Il aura fallu moins d’une heure aux députés, réunis hier en session plénière pour la première fois depuis le début du mouvement de contestation du 17 octobre, pour passer en revue la quarantaine d’articles du budget de 2020 et procéder à son approbation. Le texte, qui avait été adopté dans la précipitation par le gouvernement Hariri III quelques jours avant sa démission, n’a été que légèrement modifié par la commission des Finances et du Budget et ne témoigne pas de l’urgence économique et financière à laquelle fait face le pays. Un budget pour la forme donc, alors que ce dernier est censé être un outil de taille dans la mise en œuvre des réformes structurelles attendues. Le nouveau Premier ministre, Hassane Diab, s’est contenté de préciser en début de séance que son gouvernement se réserve le droit d’amender le texte en émettant des décrets dans ce sens, une fois qu’il aura obtenu la confiance du Parlement.
Une équation à deux inconnues
Signe de la nonchalance ambiante, les députés de la nouvelle majorité gouvernementale qui ont voté en faveur du texte l’ont fait sans savoir sur quelles bases les estimations de ses dépenses et ses recettes ont été calculées. Ni le rapport de la commission des Finances et du Budget ni la version finale du budget 2020, consultés par L’Orient-Le Jour, ne précisaient les prévisions de croissance et d’inflation pour l’année en cours. Loin du ratio déficit public/PIB surréaliste à 0,63 % annoncé mi-octobre par l’ancien gouvernement, celui-ci devrait osciller autour des 6-7 % selon plusieurs estimations concordantes, prenant en considération une importante inflation (due notamment à une dépréciation de la livre sur le marché parallèle) et une croissance négative.
Ainsi, les dépenses publiques prévues pour 2020 sont estimées à 18 232 milliards de livres (environ 12 milliards de dollars, au taux de change officiel) pour l’exercice 2020, tandis que les recettes publiques doivent atteindre 13 395 milliards de livres (environ 8,8 milliards de dollars). Le déficit budgétaire serait donc de 4 837 milliards de livres, auxquels il faut ajouter les 1 500 milliards de livres d’avances du Trésor à Électricité du Liban, ce qui signifie que le déficit public atteindra 4,2 milliards de dollars. À titre comparatif, et selon les derniers chiffres disponibles des comptes publics, le déficit public a atteint 4,02 milliards de dollars à fin octobre, avec des dépenses à 13,4 milliards de dollars et des recettes à 9,38 milliards de dollars.
Le déficit public pourrait être rapidement revu à la hausse car il est fort probable que le gouvernement Diab demande une augmentation de l’avance du Trésor à EDL pour l’année 2020, si aucune mesure n’est prise d’ici là pour une hausse des tarifs de l’électricité. Le budget de 2020 prévoit également une baisse significative (de 40 % par rapport à 2019) des avances du Trésor destinées à EDL. Cette baisse prenait en considération le début de la mise en œuvre du plan de réforme du secteur de l’électricité et la hausse de production qui devait en découler. Mais l’exécution du plan, déjà retardée par les tergiversations politiques, est complètement suspendue depuis la démission du gouvernement Hariri III fin octobre. Résultat, EDL a déjà fait savoir que la baisse de sa production allait se poursuivre en continuant de se traduire par une hausse des heures de coupure.
(Lire aussi : Un danger et un double défi, l’édito de Michel TOUMA)
Impôt sur le chiffre d’affaires des banques
Les dépenses publiques devraient toutefois être moins importantes qu’en 2019, principalement à travers une baisse considérable du service de la dette pour l’année 2020, d’environ 4 500 milliards de livres, à travers un accord entre le ministère des Finances et la Banque centrale. La BDL, qui détient plus de la moitié de la dette en livres, s’est engagée à reverser au Trésor les coupons (les intérêts) de ces obligations pour l’année 2020. Plusieurs postes de dépenses courantes (entretien, équipements...) ont également été revus à la baisse. Le budget 2020 prévoit aussi la suppression de l’Agence nationale pour la garantie des investissements (créée en 1977), mais n’évoque pas la vingtaine d’autres établissements publics qui devaient connaître le même sort.
Côté recettes, les députés ont voté l’impôt exceptionnel (valable pour l’exercice 2020 seulement) de 2 % sur le chiffre d’affaires des banques réalisé en 2019, et ce malgré la forte opposition de l’Association des banques du Liban. Ils ont maintenu la taxe sur les générateurs votée pour la première fois dans le budget 2019, mais l’ont baissée de 50 000 à 15 000 livres par générateur et par an. S’agissant des recettes non fiscales, les députés ont voté deux dispositions obligeant les opérateurs de téléphonie mobile et la Direction du port à transférer leurs revenus directement au Trésor, sur son compte à la BDL, et ce de manière bihebdomadaire.
Par ailleurs, les députés ont approuvé les articles prévoyant de relever de 5 millions à 75 millions de livres libanaises (3 300 à 50 000 dollars au taux officiel) les plafonds des dépôts bancaires en livres garantis par l’État au Liban ; une mesure de soutien aux industriels à travers une aide correspondant à 5 % de leurs exportations ; et une mesure suspendant pendant six mois les procédures punitives à l’égard des personnes connaissant des difficultés pour rembourser les prêts subventionnés immobiliers, agricoles, industriels et touristiques.
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49 pour, 13 contre, 8 abstentions et... 58 absents
En votant le budget, la Chambre a-t-elle violé la Constitution ?
commentaires (11)
HARIRI A TRAHI LES MANIFESTANTS EN GARANTISSANT UN QUORUM A LA CHAMBRE POUR ENSUITE VOTER CONTRE LE BUDGET LES REVOLUTIONNAIRES NE LUI PARDONNERONT PAS QUELLES GARANTIES A T IL OBTENU DES LA PART DES 3 FROMATIONS POUR CELA? QU'IL NE SERA PAS IMPLIQUER NI LUI NI AUCUN DE SES MEMBRES DANS LA CORRUPTION DES DERNIERES ANNEES? VOILA UN DES CINQ ROIS ( Aoun Bassil Berry Hariri Nasrallah ) DE CE PAYS QUI A CEDE ET PERDU FACE A LA REBELLION A QUAND LES AUTRES?
LA VERITE
01 h 22, le 29 janvier 2020