
Bank Audi a révélé que 15,4 milliards de dollars de dépôts ont été retirés de l’ensemble des banques du pays durant l’année 2019. Photo d’archives AFP
Bank Audi a publié mardi son rapport d’audit de l’année 2019. Sans surprise, la banque affiche des pertes importantes à l’issue d’un exercice marqué par le début de la grave crise économique et financière que le pays traverse depuis près d’un an. Les résultats ont été audités par E&Y et la firme BDO, Semaan, Gholam & Co, qui ont également audité la BLOM Bank, et dont le rapport avait été publié courant juillet. Comme pour BLOM, les auditeurs ont émis une « adverse opinion » (opinion défavorable), signifiant qu’il faut généralement entreprendre un nouvel audit.
Les deux firmes ont émis cet avis pour plusieurs raisons, dont le manquement aux normes IFRS 9 (International Financial Reporting Standard) qui « standardise la présentation des comptes consolidés au niveau international et garantit leur transparence ». Ainsi, la Bank Audi n’inclut pas les « ajustements nécessaires » aux valeurs comptables. De plus, en raison de la crise économique et financière, de la décision du gouvernement démissionnaire de Hassane Diab de faire défaut sur la dette en devises – les eurobonds – en mars dernier et de la dépréciation de la livre libanaise (7 150 livres pour un dollar à l’achat et 7 000 livres à la vente selon l’application Sarraf Lebanon), « le management (de la banque) était incapable de proposer des estimations fiables de la valeur de (certains) actifs et d’autres instruments financiers ». Ces actifs concernent le portfolio de la dette libanaise – qui s’est élevée à 93,1 milliards de dollars à fin mai –, libellée en monnaie nationale et en devises, celui auprès de la banque centrale et celui des dettes du secteur privé (ménages et entreprises).
Baisse des dépôts
La banque a comptabilisé des pertes pour l’année 2019 s’élevant à 907,688 milliards de livres, soit 602,11 millions de dollars au taux de change officiel 1 507,5 livres. Alors que ses profits se sont établis à 754,590 milliards de livres pour l’année 2018, soit 500,56 millions de dollars. Cela équivaut à une baisse annuelle des profits de 220,29 % selon nos calculs. Les actionnaires ont donc subi des pertes de 2 289 milliards de livres, soit 1,52 million de dollars.
Les banques centrales, dont la Banque du Liban (BDL), devaient, à fin décembre 2019, 23 169,52 milliards de livres, soit 15,37 milliards de dollars à la Bank Audi, montant presque similaire à celui de la fin de l’année 2018 (24 793,68 milliards de livres). Les prêts au secteur privé se sont élevés à 15 461,67 milliards de livres, soit 10,25 milliards de dollars. Les dépôts des clients, quant à eux, sont tombés à 44 336,56 milliards de livres, soit 29,41 milliards de dollars, en baisse de 7,2 % selon nos calculs, par rapport à l’année précédente (47 777,07 milliards de livres ou 31,69 milliards de dollars). Le capital social, inchangé, a atteint selon nos calculs 2 455,66 milliards de livres, soit 1,63 milliard de dollars.
En plus du Liban, Bank Audi est présente dans neuf autres pays, dont la Jordanie. Une source bancaire a révélé que la banque avait reçu des offres d’achat pour cet établissement, sans fournir plus de détails. En mai, la banque libanaise avait entrepris des négociations pour vendre sa filiale en Égypte, mais en raison du Covid-19, l’opération est en suspens.
S’adressant à ses actionnaires, la banque a révélé que 15,4 milliards de dollars de dépôts ont été retirés de l’ensemble des banques du pays durant l’année 2019, dont 11,4 milliards uniquement durant le dernier trimestre. C’est la partie de l’année où la crise économique s’est accentuée, en plus de la crise politique qui a suivi en raison du mouvement de contestation débuté le 17 octobre 2019, ainsi que la démission du gouvernement de Saad Hariri III ce même mois. Le volume de crédits octroyés au secteur privé par les banques libanaises a diminué de 9,6 milliards de dollars, pour tomber à 49,8 milliards de dollars à fin décembre 2019.
Nos banquiers sont de véritables alchimistes... à défaut d'avoir transformé le plomb en or, ils ont réussi a transformer nos $ (arrivés frais) en Livres Libanaises. Bravo!!
15 h 24, le 13 août 2020