Alors que le processus de formation d'un gouvernement fait face à un blocage auquel il est accusé de contribuer largement, le Courant patriotique libre de Gebran Bassil, parti fondé par le président Michel Aoun, se dit soucieux de voir l'équipe ministérielle mise sur pied le plus rapidement possible. Mais il refuse de se rétracter au sujet de ce qu'il estime son rôle dans la défense des prérogatives constitutionnelles du président de la République, "en tant que partenaire à part entière (du Premier ministre désigné) dans les tractations" gouvernementales.
C'est ce qui ressort d'un entretien qui s'est déroulé lundi à Bkerké entre le patriarche maronite Béchara Raï et une délégation du CPL. S'exprimant à l'issue de la rencontre, l'ancien ministre Mansour Bteiche a déclaré : "Nous avons évoqué avec le patriarche la nécessité de mettre sur pied sans plus tarder un gouvernement crédible formé de ministres spécialistes, conformément à l'initiative française". "Le chef de l’État tient à ce que le cabinet soit mis en place dans les plus brefs délais", a-t-il ajouté, soulignant que cela suppose que "le Premier ministre désigné rencontre le président de la République et en discute avec lui". Une façon pour lui de renvoyer la balle dans le camp de Saad Hariri, dont les rapports avec Michel Aoun sont rompus depuis leur dernier entretien, le 23 décembre dernier.
Chargé de former la future équipe depuis le 22 octobre 2020, M. Hariri s’écharpe avec la présidence de la République autour de la nomination des ministres, du partage des portefeuilles et du tiers de blocage, que le CPL chercherait à obtenir au sein de l'équipe ministérielle, dans la perspective de calculs politiques futurs. Cela à l'heure où M. Hariri se dit lui-même déterminé à former un gouvernement de mission tel que préconisé par l'initiative française. Ce plan de sauvetage du Liban est principalement axé sur la mise en place d'un cabinet de spécialistes non affiliés aux partis politiques.
Les portes de Baabda "ouvertes à tout le monde"
Rien ne prête à croire qu'un dénouement heureux est à espérer dans un avenir proche. "Nous voulons que le prochain gouvernement soit formé le plus rapidement possible, mais pas aux dépens du rôle du président de la République en tant que partenaire à part entière dans ce processus", déclare May Khoreiche, vice-président du CPL pour les affaires politiques, faisant savoir que la délégation aouniste a exprimé ce point de vue devant Mgr Raï. "Nous appuyons le patriarche dans ses appels à un cabinet conforme à l'initiative française. Mais le chef de l’État a son mot à dire et la Constitution est claire à ce sujet", poursuit la vice-présidente du CPL, excluant un prochain déblocage. "Les portes du palais présidentiel sont ouvertes à tout le monde", a-t-elle ajouté à l'adresse de Saad Hariri, alors que ce dernier affirme attendre toujours les remarques de Michel Aoun à la mouture qu'il lui avait remise le 9 décembre dernier.
Le blocage du processus gouvernemental avait poussé le patriarche Raï à s'en prendre à plusieurs reprises à ceux qui, selon lui, en sont responsables, tout en appelant MM. Aoun et Hariri à s'entretenir pour briser la glace entre eux. Franchissant un nouveau cap dimanche, le prélat maronite avait ouvertement plaidé dans une homélie pour une conférence internationale qui se tiendrait sous les auspices des Nations unies et plancherait notamment sur une consolidation des bases institutionnelles de l’État libanais. Si May Khoreiche, vice-présidente du CPL pour les affaires politiques, confie à L'Orient-Le Jour que le rendez-vous à Bkerké avait été fixé mercredi dernier, il reste que le timing de l'entretien de la délégation aouniste avec le patriarche ne peut être tiré de ce contexte de pression exercée par le chef de l’Église maronite sur les protagonistes au pouvoir, dont le président de la République.
L'entretien intervient également dans la foulée de deux prises de position importantes formulées par le tandem chiite Hezbollah-Amal, au sujet du dossier gouvernemental. Le 1er février, brisant un long silence, le président de la Chambre, Nabih Berry, favorable à un cabinet dirigé par Saad Hariri, avait ciblé Gebran Bassil en soulignant qu'aucun camp ne devrait obtenir le tiers de blocage au sein d'un gouvernement de spécialistes. Quelques jours plus tard, c'est le secrétaire général adjoint du Hezbollah, Naïm Kassem, qui s'est invité dans la partie pour appeler MM. Aoun et Hariri à "arrondir les angles". Lundi, le bureau politique du mouvement Amal est revenu à la charge, critiquant l'insistance "de certaines parties à passer outre l'esprit de la Constitution et à créer de nouvelles traditions et règles" et appelant "ceux qui prétendent (brandir) le changement et la réforme" - un slogan du CPL - à "réviser leurs prises de position".
commentaires (19)
ILS SONT ENVOYÉS PAR BASSIL POUR DIRE AU PATRIARCHE QU,IL PERD PLUS SON TEMPS ET QU,IL VA VOIR DIRECTEMENT AVEC HASSAN NASRALLAH.
Gebran Eid
12 h 58, le 09 février 2021