Ziad Assouad, député CPL de Jezzine. Photo ANI
Le torchon brûle-t-il entre le Courant patriotique libre et le tandem Amal-Hezbollah ? La question se pose à la lumière notamment des flèches décochées récemment par le président de la Chambre, Nabih Berry, en direction du CPL et son chef, Gebran Bassil, avec, en toile de fond, l’affaire Amer Fakhoury, ancien cadre militaire de l’Armée du Liban-Sud, baptisé « le boucher de Khiam », et qui est rentré au Liban il y a près d’une semaine.
Commentant ce dossier, le chef du législatif n’a pas manqué de critiquer l’attitude de l’ambassadeur du Liban à Washington Gaby Issa (gravitant dans l’orbite du CPL) quant à la présence de M. Fakhoury à une réception organisée à l’ambassade. Selon M. Berry, cité par le quotidien al-Joumhouriya dans son numéro de lundi dernier, l’ambassade « devrait être ouverte à tout le monde, exception faite des agents (d’Israël) ». « On ne saurait être indulgent sur ce plan », a-t-il tonné dans ce qui sonne comme une flèche ouvertement décochée en direction des mentors de M. Issa.
Mardi, le chef du CPL exposait une feuille de route qui serait, selon lui, à même de redresser la situation économique et financière du pays. L’occasion de présenter une série de propositions portant sur la lutte contre le gaspillage et la corruption. « Il faut d’abord supprimer, de manière définitive ou temporaire, les institutions et les organismes dont nous n’avons plus besoin comme le Conseil du Liban-Sud ou le ministère de l’Information », avait-il déclaré lors d’une conférence de presse tenue au siège du CPL.
Il est vrai que cette proposition figure aussi dans le projet de budget 2020 élaboré par le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, bras droit de Nabih Berry, reflétant une entente politique élargie autour de la nécessité de lutter sérieusement contre le gaspillage et la corruption, dans la mesure où il s’agit des réformes exigées par la communauté internationale dans le cadre de la conférence de Paris dite CEDRE (avril 2018). Il n’en reste pas moins que le fait de singulariser le Conseil du Liban-Sud pourrait contribuer à envenimer les rapports en dents de scie entre le CPL et le mouvement Amal.
Mais dans les milieux proches de Gebran Bassil, on ne partage pas cet avis. Contactée par L’Orient-Le Jour, une responsable au sein du directoire du parti et qui a requis l’anonymat assure que les rapports entre sa formation et celle du président de la Chambre sont « bons ». « Le Conseil du Liban-Sud n’est qu’un exemple que M. Bassil a donné pour illustrer la nécessité de lancer une lutte sérieuse contre le gaspillage dans les plus brefs délais », explique-t-elle, rappelant que les deux partis convergent sur plusieurs points articulés notamment autour de la grave conjoncture économique actuelle.
(Lire aussi : Mandat d’arrêt à l’encontre de Amer Fakhoury)
« Détention éminemment politique »
Pour en revenir à l’affaire Fakhoury, c’est surtout après les récents propos de Ziad Assouad, député CPL de Jezzine, concernant ce dossier que les craintes sur une nouvelle mésentente entre le parti fondé par le chef de l’État et la formation dirigée par le président de la Chambre, mais aussi avec le Hezbollah, prennent une tout autre dimension.
Dans une interview accordée hier à notre confrère an-Nahar, M. Assouad n’a pas mâché ses mots : « La détention de Amer Fakhoury n’est pas légale, mais éminemment politique. » « Conformément aux lois en vigueur, il a le droit de rentrer au Liban, parce que les crimes dont il a été accusé ont été prescrits », a-t-il ajouté. Des propos importants dans la mesure où ils interviennent à l’heure où le Hezbollah, allié traditionnel du CPL dont relève M. Assouad, continue d’observer un silence radio quant à ce sujet, en attendant le discours du secrétaire général du parti Hassan Nasrallah, prévu demain. Ils interviennent aussi à l’heure où certains médias gravitant dans l’orbite du parti chiite se sont lancés dans une diatribe contre le leader du CPL, à cause notamment de sa vision des réformes du projet de budget.
Mais aussi bien le député de Jezzine que son parti s’efforcent de minimiser la portée politique de cette divergence avec le tandem chiite. « C’est surtout en ma qualité d’avocat que je me suis exprimé sur l’affaire de Amer Fakhoury », confie Ziad Assouad à L’OLJ, assurant qu’il s’agit de son propre point de vue à ce sujet. Une façon pour lui de garder le CPL loin de toute polémique que ses propos pourraient susciter. « Personne ne m’a rien demandé », confie-t-il encore, écartant tout risque de nouvelle querelle avec le tandem Amal-Hezbollah.
Pour ce qui est de la position officielle du CPL à ce sujet, une source au sein du parti explique que celui-ci est attaché à son point de vue traditionnel : le parti s’oppose à une amnistie générale portant sur tous les collaborateurs avec Israël. Ceux qui sont impliqués dans des crimes contre des Libanais devraient faire l’objet de procès. Et d’appeler à laisser la justice prendre son cours.
(Lire aussi : Vie et mort de l’Armée du Liban-Sud)
Retour au débat fondamental
Hier, Ziad Assouad a écrit sur son compte Twitter : « La trahison est une constante dans les textes de loi. Elle n’est ni discrétionnaire ni proportionnelle. Et tous ceux qui ont collaboré avec des étrangers contre le Liban ou sur son sol sont des traîtres. C’est ce que stipulent les textes (de lois) (…). » À travers ce tweet, M. Assouad tentait de rectifier le tir par rapport à ses propos antérieurs. Sauf qu’au terme « ennemi », il a substitué celui d’« étranger ». Une façon de mettre, quoique implicitement, la tutelle syrienne et l’occupation israélienne sur un pied d’égalité.
Perçue sous cet angle, cette déclaration est certainement à même de rouvrir le débat fondamental articulé surtout autour des notions d’« ennemi » et d’« occupant » qui ont longtemps divisé les Libanais, aussi bien avant la guerre qu’après sa fin.
Interrogé à ce sujet par L’OLJ, un cadre des Forces libanaises se contente de souligner que « tout comme il faut respecter les appréhensions de ceux qui ont souffert des crimes de Amer Fakhoury et d’Israël, il faut se rappeler aussi que le régime syrien a commis des crimes dans un pays dont il ne reconnaît même pas l’existence ».
Mais Ziad Assouad s’en tient à une lecture juridique. « Je n’ai fait que rappeler la façon dont le code pénal libanais, toujours en vigueur, qualifie les collaborateurs avec l’étranger », explique-t-il.
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commentaires (13)
CE N'EST PAS COMME VOUS DITES ENTRE HB ET LE CPL C'EST ENTRE HB ET UNE GRANDE PARTIE DES LIBANAIS QUI PENSENT QUE L'AGRESSION PALESTINIENNE CONTRE LES LIBANAIS CHRETIENS EST LA CAUSE DE LA DEMANDE A ISRAEL D'UNE AIDE SANS LAQUELLE LE LIBAN AURAIT ETE LA PALESTINE DE RECHANGE AUJOLURDH'UI CESSONS DONC DE FAIRE BOUGER LES MASSES CONTRE AMER FAKHOURI CERTES DES CRIMES HORRIBLES ONT ETE COMMIS MAIS PAS SEULEMENT PAR LES LIBANAIS PRO ISRAEL EN CE TEMPS LA MAIS PAR TOUS Y COMPRIS DES LIBANAIS ET DES PALESTINIENS AUJOURDH'UI ADULES AU LIBAN UNE AMNISTIE GENERALE EST POUR TOUS. ON NE PEUT PAS DISTINGUER LES BONS ET LES MAUVAIS DURANT CETTE PERIODE A AUJOURDH'UI HB A DES PRISONS AU LIBAN MEME OU ON NE SAIT RIEN DE CE QUI SE PASSE DEDANS . VOILA LE VRAI CRIME DU GOUVERNEMENT A RESOUDRE ET PAS CE QUI C'EST PASSE DANS DES CONDITIONS EXTRAORDINAIRES 20 ANS AUPARAVENT
LA VERITE
18 h 10, le 19 septembre 2019