Le président libanais Michel Aoun. Photo d'archives. REUTERS/Mohamed Azakir
Le président libanais, Michel Aoun, s'est solennellement adressé dimanche aux Libanais, annonçant que la situation actuelle au Liban, face à la propagation rapide du coronavirus, constitue un état d'urgence sanitaire qui nécessite une mobilisation générale, alors que 99 cas ont jusqu’à ce jour été détectés dans le pays.
"C'est la première fois en près d'un siècle que le Liban fait face à une épidémie, celle du coronavirus, classée il y a quelques jours par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comme pandémie mondiale. Ce virus se transmet de diverses manières et peut menacer la vie. Il traverse les frontières des régimes et des États", a déclaré le chef de l'Etat. Il a souligné que "la science, n'ayant pas encore été en mesure de trouver des moyens de prévention ou un traitement efficaces, il est nécessaire de prendre les plus hauts niveaux de prévention et de protection pour limiter la vitesse de la propagation". "Ces dernières semaines, nous avons pris au plus vite des mesures anticipées permettant d'affronter ce coronavirus avec détermination, volonté et conscience", a-t-il affirmé. Il a dans ce cadre salué le fait que "les différents secteurs de la santé ont étroitement collaboré avec le Premier ministre, Hassane Diab, et la commission ministérielle pour la prévention du coronavirus" et le fait que "toutes les mesures nécessaires ont été prises avec une rapidité exemplaire pour faire face aux risques de cette épidémie et limiter sa propagation dans notre patrie et parmi nos concitoyens". Le chef de l'Etat a encore souligné que ces mesures ont été "d'autant plus difficiles à prendre vu les conditions économiques et financières que connaît le pays".
"Aujourd'hui, face à la propagation rapide de cette épidémie, à l'incapacité mondiale et locale de la contenir jusqu'à présent, et au nombre élevé de personnes qui en souffrent, le Conseil des ministres se réunit pour une session extraordinaire, afin de promulguer une série de mesures exceptionnelles et temporaires, qui seront annoncées à l'issue de la session", a annoncé le président Aoun. Et d'ajouter que "la situation actuelle constitue un état d’urgence sanitaire nécessitant une mobilisation générale sur tout le territoire".
Il a encore déclaré que "face à la santé de chaque citoyen, toutes les considérations politiques étroites tombent. Ce n'est absolument plus le moment de marquer des points, ni de polémiquer, encore moins de chercher à en tirer des bénéfices politiques car cette épidémie ne fait pas de distinction entre partisan et opposant". Et le chef de l'Etat d'insister que ce moment doit être "l'heure de l’union sacrée et de la solidarité nationale".
"Ni une prison ni une punition"
"Je ne transigerai pas pour assurer la protection nécessaire à tout citoyen et résident, de même je veillerai à la prise en charge de toute personne atteinte", a par ailleurs déclaré le président de la République. Et d'appeler tous les citoyens à "respecter les alertes et les directives médicales requises annoncées et publiées par les institutions officielles". "Il nous faut également apprendre à être responsables et solidaires les uns envers les autres en se confinant chez soi et en évitant tout rassemblement", a-t-il poursuivi.
"Ces jours difficiles que nous traversons, quelle que soit leur durée, ne sont ni une prison ni une punition. Chacun d’entre nous est invité à poursuivre son travail, depuis son domicile, de la manière qu'il juge appropriée pour que nos institutions restent aussi vivantes et efficaces que possible", a-t-il ajouté. Il a encore invité les Libanais à profiter de ces journées "aussi longues soient-elles, pour prouver que nous sommes un peuple uni, digne de la vie et capable de surmonter ses difficultés".
Le chef de l'Etat a encore "rendu hommage à toutes les personnes qui se sont portées volontaires pour aider au combat médical et humain dans nos hôpitaux" et au "courage du personnel médical et infirmier de nos hôpitaux publics et privés qui sont en premières lignes du combat et dont certains ont été touchés par l’épidémie".
"Notre unité nationale a été et restera la source de notre force et notre bouclier de défense. Grace à elle, nous avons acquis une immunité et aujourd’hui elle va renforcer encore plus notre solidité en nous faisant gagner la partie contre cette épidémie", a ajouté le chef de l'Etat, qui a conclu en affirmant que le Liban "retrouvera au plus vite le cours de sa vie".
L’état de mobilisation générale, c'est quoi?
Le chef de l'Etat a fait ces déclarations à l'ouverture d'un Conseil des ministres d'urgence et peu après d'une réunion du Conseil supérieur de défense, à Baabda, qui a demandé aux autorités de décréter la mobilisation générale pour lutter contre la propagation du nouveau coronavirus. Dans un bref communiqué lu à l'issue de la réunion, le général Mahmoud Asmar, secrétaire général du Conseil supérieur de défense, a souligné que le président de la République "a estimé que la situation nécessite un état d'urgence sanitaire (...) en vue d'une mobilisation générale". "Le Conseil supérieur de défense a décidé de demander au Conseil des ministres de décréter la mobilisation générale (...) et à la fin de la réunion, il a été demandé aux administrations publiques et à la direction militaire d'établir des rapports sur la situation et de les transmettre aux autorités", a ajouté le général Asmar.
Selon l'alinéa 1 de l'article 2 de la loi sur la Défense nationale, "Si la nation, ou une partie de la nation, ou l'un de ses secteurs publics ou encore un groupe de sa population ont été confrontés à un danger, il est possible de décréter : a- L'état de mobilisation partielle ou générale afin de limiter l'exposition de la population et des infrastructures vitales au danger, et d'assurer les opérations de mobilisation et le recours aux forces armées. b- L'état de mobilisation partielle ou générale afin d'appliquer certains ou la totalité des plans décidés".
Selon des informations rapportées par notre correspondante au palais de Baabda, Hoda Chedid, des représentants des syndicats de plusieurs professions libérales et d'organisations assistaient à la réunion gouvernementale. Il s'agit notamment du président du syndicat des médecins Charaf Abou Charaf, du président de la Croix-Rouge libanaise Antoine Zoghbi, du président du syndicat des hôpitaux Sleiman Haroun, de la présidente du syndicat des infirmiers et infirmières Mirna Doumit. Ces responsables seront chargés de présenter au cabinet la situation sanitaire actuelle.
Dans le cadre des mesures restrictives mises en place par les autorités pour limiter l'expansion du coronavirus, les autorités ont par ailleurs décidé de fermer ce soir à minuit les postes-frontières de Masnaa et Qaa entre le Liban et la Syrie.
(Lire aussi : Comment réussir son auto-isolement ?)
Patrouilles
Les forces de l'ordre ont en outre multiplié ce week-end les patrouilles pour s'assurer de la fermeture des lieux publics. Dimanche, la municipalité de Beyrouth a dû exhorter des dizaines de Libanais à évacuer la corniche de la capitale. Sur des photos et vidéos publiées notamment sur les réseaux sociaux, on pouvait voir des dizaines de personnes flâner ou faire leur jogging sur la corniche de Beyrouth. Face à cet afflux de promeneurs, et dans un contexte d'appel à respecter une forme de "distanciation sociale", un véhicule de la municipalité de Beyrouth exhortait, dans un message diffusé par haut-parleur, les gens à "évacuer immédiatement la Corniche".
Vendredi, le ministre de l’Éducation, Tarek Majzoub, avait demandé aux chefs d'établissements scolaires du pays de prolonger la fermeture de leurs institutions jusqu'au 22 mars prochain. De son côté, la ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, avait annoncé la prolongation de la suspension des audiences judiciaires jusqu'au 20 mars inclus. En outre, les banques ont fermé leurs portes au public aujourd'hui, afin d'effectuer des travaux de désinfection dans leurs locaux, selon l'Association des banques. Quant à la Banque du Liban (BDL), elle a appelé les établissements de crédit à valider "en priorité" les transferts bancaires servant à régler les achats de médicaments et des équipements médicaux nécessaires dans le cadre de la lutte contre la pandémie.
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commentaires (9)
Urgence de MORALE!!!
Christine KHALIL
16 h 51, le 17 mars 2020