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Lifestyle - Patrimoine

À la rue Sursock, la renaissance de la maison Rayes

Datant de plus d’un demi-siècle, la villa aux accents italo-ottoman-français a été entièrement rénovée. Tania Rayes Ingea lui a redonné son lustre d’antan en y ajoutant le confort d’aujourd’hui.

L’entrée de la maison Rayes.

C’est à l’emplacement du palais Élias Sursock qu’a été construite la maison Rayes au milieu des années soixante. En plein cœur du prestigieux quartier grec-orthodoxe de Sursock se dressait autrefois l’opulente demeure du richissime homme d’affaires Élias Sursock, le fils d’Ibrahim Sursock et frère aîné de Nicolas et Michel Sursock.

Édifié vers la fin des années 1800 dans un modèle d’architecture libanaise brassant les styles vénitien et ottoman, en vogue au XIXème siècle, la demeure d’Élias Sursock fut démolie en 1965-1966 par décision de ses deux filles, Éva Sursock Rayes et Mélanie Sursock Kfoury. La succession ayant buté sur des problèmes de partage, et aucune des héritières n’étant en mesure de racheter le patrimoine de l’autre, les deux parties ont décidé de détruire la maison, et de se partager le coût de la vente du terrain. Chacune a obtenu ainsi la part qui lui revenait.

Vue de l’extérieur de la maison Rayes.


Avec des associés, Gabriel Rayes – fils d’Éva Sursock et un des pionniers de l’industrie des ascenseurs – va acquérir le terrain sur lequel seront construits les immeubles Boutros, Audi et Rayes. Ce dernier a en effet choisi de garder un lot afin d’entreprendre un projet immobilier. Mais son plan sera remis à plus tard, car Éva Sursock Rayes, qui a vécu dans une grande demeure entourée d’un jardin, n’entendait pas se contenter d’habiter un appartement. Elle désirait une maison particulière et un jardin où retrouver un morceau de son paradis perdu. Gabriel Rayes commande alors au bureau d’architecture Albert et Nicolas Menassa la construction d’une villa, sous la forme d’une mini-réplique de la maison dans laquelle sa mère était née et avait grandi. Les fondations du bâtiment devaient toutefois être susceptibles de supporter un immeuble, à l’avenir. Celui-ci sera construit dans les années 1980.

Vue de l’intérieur de la maison Rayes.

Les vestiges de l’héritage Élias Sursock

La Maison Rayes est immédiatement reconnaissable à ses trois arcades en marbre blanc. Quelques marches et nous voilà face à une porte blanche de style éclectique italien s’ouvrant sur un grand hall avec un plafond de plus de cinq mètres de haut et au dallage de marbre. Là, le regard est irrésistiblement attiré par le mur du fond entièrement tapissé de huit vitraux polychromes fabriqués en France. Combinant inspiration orientale et européenne, ces fragments de verre coloré sont emboîtés dans des panneaux décoratifs en marqueterie de noyer teinté noir, incrusté de nacre et de cuivre martelé, avec des calligraphies orientales qu’on attribuerait à l’artiste, ébéniste et créateur de mobilier éclectique et anticonformiste Carlo Bugatti (1856-1940), le père du constructeur automobile Ettore Bugatti et du sculpteur animalier Rembrandt Bugatti. Les portes, qui s’ouvrent sur les pièces de réception, sont de même facture, ornées de marqueterie de style Bugatti également. L’ensemble de ces éléments décoratifs, exceptionnels, proviennent du palais Élias Sursock. Ils participent au cachet d’un intérieur empreint d’une certaine majesté, mais aussi accueillant que chaleureux.

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Légèrement bombés avec le temps, parce que leur mastic a cédé ou que les plombs se sont détériorés, les vitraux ont été restaurés par la spécialiste Maya Husseini. « Et la boiserie par la Maison Michel Tarazi », signale l’hôtesse des lieux Tania Rayes-Ingea, petite-fille d’Éva Sursock, cofondatrice de l’agence Earlybird et auteure des ouvrages Portrait et palais de Beyrouth et Le centre-ville de mon père, parus en 2011 aux éditions La Revue phénicienne.


Dans la maison Rayes. Photos DR

Une maison, c’est toujours une mémoire

Ce lieu de vie empreint d’un style éclectique mêlant les influences italienne, ottomane, et française constitue un lieu d’ancrage de la mémoire familiale qui se manifeste de façon frappante chez Tania Ingea. Pour elle, chaque coin et recoin de la demeure portent une histoire : c’est là que ses parents se sont mariés ; là, qu’elle est née ; dans le jardin, elle avait joué avec son frère ; dans le salon près de la cheminée, sa grand-mère lui racontait ses voyages en Égypte et lui décrivait la demeure d’Élias Sursock, qui avait accueilli durant quelques mois, en 1919, le général Gouraud avant que celui-ci s’installe à la Résidence des Pins ; ou encore les dîners de famille qui se déroulaient sous le regard des aïeux représentés sur les murs de la salle à manger, et où le vieux parquet en chêne d’origine, aujourd’hui décapé et huilé, a retrouvé son lustre d’antan.

Opération lifting

Après le décès de ses parents et de son frère, la propriété est restée inoccupée pendant des années. Aujourd’hui, sous la houlette de Tania Ingea, la maison reprend vie. Elle ouvre ses portes à un nouveau chapitre de son histoire : sa reconversion en chambres d’hôtes.

Les travaux de rénovation ont été confiés à son mari Joe Ingea, architecte et industriel designer diplômé de la Scuola Politecnica di Design di Milano et de l’Académie libanaise des beaux-arts, dont certaines des créations ont même été éditées à l’étranger, comme la montre Davidoff et les bagages pour la marque italienne MH WAY.

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Pour intégrer tout le confort moderne, et opérer un relooking déco, les trois chambres, les trois salles de bains et le salon privé des invités ont subi une transformation radicale. Seules les poignées des portes, les fenêtres et le sol d’origine ont été conservés afin de garder l’esprit hôtel particulier. Lumineuses et spacieuses, ouvrant leur porte-fenêtre sur un jardin généreusement ensoleillé, les chambres jouent les teintes délicates, bleu, beige et vert, créant ainsi un espace zen et reposant. Ici, la technologie est partout, mais se veut invisible. Et les plafonds, hauts de plus de 5 mètres, cachent une climatisation totalement silencieuse. L’espace offre ainsi, au cœur de Beyrouth, un accueil chaleureux et convivial dans un cadre serein.

C’est à l’emplacement du palais Élias Sursock qu’a été construite la maison Rayes au milieu des années soixante. En plein cœur du prestigieux quartier grec-orthodoxe de Sursock se dressait autrefois l’opulente demeure du richissime homme d’affaires Élias Sursock, le fils d’Ibrahim Sursock et frère aîné de Nicolas et Michel Sursock. Édifié vers la fin des années 1800 dans...

commentaires (1)

Même photo prise sous 3 angles (avec une légende intérieur et extérieur...). Cet article aurait mérité davantage d'illustration.

Georges Lebon

14 h 28, le 29 mai 2020

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Commentaires (1)

  • Même photo prise sous 3 angles (avec une légende intérieur et extérieur...). Cet article aurait mérité davantage d'illustration.

    Georges Lebon

    14 h 28, le 29 mai 2020

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