Aussitôt brûlé, aussitôt remplacé. Les Libanais se sont réveillés vendredi matin sur les images désolantes du "Poing de la révolution" en flammes. Ce symbole de la contestation, avait été dressé sur la place des Martyrs dans le centre ville de Beyrouth au début du mouvement populaire, et faisait neuf mètres de haut. Il n'a fallu que quelques heures pour Tarek Chehab, qui l'avait dessiné, conçu, installé, et en avait assumé lui-même les frais, pour le remplacer par un autre, similaire à l'original, avec l'inscription version 2.0.
Le “Poing de la Révolution” se lève une nouvelle fois sur la place des Martrys. #LeLibanserévolte pic.twitter.com/UI8Dp1mNDd
— L'Orient-Le Jour (@LOrientLeJour) November 22, 2019
Arrivé à 17h30 sur la place des Martyrs, le nouveau poing, porté par un groupe de manifestants, a réussi à se frayer un passage au milieu de la foule. Parmi les autres protestataires sur place, de nombreux se sont portés volontaires pour aider à le hisser. Après plusieurs tentatives rendues difficiles par le nombre de manifestants rassemblés, qui refusaient toutefois de reporter l'installation du poing à demain matin, le "symbole de la révolution" a été hissé et a retrouvé sa place, moins de deux heures plus tard, sous les applaudissements des présents sur place.
Le nouveau poing à son arrivée Place des Martyrs. Photo AMH.
"C’est l’emblème de la Thaoura. Notre révolution est tellement pacifique qu’ils ne parviennent pas à nous attaquer, c’est le seul moyen auquel ils ont pu recourir pour nous adresser un message qui est leur seul langage, le langage de la violence", avait déclaré le matin M. Chehab, 32 ans, à notre collaboratrice Carla Henoud, promettant de remplacer le poing incendié très vite.
Interrogé par une chaîne de télévision locale, un témoin qui avait passé la nuit sous une tente place des Martyrs avec d'autres contestataires avait affirmé dans la matinée qu'un homme était venu à moto à six heures. "Il s'est approché de notre tente et nous a dit : 'je vais faire quelque chose qui va vous faire du mal'", a-t-il raconté. Selon le jeune homme, l'inconnu a ensuite lancé des bouteilles, probablement remplies d'essence, sur le "Poing de la révolution" et y a mis le feu.
En attendant l'installation du nouveau poing, un homme, Nader, avait décidé de rester symboliquement le poing levé à l'endroit où le "Poing de la révolution" était installé.
Photo Carla Henoud
Le Liban célébrait vendredi sa fête nationale en pleine contestation populaire et, à Beyrouth comme partout dans le pays, ce 76e anniversaire revêt pour beaucoup les traits d'une "nouvelle indépendance".
Depuis le 17 octobre, le pays vit au rythme d'un mouvement de protestation sans précédent contre l'ensemble de la classe dirigeante. Il a insufflé chez des centaines de milliers de Libanais de tous bords l'espoir d'une refonte du système de gouvernance, inchangé depuis des décennies et jugé sectaire et défaillant.
Pour mémoire
Le poing d’honneur de Tarek Chehab
Quand certains parlent pour ne rien dire d'autres bossent pour faire renaître le pays, bravo !
23 h 49, le 23 novembre 2019