Le mouvement de protestation sans précédent contre l'ensemble de la classe dirigeante, qui est entré dans son 37ème jour, a donné vendredi matin le coup d'envoi de ses célébrations, à l'occasion du 76ème anniversaire de l'indépendance du pays pour lequel le Liban officiel a organisé une très modeste cérémonie. Le mouvement de contestation a insufflé chez des centaines de milliers de Libanais de tous bords l'espoir d'une refonte du système de gouvernance, inchangé depuis des décennies et jugé sectaire et défaillant.
Alors que l’armée libanaise a organisé un défilé militaire au siège du ministère de la Défense à Yarzé, un "défilé civil" a débuté à partir de 14 heures sur la place des Martyrs, dans le centre-ville de Beyrouth, où des milliers de Libanais se sont réunis pour l'occasion, pour célébrer cet anniversaire.
Photo Ani
Plusieurs rassemblements ont été organisés dans plusieurs quartiers de Beyrouth, notamment dans celui de Hamra.
Les médecins ont également organisé un rassemblement à Beyrouth.
Photo Dr Ama Sadaka
Dans ce cadre, des milliers de Libanais habillés en blanc, drapeaux libanais à la main, se sont rassemblés à Jal el-Dib, haut lieu de contestation dans le Metn, pour une marche en direction de la place des Martyrs.
À Rachaya, une marche est partie des souks vers la citadelle où, le 11 novembre 1943, Béchara el-Khoury, Riad Solh et d'autres hommes politiques ont été emprisonnés par les Français. Quelques jours plus tôt, le Liban se dotait d'un drapeau et déclarait l'arabe langue officielle. Leur libération, 11 jours plus tard, marquera d'un sceau la date de l'indépendance... le 22 novembre.
Par ailleurs, une randonnée regroupant plusieurs dizaines de personnes, a été organisée à Bisri, dans la vallée du Chouf. Si le projet du barrage à Bisri est contesté depuis de nombreux mois, parce qu'il met en péril l'environnement et le patrimoine de cette vallée et qu'il prévoit l'expulsion de ses habitants, la mobilisation y est encore plus forte depuis le début de la révolte populaire, le 17 octobre. Des militants dorment, certains sous des tentes, dans cette vallée depuis plusieurs semaines.
A Saïda, une centaine de protestataires ont organisé un petit-déjeuner collectif sur la place Elia, autre haut-lieu de la contestation, dont l'armée libanaise a fermé les accès pour la sécurité des participants, selon notre correspondant sur place, Mountasser Abdallah.
Photo Mountasser Abdallah
Dans l'après-midi, un millier de personnes se sont rassemblées à Saïda et ont sillonné les rues de la ville avec des drapeaux libanais. Les manifestants, parmi lesquels se trouvaient notamment des médecins, des avocats et des étudiants, ont clôturé leur marche sur la place de la révolution du 17 octobre, ont offert des fleurs à l'armée libanaise et chanté l'hymne national libanais.
"Le plus important dans cette manifestation est de dire quels sont nos objectifs : le combat contre la corruption, et l'indépendance de la justice, en ce qui nous concerne en tant qu'avocats", dit Mona Samra, avocate. "Nous sommes ici pour que le pouvoir entende les revendications du peuple", dit de son côté Imane Heneine, qui fait partie du groupe des enseignants. "C'est une marche civile qui montre le vrai sens de l'indépendance, l'indépendance réelle pour la prise de decision libre", affirme Ismail Sayyad. "Cette marche est une marche d'indépendance, qui veut la réalisation de nos demandes en tant que médecins mais aussi celles des handicapés", ajoute Abd el-Bsat, dentiste.
Photo Ani
À Tripoli, en soirée, des milliers de Libanais se sont rassemblés en force sur la place al-Nour, épicentre de la mobilisation dans cette ville phare de la contestation. Dans l'après-midi, une marche était partie de la place al-Nour et a sillonné les rues de la capitale du Liban-Nord avant de retourner sur la place al-Nour.
Marche à Tripoli. Photo Omar el-Imady.
Par ailleurs, de nombreux expatriés galvanisés ont eux aussi décidé de participer à ce 22 novembre hors du commun. Des centaines d'émigrés du pays du Cèdre sont arrivés vendredi en fin d'après-midi à l'aéroport international de Beyrouth. Ils se sont directement dirigés vers le centre-ville de Beyrouth afin de renforcer les rangs des manifestants.
Le 22 novembre 1943, le Liban, sous mandat français depuis 1920, accédait officiellement à l'indépendance après des manifestations populaires ayant rassemblé alors, dans un premier élan d'unité, chrétiens et musulmans. Le pays a toutefois connu par la suite une guerre civile (1975-1990), ou encore deux occupations étrangères, israélienne (1978-2000) et syrienne (1976-2005). Et il est resté profondément divisé, confessionnellement et politiquement, jusqu'à ce jour.
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commentaires (5)
La plus belle fête nationale que le liban ait jamais vu! Inchallah ya rab que tout le libamais suivront et que tois verront finalement la lumière Vive le Liban Libre, Indépendant et Uni!!!
Wlek Sanferlou
21 h 30, le 22 novembre 2019