Le président libanais Michel Aoun a assuré mardi être ouvert à un gouvernement incluant des représentants du mouvement populaire, après plus d'un mois d'une contestation inédite contre la classe dirigeante accusée de corruption et d'incompétence, qui a poussé le cabinet de Saad Hariri à la démission le 29 octobre
"Le nouveau gouvernement sera politique et inclura des experts et des représentants de la contestation populaire", a affirmé le chef de l'Etat au coordonnateur spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Liban, Jan Kubis, selon un communiqué publié par le palais de Baabda.
Depuis le début de la contestation populaire, Michel Aoun a toujours affirmé être en faveur d'un gouvernement "techno-politique" mais sans jamais faire allusion à l'inclusion d'éventuels représentants du mouvement. Cependant, le président du Parlement et leader du mouvement Amal, Nabih Berry, s'est prononcé à plusieurs reprises - la dernière fois il y a 15 jours selon des propos de M. Berry rapportés par la presse - en faveur de la nomination de représentants du mouvement de contestation au sein du futur cabinet.
Dans une interview à L'Orient-Le Jour datée du 9 novembre dernier, la vice-présidente du Courant patriotique libre aux affaires politiques, May Khoreiche, avait de son côté indiqué que le chef du CPL, Gebran Bassil, avait proposé un cabinet formé d'experts, dont certains pourraient être "désignées par le mouvement de contestation, à condition que les 'leaders' de ce mouvement décident d’avancer des noms, ce qu’ils n’ont pas fait jusqu’à présent".
Les manifestants, dans la rue depuis le 17 octobre, réclament, eux, un gouvernement transitoire formé exclusivement de technocrates totalement indépendants des partis au pouvoir, tous conspués sans exception. Selon la Constitution, c'est le chef de l'Etat qui doit déclencher les consultations parlementaires contraignantes en vue de désigner un nouveau Premier ministre. Mais cette démarche n'a toujours pas été lancée, trois semaines après la démission de Saad Hariri, attisant la colère de la rue.
"Je suis constamment prêt à rencontrer des représentants de la contestation afin de les informer de mes efforts pour satisfaire leurs demandes", a souligné par la suite le président Aoun en recevant une délégation de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL).
La semaine dernière, Jan Kubis avait appelé les autorités libanaises à "désigner de toute urgence un Premier ministre et à accélérer la formation d'un nouveau gouvernement composé de personnalités reconnues pour leur compétence et leur intégrité et ayant la confiance du peuple".
"Surmonter les obstacles"
Par ailleurs, le président a affirmé à M. Kubis qu'il "allait fixer la date des consultations parlementaires contraignantes après la fin des concertations avec les parties politiques concernées par la formation du gouvernement (...) afin de surmonter les obstacles et faciliter la tâche du Premier ministre désigné".
Des sources à la Maison du centre, résidence du chef du gouvernement sortant Saad Hariri, citées par la chaîne locale LBCI, ont insisté sur l'importance des consultations parlementaires "car la situation s'aggrave sur les plans financier et économique".
Le pays souffre d'un déficit public chronique (11% du PIB en 2018) et croule sous une dette de 86 milliards de dollars (148% du PIB).
Plus tôt dans la matinée, et sous la pression d'une rue décidée à ne rien lâcher, la séance législative qui était prévue aujourd'hui à 11h place de l’Étoile a été reportée sine die, faute de quorum. Les députés étaient censés élire les membres des commissions parlementaires puis examiner plusieurs lois censées lutter contre la corruption ainsi qu'une loi d'amnistie générale controversée.
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Il cherche à gagner du temps, tout simplement. D'ici qu'ils trouvent des représentants du mouvement populaire, qu'ils se chamaillent à la mode libanaise sur le choix, qu'on les examine sous toutes les coutures, beaucoup de temps va passer, très utile pour ses alliés divers pour concocter leurs exigences qui ne sont malheureusement pas libanaises... Et si tout foire, en définitive, il peut vite sauter dans un avion et partir vivre sa vie de grand-père tranquillement ailleurs. Quant à nous, petit peuple libanais, il a oublié notre existence, excepté son gendre-chéri ! Irène Saïd
18 h 18, le 19 novembre 2019