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Politique - Chambre des députés

Des séances parlementaires en ligne bientôt ?

La technologie est disponible et permettrait d’assurer la fluidité des débats et la transparence des votes, assurent les experts.

Pour des réunions en visioconférence, il faut « trouver le moyen technique adéquat pour s’assurer du quorum et vérifier que chaque parlementaire était effectivement devant son écran durant le vote ». Photo d’archives/ANI

À l’instar des nombreux pays touchés par le Covid-19, le Liban se trouve contraint depuis quelques semaines de vivre au ralenti du fait du confinement imposé aux citoyens, mais aussi aux fonctionnaires et représentants d’un grand nombre d’institutions. C’est le cas du Parlement qui a suspendu ses réunions en attendant de trouver un palliatif permettant aux députés d’éviter les risques encourus par une présence massive à l’hémicycle. Une paralysie qui risque de se répercuter lourdement sur la productivité des parlementaires appelés à plancher sur une législation d’urgence pour répondre à une multitude de défis socio-économiques et sanitaires.

Jeudi, le Parti socialiste progressiste a lancé un appel exhortant le Parlement à se réunir « en dehors du cadre traditionnel » en recourant aux visioconférences, estimant qu’une telle possibilité est « légale et constitutionnelle ». Un avis réitéré en soirée par le chef du PSP, Walid Joumblatt, qui a insisté, lors d’un entretien télévisé, sur l’importance d’adopter par les voies virtuelles certaines lois sans plus tarder, notamment la loi d’amnistie susceptible d’épargner aux centres pénitentiaires une catastrophe qui plane à l’horizon.

Un message qui rejoint celui lancé quelques jours plus tôt par le président du Parlement, Nabih Berry, qui a appelé lundi dernier à « tenir des séances législatives et de contrôle, en cas de besoin par visioconférence, car cela permet d’économiser du temps et de limiter le déplacement de personnes ». « La gestion des séances peut se faire efficacement et les débats peuvent être enregistrés pour les archives », avait ajouté M. Berry. Selon un membre du bloc berryste, Fadi Alamé, le chef du législatif a aussitôt demandé au secrétariat général du Parlement de plancher sur la question en confiant également au président de la commission parlementaire de la Technologie, Nadim Gemayel, d’étudier les moyens techniques et le cadre juridique permettant la délocalisation du travail législatif.


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Des précédents

Cette décision a suscité une série d’interrogations sur la légalité de la procédure, mais aussi sur la faisabilité d’un tel projet en termes d’infrastructure et d’organisation susceptible de garantir la fluidité, la sécurité et la transparence des débats et du vote des textes de lois. En affirmant que le fait de tenir les séances parlementaires en dehors du siège de la Chambre était « légal et constitutionnel », le PSP s’est basé sur des précédents, soit l’élection des présidents Bachir Gemayel (1982), René Moawad (1989) et Élias Hraoui (1989) qui ont respectivement eu lieu à Fayadiyé, Qley’aate (Akkar) et Chtaura. La Constitution prévoit en effet que « la Chambre et le pouvoir exécutif siègent à Beyrouth », sans plus de précision. Une règle qui avait toutefois été dépassée par les « circonstances exceptionnelles » qui prévalaient à l’époque. « Aujourd’hui, nous sommes également en guerre contre le coronavirus », devait commenter Walid Joumblatt jeudi.

Hadi Rached, professeur de droit, va plus loin en se basant sur un principe de droit général selon lequel « tout ce qui n’est pas explicitement interdit par la loi est donc autorisé ». « La Constitution ne dit rien sur l’éventualité d’organiser des débats parlementaires et un vote électronique par visioconférence, ce qui laisse le champ ouvert à cette possibilité. Il faudra toutefois trouver le moyen technique adéquat pour s’assurer du quorum et vérifier que chaque parlementaire était effectivement devant son écran durant le vote », commente le juriste. M. Rached rappelle au passage que le droit commercial libanais autorise, depuis 2019, les réunions par visioconférence et le vote des membres des conseils d’administration des entreprises, ce qui, selon lui, peut être applicable au travail législatif.


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Vote par SMS

Selon Mohammad Najem, directeur exécutif de SMEX (Social Exchange), une ONG spécialisée dans la communication en ligne, il n’est pas nécessaire de traiter toutes les activités du Parlement en ligne. « Le vote par exemple peut se faire soit par voie de poste ou par SMS, soit à travers les deux mesures combinées », suggère l’expert. « À condition toutefois que le principe de la publicité des séances et de leur transparence soit assuré, ce qui malheureusement n’était pas toujours le cas sous la coupole du Parlement », dit-il.

Autant de problématiques auxquelles la nouvelle technologie semble toutefois avoir largement paré.

Selon le député Nadim Gemayel, qui étudie depuis plusieurs jours la faisabilité du projet, les nouveaux logiciels en place permettent de répondre à toutes ces interrogations et assurent une identification crédible des participants, de leur présence effective, du quorum et du vote effectué. « Tout vote doit impérativement être identifié par le biais d’une adresse mail officielle potentiellement combinée à un numéro de téléphone permettant de bien cerner l’ensemble du processus. Le décompte des voix et l’identification des votants sont systématiquement enregistrés », confie le député à L’Orient-Le Jour, assurant qu’aucune duperie n’est pas possible avec un tel système.

On apprenait également que les membres de la commission parlementaire de la technologie qu’il préside ont déjà fait leur choix en matière de logiciel à adopter, de sorte à protéger les séances parlementaires de toute opération de piratage malveillante.

La question qui reste en suspens est toutefois de voir comment assurer le principe de la publicité de ces séances prévu à l’article 51 du règlement intérieur de la Chambre ainsi que la participation des journalistes et leur accès à ces débats virtuels pour les retransmettre au public. « Il s’agit d’une question technique actuellement débattue et qui devra être prochainement résolue », indique M. Gemayel. Ce serait donc, à en croire ses propos, une affaire de quelques jours avant que le projet ne puisse se concrétiser, permettant aux députés de reprendre à distance leurs activités.


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Transparence

Selon un expert informatique, les réunions et débats en ligne sont une opportunité en or pour pouvoir enfin assurer la transparence des votes, imposée par la technicité même du logiciel employé. « Ce sera une occasion de mettre un terme au chaos qui prévalait durant les séances parlementaires où on ne savait vraiment pas qui votait pour quel texte et si le quorum était véritablement assuré », souligne l’expert qui dit toutefois « douter » que le président de la Chambre puisse avaliser ce projet. « Ce système ne lui convient pas dans la mesure où il perdra tout contrôle sur l’issue des votes », dit-il.

Dans ce cas de figure, le Liban serait obligé de suivre l’exemple français consistant, pour les blocs politiques en présence, de déléguer un ou deux représentants à l’hémicycle pour les représenter, un moyen efficace pour réduire les risques tout en assurant la continuité du travail législatif.

Une mesure que le PSP du moins dit ne pas approuver, d’abord pour les risques, même minimes, qu’elle recèle, mais surtout parce qu’elle « ne permet pas la participation de tous les députés aux débats, mais d’un nombre restreint », souligne la responsable du département légal du PSP, Suzanne Ismaïl.


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commentaires (4)

Il faut corriger le tir: Pour sortir les manifestants de la place des martyrs l'état a détruit leurs tentes...il aurait dû, et doit, détruire le parlement qui abrite une majorité d'inutiles... Koulouna Lil Watan LÉBNÈN!!

Wlek Sanferlou

14 h 21, le 28 mars 2020

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Commentaires (4)

  • Il faut corriger le tir: Pour sortir les manifestants de la place des martyrs l'état a détruit leurs tentes...il aurait dû, et doit, détruire le parlement qui abrite une majorité d'inutiles... Koulouna Lil Watan LÉBNÈN!!

    Wlek Sanferlou

    14 h 21, le 28 mars 2020

  • Ils s’en serviront un jour a leur convenance comme moyen d’empêcher les manifestants de bloquer ou de perturber les séances parlementaires……..

    JAF

    13 h 44, le 28 mars 2020

  • quelle mascarada un parlement d operette corrompu qui devient indispensable pour légiferer en tant de crise sanitaire il est temps de le dissoudre et et prévoir des élections libres et propres.

    youssef barada

    12 h 50, le 28 mars 2020

  • YIA 3AYNE ! LORSQU,ILS SE REUNISSENT ILS N,ABOUTISSENT A RIEN ET S,INSULTENT. COMMENT A TRAVERS LES PETITS ECRANS ? ET LA PAGAILLE CONTINUERA...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 02, le 28 mars 2020

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