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Société - Justice

Le parquet de cassation prône la levée du secret bancaire sur les comptes de Mission de vie

Le procureur général a requis un élargissement d’enquête sur un éventuel trafic d’enfants.

Des membres de Mission de vie. Photo tirée de la page Facebook de la congrégation

Si la communauté Mission de vie s’est félicitée jeudi qu’une décision du parquet de cassation émise le jour même l’a innocentée des accusations de la juge pour mineurs, Joëlle Abi-Haïdar, pour maltraitance et harcèlement sexuel d’enfants, l’association religieuse qui s’occupe d’enfants défavorisés ne semble pas pour autant disculpée. Non seulement le procureur général, Ghassan Oueidate, a engagé dans sa décision des poursuites notamment pour atteinte à la pudeur, mais il a requis de surcroît une enquête élargie concernant le trafic d’enfants. L’avocate générale près la Cour de cassation, Carla Kassis, a soumis à cet égard au procureur un rapport judiciaire (qui a fuité), à travers lequel elle recommande la levée du secret sur les comptes bancaires de la congrégation.

Un communiqué émanant jeudi des avocats de Mission de vie a ainsi laissé penser que les faits dont Mme Abi-Haïdar a accusé l’institution dans son jugement du 6 décembre sont infondés. Le communiqué se base sur la décision du parquet de cassation de demander au parquet d’appel du Mont-Liban d’engager des poursuites à son encontre pour deux seuls griefs, celui d’avoir résisté à l’exécution d’une décision de justice (article 380 du code pénal) et celui d’atteinte à la pudeur (article 519). Sur le premier point, deux religieuses avaient refusé le 6 décembre de remettre, conformément à une décision de Mme Abi-Haïdar, deux nourrissons à des agents des Forces de sécurité intérieure accompagnés de deux assistances sociales, arguant du fait qu’une décision du tribunal religieux en avait donné la tutelle à Mission de vie. Quant à l’atteinte à la pudeur, le communiqué insiste sur le fait qu’elle est reprochée à une personne travaillant au sein de l’association, et non à celle-ci en tant que personne morale. Il ajoute que l’accusé (un religieux) est innocent jusqu’à preuve du contraire, alléguant que le parquet requiert sa poursuite sur base de suspicion et que c’est au jugement définitif de prononcer ou non sa culpabilité. Or le rapport soumis par Mme Kassis à M. Oueidate indique que la communauté avait organisé une réunion entre la victime, une jeune fille agressée, et un frère de la congrégation, au cours de laquelle celui-ci s’est excusé. Ce qui fait dire à une source judiciaire que l’accusé a donc bien reconnu qu’il est coupable. Le religieux a d’ailleurs vu sa mission réduite au sein de la communauté et ses vœux définitifs reportés d’un an, indique le rapport, qui fait état de dépositions conformes « dans les plus minutieux détails » à celles qui avaient été présentées à Joëlle Abi-Haïdar concernant les circonstances de l’acte portant atteinte à la pudeur.


(Lire aussi : Réouverture du procès de Mission de vie)


La congrégation semble par ailleurs avoir occulté le fait que le parquet de cassation a demandé à la procureure générale près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, d’élargir l’enquête sur le trafic d’enfants. Même si le rapport de Mme Kassis indique que ce crime « n’est pas prouvé, d’autant que les familles auxquelles Mission de vie a confié des enfants nient fermement avoir payé une quelconque somme d’argent ou offert des aides en contrepartie des adoptions », il n’en reste pas moins que l’avocate générale recommande de « compléter l‘enquête à travers une note adressée à la Commission spéciale d’investigation (au sein de la Banque du Liban) pour lever le secret bancaire des comptes appartenant à la communauté, ce en vue de s’assurer de ses sources de financement ».

Une autre accusation dont se lave Mission de vie est la maltraitance des enfants. Or, le rapport judiciaire précise que là aussi, les témoignages présentés devant l’avocate générale sont identiques à ceux présentés à la juge pour mineurs. Sont ainsi évoqués « des coups abondants, remarqués par des passants », qu’administrait « à tout bout de champ », à des enfants hyperactifs, une dame en charge de l’éducation. Si Mme Kassis précise que ces actes ne comportent pas les éléments constitutifs d’un crime pénal, elle souligne cependant qu’ils constituent une bonne base légale à la décision de la juge pour mineurs, qui a considéré que les enfants étaient en danger dans l’institution.


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