Souad Chehadé, 85 ans, a toujours vécu dans le quartier de Khandak el-Ghamik, à Beyrouth. Comme la plupart des habitants du secteur, son appartement, insalubre à la base, a été fortement endommagé par les violentes explosions survenues le 4 août dans le port de Beyrouth. Ce jour-là, Souad, qui arrive à peine à se déplacer, s’est blessé au poignet alors qu’elle tentait de fuir le bâtiment. Son mari, âgé de 86 ans, est toujours sous le choc et n’a pas prononcé un mot depuis les explosions qui ont ravagé plusieurs quartiers de la capitale. Aucun officiel n’a frappé à leur porte depuis le drame, et le vieux couple compte sur le soutien de leur fils, Khaled, au chômage depuis quelques mois.
Pour l’instant, la famille n’a reçu que des aides alimentaires, mais elle a surtout besoin de réparer les dégâts. « Nous avons assez de lentilles, de riz et de bourghoul (blé concassé) pour l’instant. Ce qu’il nous faut, c’est du détergent, des médicaments, des ustensiles pour la cuisine et de nouvelles vitres », indique Souad. « Personne n’a proposé de nous aider à retaper la maison. Pour l’instant, ceux qui ont les moyens réparent, les autres attendent », souligne cette ancienne couturière, dont le fils a accroché des bouts de carton sur les fenêtres aux vitres brisées, en attendant de pouvoir les remplacer. Connu pour abriter de nombreux partisans du tandem chiite (Amal-Hezbollah), le quartier de Khandak el-Ghamik est avant tout un secteur résidentiel défavorisé qui abrite de nombreux petits commerces. Les habitants du quartier, qui s’estiment abandonnés par les autorités, assurent n’avoir été soutenus ni par les associations humanitaires ni par les partis politiques influents dans la région.
Hassan, 30 ans, est père d’un petit garçon de trois ans. Cet agent de sécurité est au chômage depuis 5 mois, mais il a réussi à réparer les dégâts grâce à ses maigres économies. « Je ne suis membre d’aucun parti politique et personne ne m’a demandé comment je m’en sortais après l’explosion. Mais les partis influents aident tous les habitants en général, peut-être que mon tour pour obtenir des aides n’est pas encore arrivé », estime-t-il. Au moment de l’explosion, Hassan faisait la sieste dans son appartement formé d’une seule chambre. « La porte d’entrée a volé en éclats et a atterri sur moi. Je m’en suis tiré avec quelques blessures, raconte-t-il. J’avais mis trois millions de livres de côté. Après les explosions, j’en ai donné la moitié à ma femme et je lui ai dit de rester au village avec notre fils en attendant que la situation se calme. J’ai utilisé le reste pour faire quelques réparations. Mon cousin, qui est menuisier, m’a offert ses services gratuitement », ajoute Hassan.
Dans l’épicerie de Bilal et Hanane, la vitrine, qui a volé en éclats en cette funeste journée du 4 août, n’a toujours pas été remplacée. L’appartement du couple n’a pas été épargné non plus. Installés dans un logement aux murs couverts de moisissure avec leurs trois enfants, Hanane et Bilal ne savent pas s’ils pourront réparer les dégâts de sitôt. « Suite à l’explosion, le plafond de la cuisine s’est fissuré. La chambre de ma cousine, qui vit avec nous, a été complètement détruite. Heureusement qu’elle n’était pas à la maison ce jour-là », soupire Hanane en montrant le lit jonché de débris. Lina, sa fille de 7 ans, est traumatisée et n’arrive plus à dormir. « Tous les soirs, je dois rester à côté d’elle jusqu’à ce qu’elle s’assoupisse. Elle a peur qu’une nouvelle explosion ne survienne et elle se réveille en sursaut plusieurs fois durant la nuit », confie Hanane.
« Faut-il que je me mette à voler ? »
Dans une des ruelles de Khandak el-Ghamik, Hassan Baalbacki, coiffeur de 40 ans, inspecte les dégâts et réfléchit au meilleur moyen de se procurer une nouvelle porte en métal pour sa boutique. « Si je veux installer une nouvelle porte, je vais devoir débourser une fortune. On me demande de payer 7 500 livres pour un dollar », soupire-t-il. « Pour faire des réparations, il va donc falloir que je verse l’équivalent de mes bénéfices sur une année. C’est absolument impossible. Faut-il que je me mette à voler pour subvenir à mes besoins ? » se demande Hassan. « On me dit que j’ai de la chance d’avoir échappé à la mort. On nous apporte du riz et des aides alimentaires. Mais ce n’est pas de ça que nous avons besoin. Il faut nous aider à réparer ce qui a été détruit pour retrouver un semblant de normalité », ajoute ce coiffeur.
Dans un immeuble adjacent au salon de coiffure de Hassan, l’appartement de Hussein Hijazi, chauffeur de taxi et père de famille de 65 ans, est jonché de débris de verre. Plus aucune fenêtre ne tient en place, et les vitres ont été remplacées par du nylon car « les réparations sont hors de prix ». « Je travaille sept à huit heures par jour et je gagne environ 70 000 livres par jour. Après avoir fait mes courses à la fin de la journée, il me reste environ 30 000 livres tous les soirs, ce qui ne me permet pas de faire réparer quoi que ce soit », confie Hussein, qui se dit « prêt à émigrer n’importe où ». Fériale Yatim et sa mère Hafiza ont également été touchées de plein fouet par les explosions du port. Uniques résidentes d’un immeuble classé monument historique et datant de l’époque du mandat français, elles ont besoin de procéder à de nombreuses réparations. Fériale, qui faisait la sieste dans sa chambre lorsque les explosions ont eu lieu, a été projetée hors de son lit. « J’ai tout de suite pensé qu’il s’agissait d’une attaque israélienne », raconte la jeune femme qui dit être « encore sous le choc ». « Nous ne sommes en contact avec aucun parti politique et n’avons reçu l’aide de personne jusqu’à présent. Seule la Croix-Rouge libanaise est passée nous voir pour constater les dégâts. Les autorités ne nous ont rien demandé non plus, souligne Fériale. L’étage du dessus a été fortement endommagé, mais il est inoccupé et nous n’en avons pas les clés. S’il n’est pas réparé bientôt, nous risquons d’avoir des fuites d’eau en hiver », ajoute-t-elle.
commentaires (3)
c'est pas les memes zozo qui se sont rués sur nous a coup de barres de fer, de pierre et autres joyeusetés ? ceux-la memes qui ont brûlé quelques symboles en bois, juste pour faire mal ? ceux-la enfin qui sont resté chez eux quand on a dit "marre" et sorti les armes ? AUUUUCUNE sympathie ! allez voir le Sayyed et le Istiz si je m'y trouve
Lebinlon
14 h 36, le 17 août 2020