A l'issue d'un bref interrogatoire, le Tribunal militaire libanais a lancé mardi un mandat d'arrêt à l'encontre de l'ancien cadre de la milice pro-israélienne de l’Armée du Liban-Sud, Amer Élias Fakhoury, revenu au Liban il y a plusieurs jours et en détention depuis son arrivée à Beyrouth.
En parallèle à l'audience à huis-clos devant la juge d'instruction militaire Najat Abou Chakra, des dizaines de personnes ont manifesté devant le siège du Tribunal militaire, provoquant des embouteillages dans le quartier du Musée national, à Beyrouth. Les manifestants brandissaient des pancartes appelant notamment à refuser "toute ingérence américaine dans la justice libanaise" et à "préserver le sang des martyrs de l'armée, de la résistance et la dignité de la patrie".
Amer Fakhoury, 56 ans, avait fait l’objet en 1996 d’un jugement par contumace le condamnant à 15 ans de prison pour collaboration avec Israël. Il aurait notamment orchestré des séances de torture visant à arracher des aveux à des détenus emprisonnés à partir de 1985 et donné des ordres pour mater une mutinerie qui avait éclaté en novembre 1989, ordonnant le lancement de bombes à gaz dans les cellules. Conformément au code de procédure pénale, la prescription de cette condamnation a été atteinte en 2016, ce qui aurait poussé Amer Fakhoury à rentrer à Beyrouth, en estimant qu'il ne pourrait plus être appréhendé par la justice.
Toutefois, à part les crimes atroces dont il s’était rendu coupable et pour lesquels il a déjà été jugé, l'ancien cadre de l'ALS en aurait plus récemment commis un autre : il a notamment obtenu la nationalité et un passeport israéliens, des faits qu'il a admis lors de son interrogatoire mené la semaine dernière par la Sûreté générale. Ces crimes ayant été commis dans le contexte du conflit entre le Liban et Israël, ils sont imprescriptibles, et l’instance juridictionnelle devrait donc se baser, selon un juriste interrogé par L'Orient-Le Jour, sur la continuité de ce forfait, le fait notamment qu'il soit toujours en possession de son passeport israélien.
(Lire aussi : Sur quels crimes le procès de Amer Fakhoury pourrait-il se fonder ?)
Délégation de l'ambassade US
Amer Fakhoury fait par ailleurs l'objet d'une plainte déposée par dix anciens détenus sous l'occupation israélienne, dont Souha Béchara, ancienne détenue communiste emprisonnée à Khiam pour avoir tenté de tuer le chef de l’Armée du Liban-Sud, Antoine Lahd. D'autres plaintes avaient déjà été déposées contre lui après son retour au Liban.
Dans ce cadre, Maan Assaad, l'avocat des familles des anciens détenus, présent devant le bâtiment du Tribunal militaire, a précisé que les plaintes que ces familles avaient déposées contre M. Fakhoury "ne sont pas encore parvenues au tribunal". Il a indiqué qu'une délégation mandatée par l'ambassade des États-Unis s'était présentée au tribunal afin d'assister à l'audience, mais n'avait pas reçu les permissions requises, "aucun accord n'existant avec les États-Unis à ce sujet". Celui que l'on a surnommé "le boucher de Khiam" en raison des tortures qui ont été infligées aux prisonniers de l'ancienne prison du Liban-Sud, est en effet détenteur de la nationalité américaine, en plus de l'israélienne.
Après le retrait unilatéral israélien en l'an 2000, la prison de Khiam est devenue un espace ouvert au public pour sensibiliser l’opinion sur les crimes commis dans ce lieu de détention (une ancienne caserne transformée en prison en 1984) où des dizaines de détenus ont trouvé la mort.
Lire aussi
Amer Fakhoury : une énigme à plusieurs inconnues
D’anciens détenus de Khiam réclament la peine de mort pour Amer Fakhoury
« C’est Amer Fakhoury qui orchestrait les séances de torture » à la prison de Khiam
Seize ans après le retrait israélien, des villages attendent toujours leurs bien-aimés
Pour mémoire
Actes d'accusation contre 14 Libanais ayant obtenu la nationalité israélienne
Décès à Paris d'Antoine Lahd, ancien chef de l'ALS
Arzé Saad Haddad, une Libanaise qui perfectionne les missiles israéliens
commentaires (5)
Une question aux chefs cuisinières expérimentées, en quoi les usa auraient ils le droit de se mêler de NOS AFFAIRES plus que les iraniens ou les russes ou les bantous ?
FRIK-A-FRAK
17 h 57, le 17 septembre 2019