour nous de faire preuve de courage et de volonté pour prouver au monde que nous ne sommes pas ce que les autres veulent bien montrer de nous. Nous sommes plus, beaucoup plus, et surtout beaucoup mieux.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Peut-on présenter une candidature pour le prix Nobel de la paix ? Oui, comme tout le monde. Inutile de faire de grandes analyses ! Les agences de l’ONU l’ont eu, certains grands politiciens l’ont eu, des figures de la société civile, etc.
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