S’il était encore possible d’espérer une forme d’accord, près d’un mois après le début du mouvement de contestation, l’interview mardi soir du président Michel Aoun ainsi que la mort d’un jeune protestataire à Khaldé ont bien montré qu’on était entré dans une nouvelle phase.
Le chef de l’État s’est montré totalement déconnecté des revendications des manifestants, provoquant une réaction ulcérée de la rue qui s’est intensifiée tout au long de la journée d’hier. Et il n’a pas pu entendre les milliers de manifestants réclamant son départ, qui voulaient protester devant le palais de Baabda et ont été tenus à distance par l’armée à plusieurs kilomètres du palais.
Quant à la mort du cadre du Parti socialiste progressiste Ala’ Abou Fakhr à Khaldé, tué par « erreur » selon des sources proches de l’armée, elle a galvanisé et surtout uni les foules qui ont rendu un émouvant hommage, du nord au sud du Liban, au « martyr de la révolution » dont les obsèques aujourd’hui à Choueifate devraient drainer une foule importante.
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Impasse politique totale
Sur le plan politique d’abord, c’est l’impasse totale. Le président a clairement affirmé qu’il était contre un gouvernement de technocrates, « qui ne peut pas décider de la politique du pays », et s’est prononcé pour un cabinet formé à moitié d’experts et à moitié de politiques, reprenant ainsi la position du Courant patriotique libre et du Hezbollah. Or le Premier ministre démissionnaire Saad Hariri ne veut pas en entendre parler, et n’acceptera s’il est désigné « qu’un gouvernement de spécialistes » qui devra s’atteler en premier lieu à résoudre la crise économique, explique une source proche du chef du cabinet sortant.
Cette source souligne que conformément à la Constitution, « c’est le Premier ministre désigné qui doit former le gouvernement, et personne d’autre ». Et d’ajouter : « Jusqu’à présent, Hariri n’a pas reçu de réponse à sa proposition. »
Cette même source dément les informations de médias locaux selon lesquelles le Premier ministre démissionnaire se serait récusé : « On ne peut pas se récuser sans avoir été désigné », explique-t-elle, ajoutant que le Premier ministre n’a « aucun problème » si une autre personnalité est désignée.
Une façon de répondre au message de Baabda, qui aurait sondé d’autres personnalités sunnites pour le poste de Premier ministre ? Selon des sources proches du député de Beyrouth Fouad Makhzoumi, ce dernier a été convoqué après la démission de M. Hariri il y a deux semaines au palais présidentiel, où il a été reçu par le chef du CPL et ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil. M. Makhzoumi lui aurait affirmé qu’il n’avait pas l’intention pour le moment d’accepter une telle proposition.
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« Mauvais timing »
« Nous sommes entrés dans une nouvelle phase de la contestation », explique un analyste politique qui a requis l’anonymat, estimant que l’interview du président est intervenue « au mauvais timing ». Le chef de l’État a choisi de donner cette interview le jour de l’arrivée de l’émissaire du président français Emmanuel Macron, venu exhorter à la formation d’un gouvernement. « Le président a barré la route à une solution qui commençait à être étudiée, et a compliqué la situation », ajoute-t-il.
En tout cas, estime cet analyste, « il n’y a plus de retour en arrière possible : on se dirige vers une intensification de la confrontation entre le pouvoir, c’est-à-dire le président soutenu par le Hezbollah, et la rue, à moins que les demandes du mouvement de protestation soient exaucées ».
Dans la rue, les propos du président Aoun – jugés par certains insultants à l’égard du mouvement de protestation – n’ont fait que durcir la contestation. Et les slogans répétés par les manifestants sont désormais directement dirigés contre le chef de l’État, lui demandant de « dégager ». Plus graves encore sont les incidents qui ont entaché les manifestations d’hier, notamment à Jal el-Dib, et qui pourraient indiquer qu’on est désormais entré dans une étape où les manifestations jusque-là pacifiques pourraient tourner à l’aigre.
« Il est clair que le pays tout entier et la révolution sont entrés dans une nouvelle phase après la mort du martyr Ala’ Abou Fakhr », affirme Rami Rayess, responsable de l’information au sein du PSP. « Plus le pouvoir tarde à répondre aux revendications des gens, plus les choses se compliquent et plus le pays est exposé aux dangers sécuritaires. Il est clair que la tension est grande sur toutes les places, et elle ne peut baisser que si le pouvoir répond favorablement aux demandes de la rue, à commencer par fixer immédiatement la date des consultations parlementaires contraignantes pour nommer un Premier ministre qui pourrait avec le président, les autres parties politiques et la société civile former un gouvernement de technocrates pour faire sortir le pays de la crise. Si cela n’est pas pris en considération, il va sans dire que nous allons vers des jours plus difficiles ».
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LA PEUR DE BASSIL EST QUE HARRIRI SOIT NOMME ET QU'IL "RENVERSE " UNE FOIS DE PLUS LA TABLE ET FAIT ACCEPTER A SON TOUR UN CABINET DE TECHNOCRATES UNIQUEMENT MEME SI IL DOIT ATTENDRE 8 MOIS COMME LES AUTRES L'ONT OBLIGE A FAIRE AVEC LE DERNIER GOUVERNEMENT D'OU SA RESISTANCE A LE NOMMER SANS GARANTIE ( qui entre nous vaudront autant que la garantie donne par Bassil et Berry de faire nomme un juge presente par les FL ) QUAND UN JEUNOT VEUT FAIRE LE FORT MAIS QU'IL EST BRUSQUEMENT DEMUNI DE PLUS DE 75% DES CHRETIENS ( ET 100% DES SUNNITES QUI L'ONT ELU A bATROUN ), Il SE RACCROCHE A UN FIL CAD A SA MILICE ET LA MILICE DE SON ALLIE POUR FAIRE PEUR PAR LA MENACE ET LA FORCE SANS SE RENDRE COMPTE QUE CELA SE RETOURNERA CONTRE LUI EN FIN DE COMPTE
12 h 07, le 14 novembre 2019