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Politique - Exécutif

En pleine épidémie, le gouvernement attaqué par ses alliés et ses adversaires

Gebran Bassil cherche-t-il, à travers les nominations à la BDL, à régler leurs comptes à Saad Hariri et Nabih Berry réunis ?

Saad Hariri, Nagib Mikati, Fouad Siniora et Tammam Salam : les quatre anciens Premiers ministres partis en guerre contre l’actuel gouvernement. Photo ANI

En pleine crise sanitaire et alors que le Liban est enfoncé jusqu’au cou dans les dettes, les camps politiques internes continuent à se déchirer comme si de rien n’était. Les rivalités politiques se cristallisent particulièrement, cette semaine, autour des nominations à la Banque du Liban (BDL). Le Conseil des ministres, qui se réunit aujourd’hui pour examiner en particulier le problème des Libanais bloqués à l’étranger, doit nommer au cours d’une autre réunion jeudi quatre nouveaux vice-gouverneurs et désigner les membres de la commission de contrôle des banques. Aussi bien l’ancien chef du gouvernement Saad Hariri que le président de la Chambre, Nabih Berry, accusent le camp présidentiel, et Gebran Bassil en particulier, de chercher à leur régler leur compte. Au sens figuré comme au sens propre.

L’hostilité entre Hassane Diab et le camp des anciens chefs de gouvernement est clairement ressortie hier dans deux déclarations distinctes, l’une émanant du chef du CPL, Gebran Bassil, l’autre des anciens Premiers ministres.

C’est ainsi que M. Bassil a salué hier la décision « audacieuse » du gouvernement de vérifier les comptes de la Banque du Liban, considérée par certains comme l’une des parties responsables de la grave crise économique et financière que traverse le pays. « Proposée par le chef de l’État, la décision du gouvernement d’effectuer une vérification “ciblée” des comptes de la BDL pour comprendre la situation actuelle est audacieuse et nécessaire », a écrit l’ancien chef de la diplomatie libanaise sur son compte Twitter. « Elle doit être suivie par une vérification “minutieuse” qu’effectuerait une société internationale sans lien avec la BDL et une vérification “pénale” dans le cadre de la lutte contre la corruption, qui révéleront tous les mouvements des comptes », a-t-il ajouté. Ce tweet couronne plusieurs déclarations et effets d’annonce faits ces dernières semaines par M. Bassil sur le thème de la lutte contre la corruption.

Selon des sources politiques, ce que redoute le camp de Saad Hariri et des anciens chefs de gouvernement, c’est l’intention déclarée de M. Bassil de procéder à une « vérification minutieuse » et même « pénale » des comptes passés de la BDL, à la recherche d’irrégularités et de secrets que le gouverneur de la BDL refuse de divulguer sur certaines opérations. Notamment les noms des banquiers qui ont enfreint l’éthique de la profession et ont mis leurs fonds à l’abri, alors que les banques avaient imposé un contrôle des capitaux officieux interdisant aux épargnants de transférer leurs fonds à l’étranger.


(Lire aussi : Nominations financières : la querelle Futur-CPL ressurgit)

« Cherchez le trio »

Bien entendu, le camp de M. Hariri ne voit pas du tout les choses sous cet angle. C’est ainsi que les anciens Premiers ministres Saad Hariri, Nagib Mikati, Fouad Siniora et Tammam Salam ont dénoncé hier, dans un communiqué commun, la volonté du gouvernement de Hassane Diab d’effectuer des nominations administratives sans se baser sur les compétences des personnes nommées, « en ignorant les demandes de réforme du soulèvement » populaire du 17 octobre. « Alors que le Liban souffre de crises multiples, politiques, économiques, financières, administratives et sectorielles, l’épidémie de coronavirus vient approfondir encore plus l’étendue de ces crises », ont écrit les anciens présidents du Conseil. « Dans ce contexte, les Libanais voient comment leur gouvernement se dirige vers des nominations qui ont un relent de volonté de mainmise sur les positions administratives, financières et monétaires de l’État, afin d’en prendre le contrôle sans se préoccuper des règles de compétence et de mérite », ont-ils dénoncé. « Il n’est plus possible pour le Liban de lutter contre les dangers actuels, à tous les niveaux, en continuant d’observer une politique de partage du gâteau, sans mettre sur pied un plan de sauvetage et de réforme qui remettrait le pays sur la bonne voie », ont-ils ajouté.Plus largement, les milieux de l’ex-Premier ministre Saad Hariri accusent le CPL de faire le jeu du Hezbollah, qui cherche à mettre la main sur les organismes financiers du pays. Pour eux, le gouvernement d’indépendants « n’est qu’une tromperie », le cabinet de M. Diab étant celui de la répression du soulèvement populaire, comme le prouve le démantèlement des tentes dans le centre-ville, les velléités de normalisation avec le régime Assad et de la légitimation des armes du Hezbollah. De son côté, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a exprimé hier ses critiques quant aux nominations en cours. « Malgré ses nouvelles têtes et son profil technique, le gouvernement ne pourra pas effectuer des nominations sur la base d’un mécanisme clair et de critères d’intégrité et de compétence. La raison ? Cherchez le trio qui n’est pas du tout à l’aise avec ce qui se passe », a déclaré M. Geagea. « Tant que ce trio accaparera le pouvoir au Liban, il n’y aura aucune solution », a-t-il ajouté, dans une allusion au CPL et au tandem chiite.


Le gouvernement à nu

Si les querelles entre camps adverses sont habituelles, il est plus difficile de comprendre comment le gouvernement a réussi à se mettre à dos le président de la Chambre, Nabih Berry, l’un des artisans de sa formation, au point que ce dernier – dans le sillage de ce qu’avait fait auparavant Sleiman Frangié – a menacé de retirer « ses » ministres du gouvernement, mettant ainsi à nu une équipe qui s’efforce encore de prouver qu’elle est formée d’indépendants.

« Notre participation au gouvernement sera réévaluée en fonction des décisions qui seront prises », avait annoncé la semaine dernière M. Frangié, en apprenant ce qui se manigançait comme nominations. Constatant que ce coup de semonce avait été ignoré, le président du Parlement avait demandé à rencontrer le Premier ministre. Mercredi dernier, au cours d’un entretien qualifié de « tendu », M. Berry avait expliqué à Hassane Diab que « les nominations ne passeront pas », avant d’ajouter : « Personne ne réussira à m’écarter », selon notre chroniqueur politique Philippe Abi-Akl. Le président de la Chambre reproche au Premier ministre d’avoir passé avec le chef de l’État un accord « secret » visant, sur le long terme, à l’évincer et à le sortir du jeu politique, et sur le court terme, à remplacer Raëd Charafeddine, premier vice-gouverneur de la BDL, dont le mandat a expiré mais dont il exige le renouvellement. Selon plusieurs milieux politiques, il est fort probable que Nabih Berry, sous l’effet de sa menace, obtienne satisfaction. En attendant d’en avoir le cœur net jeudi lors du Conseil des ministres, on retient le bon point accordé samedi au gouvernement, sur le plan sanitaire, par le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui s’efforce d’arrondir les angles. Quoi qu’il en soit, pour de nombreux observateurs, la feuille de vigne qui dissimulait encore la résurgence du clientélisme a fini par tomber et le gouvernement de Hassane Diab ne devrait pas survivre à l’épidémie du coronavirus.



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commentaires (13)

Me le virus attaquez tous ceux qui prétendent Ns gouvernez,rayez les de la liste des Libanais je vous en supplie,qu'ils ne soient pas plus fort que vous???

Mona Joujou Dfouni

18 h 16, le 31 mars 2020

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Commentaires (13)

  • Me le virus attaquez tous ceux qui prétendent Ns gouvernez,rayez les de la liste des Libanais je vous en supplie,qu'ils ne soient pas plus fort que vous???

    Mona Joujou Dfouni

    18 h 16, le 31 mars 2020

  • Imputant son éviction du ministère des Affaires étrangères à Nabih Berry et à Saad Hariri, Gebran Bassil la considère comme une expulsion d'un locataire qui ne paie pas son loyer... Il ne sait plus comment faire pour les critiquer. Hélas, il perd son temps. Il était vain d'aller à Davos !

    Un Libanais

    14 h 20, le 31 mars 2020

  • Cela fait des années que le Liban n'est plus une nation respectable, mais un espace occupé par divers "salons" à Aïn el-Tine, Tripoli, siège du CPL, Maison du Centre, BDL, etc., reliés entre eux par leur corruption partagée qui a mené le pays à la catastrophe actuelle. Et ces gens ont le culot incroyable de protester, menacer... on aura tout vu et entendu de leur part, sauf du positif et constructif ! Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 39, le 31 mars 2020

  • Samir Geagea a parfaitement raison : tant que le trio Hezbollah-Amal-CPL gouverne le pays il n'y aura ni de solutions ni de reformes.

    EL KHALIL ABDALLAH

    11 h 28, le 31 mars 2020

  • Mr. Corona pourrait peut etre faire un peu le menage parmi les ripoux?

    Marie-Hélène

    10 h 55, le 31 mars 2020

  • PATHÉTIQUES: et les manigances de beau-père et gendre, et l'attitude des ex-PM, dépités que ce ne soit plus chasse gardée, et le cinéma de Berri qui ne trompe personne j'espère.

    Marionet

    10 h 50, le 31 mars 2020

  • En prenant une décision d auditer les comptes de la BDL (une première dans l histoire récente du Liban) afin de déterminer les causes de l effondrement économique, le gouvernement s est attisé la foudre de toute la classe politique qu une seule chose rassemble: la corruption !

    Henri NAJM

    10 h 31, le 31 mars 2020

  • LEUR SOUCI A TOUS : SE PROTEGER ET PROTEGER LEURS AVANTAGES ET ACQUIS. DU DESTIN DU PEUPLE ILS S,EN FOUTENT TOUS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 53, le 31 mars 2020

  • Tous logés à la même enseigne. Ce pays est damné. Même le Corona virus ne veut pas d'eux......

    Tabet Karim

    09 h 50, le 31 mars 2020

  • Tous devraient se taire et rentrer chez eux, dégager... et J'inclus Riad Salameh...Ils ont causé assez de dégâts...

    Rene MALEK / AVANTIS

    08 h 54, le 31 mars 2020

  • Monsieur Gendre serait peut-être moins satisfait si on allait éplucher avec la même minutie les comptes du ministère des ressources hydrauliques et électriques qu'il dirige (directement ou indirectement) depuis plus de 10 ans. "le gouvernement d’indépendants « n’est qu’une tromperie ". C'était évident dès avant même son annonce. Et Geagea a mille fois raison: "Tant que ce trio accaparera le pouvoir au Liban, il n’y aura aucune solution".

    Yves Prevost

    07 h 39, le 31 mars 2020

  • C’est ainsi que les anciens Premiers ministres Saad Hariri, Nagib Mikati, Fouad Siniora et Tammam Salam ont dénoncé hier, dans un communiqué commun, la volonté du gouvernement de Hassane Diab d’effectuer des nominations administratives sans se baser sur les compétences des personnes nommées, faite moi rire, ils ont oublié que le Liban agonise à cause de leurs incompétences, tout ca pour noyer le poisson et empecher la poursuite des corrempus et sur leur tete le gouverneur de BDL.

    youssef barada

    01 h 21, le 31 mars 2020

  • Que des corrompus à ne plus en finir... même le Virus est plus raisonnable !

    Chour Hassan

    01 h 13, le 31 mars 2020

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